Attentats: la déchéance de nationalité divise de plus en plus le gouvernement

Des cartes d'identité nationales vérifiées afin de déceler d'éventuels défauts à Limoges - Jean-Pierre Muller-AFP
Le gouvernement pourrait reculer sur la déchéance de nationalité. Jean-Marie Le Guen a confirmé vendredi les hésitations de l'exécutif à maintenir cette sanction pour les binationaux, y compris nés français, et condamnés pour des faits de terrorisme, dans le cadre de son projet de réforme de la Constitution.
"Le conseil des ministres tranchera mercredi prochain", à la veille des fêtes de Noël, sur la déchéance de nationalité, a déclaré le secrétaire d'Etat aux relations avec le Parlement, sur Europe 1. Avant de préciser: "J'ai l’impression qu'aujourd'hui il y a de moins en moins de gens qui pensent qu'il est fondamental d'inscrire dans la Constitution la perte de nationalité".
Divisions au sein de la majorité
A l'heure actuelle, la déchéance de nationalité est prévue par l'article 25 du Code civil, mais ne peut concerner que les binationaux qui ont acquis la nationalité française.
Si le Conseil d'Etat a validé la veille la révision de la Constitution envisagée par l'exécutif, qui comprend la déchéance de nationalité, la mesure divise au sein-même de la majorité. Proposée par François Hollande devant le Congrès trois jours après les attaques du 13 novembre, elle était censée viser les binationaux, y compris ceux nés en France, et condamnés pour activités terroristes. Le président l'avait clamé haut et fort: "Nous devons pouvoir déchoir de sa nationalité française un individu condamné pour une atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ou un acte de terrorisme, même s'il est né Français, je dis bien même s'il est né Français, dès lors qu'il bénéficie d'une autre nationalité."
"Aucune décision n'est prise"
Depuis, plusieurs ministres et députés, ainsi que le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, ont exprimé leurs réserves. Le Premier ministre lui-même s'est montré frileux. Si Manuel Valls a dans un premier temps défendu cette idée, empruntée à la droite, il a récemment reconnu que la mesure était symbolique et inefficace. "Je ne suis pas choqué par cette proposition, mais est-ce que le symbole, qui concerne quelques cas, en vaut la peine?" déclarait-il en début de semaine devant quelques journalistes.
Même réaction du côté du ministre de l'Intérieur. Lundi, lors de son entretien bimensuel avec le chef de l'Etat, Bernard Cazeneuve a plaidé pour un abandon de cette disposition. L'exécutif va donc devoir trancher sur ce sujet à haut risque. Pourtant, officiellement, rien n'est encore joué. Selon Le Monde qui rapporte des propos de la présidence: "Tout est possible. Il y a une réflexion. Matignon et Elysée discutent, aucune décision n'est prise à ce stade".