Frapper Daesh en Syrie: un tournant logique mais risqué, pour la presse

L'annonce attendue de frappes aériennes françaises en Syrie contre Daesh est un tournant stratégique cohérent, mais à l'issue incertaine, souligne la presse ce lundi, alors que le président de la République François Hollande devrait officialiser cette initiative dans la matinée, lors de sa conférence de presse semestrielles. Ce nouveau cap dans la lutte contre l'organisation jihadiste est en tout cas plutôt bien accueilli par les éditorialistes.
"Il était temps"
Seul le quotidien communiste L'Humanité est franchement contre. Jean-Emmanuel Ducoin dénonce "les dirigeants français, qui n’ont cessé d’alimenter les logiques guerrières et s’apprêtent, dit-on, à engager une nouvelle escalade sans mandat de l’ONU".
"Il était temps", juge au contraire Philippe Gélie dans Le Figaro. Avant de tempérer le soutien du quotidien conservateur: "le nouvel engagement français ne va pas à lui seul modifier la donne. Une révision stratégique plus vaste s’impose à la coalition arabo-occidentale, qui doit mettre sur pied une véritable armée régionale pour reconquérir les territoires occupés par les jihadistes".
Car la presse souligne l'extrême difficulté de l'entreprise. "Imaginer que cet engagement annonce la déroute de Daesh, que ses effets se feront rapidement sentir, relève de l’illusion" pour François Ernenwein dans La Croix. Pour le journal catholique, "les seules solutions au drame syrien et à la fuite des réfugiés passent par la diplomatie".
"Assad peut jubiler"
Il n'en reste pas moins qu'étendre les frappes à la Syrie est justifié pour Christophe Lucet, du journal Sud-Ouest. "Les auteurs et commanditaires des attentats aveugles commis dans l’Hexagone ont pour point commun d’avoir pour base arrière la Syrie: il serait d’autant plus cohérent d’y frapper que le califat autoproclamé ignore superbement les frontières classiques", écrit-il. Mais "que Paris adapte sa stratégie est une chose. Son éventuelle efficacité en est une autre", ajoute l'éditorialiste du quotidien bordelais.
D'autant qu'un engagement de troupes au sol est à ce jour exclu par Paris. Or, "faute d'intervention au sol le sinistre Etat islamique a de beaux jours devant lui", explique Patrice Chabanet dans Le Journal de la Haute-Marne.
Dans Le Midi libre, Jean-Michel Servant insiste de son côté sur "la difficulté pour le chef de l’Etat (...) de ne pas se tromper dans les objectifs: détruire les forces de l’EI sans faire plonger dans le chaos le régime de Bachar al-Assad".
Pour Pascal Coquis des Dernières Nouvelles d'Alsace, "la France qui voulait faire tomber le régime syrien va désormais se retrouver en position d’allié objectif de celui-ci, avec pour partenaires l’Iran et la Russie. C’est Bachar al-Assad qui peut jubiler".