François Hollande, auteur de son propre drame

Emmanuel Macron et François Hollande, le 23 mai 2016. - Francois Mori - Pool - AFP
On a beaucoup commenté la "pression" mise sur les épaules de François Hollande par son Premier ministre, Manuel Valls. Ou la trahison de ses proches... Et si le président de la République avait lui-même créé les conditions nécessaires pour se retrouver dans une telle impasse?
Evoquant la décision du chef de l’Etat de ne pas concourir à un second mandant, l’éditorialiste politique de BFMTV, Ruth Elkrief, a rappelé ce jeudi que ce choix n’avait pas été extorqué: "Une décision aussi grave, intime, personnelle, ne peut être prise que par l’homme lui-même".
"Suicide politique", "Hara Kiri"... dès le mois d'octobre
Si cette responsabilité lui appartient, la mauvaise posture dans laquelle il se trouve, et qui le pousse à se préparer à se mettre en retrait dès ce printemps plutôt qu’à essayer de prolonger son bail élyséen, est aussi de son fait. Encore frais dans les esprits, impossible d’oublier le livre d’entretiens avec François Hollande publié par les journalistes Gérard Davet et Fabrice Lhomme, Un président ne devrait pas dire ça, publié en octobre. Les propos contenus dans l’ouvrage, la légèreté apparente du patron de l’exécutif et les effets désastreux du livre sur la classe politique et l’opinion avaient induit l’idée d’un suicide politique.
Le mot avait été abondamment utilisé par la presse variant parfois sur le même thème via des termes tels que "Hara Kiri". Dans un sondage Ifop consécutif à la parution, 86% des Français faisaient part de leur envie de ne pas voir François Hollande sur la ligne de départ de la présidentielle. Leur vœu est donc exaucé aujourd’hui.
De bien mauvais calculs politiciens
A également été pointée l’indocilité de ses ministres, leur faculté à émettre publiquement des critiques sur la politiques suivie, voire à se déchirer entre eux pour arracher la place d’héritier naturel de François Hollande. Les querelles incessantes d’Emmanuel Macron, alors ministre de l’Economie, et Manuel Valls, le chef du gouvernement, étaient là pour l’illustrer. Cet article du Point accusait, peu avant le départ de Bercy de son protégé, François Hollande d’être l’instigateur de cette cacophonie. Surnommé "l’entomologiste", l’homme de la synthèse était décrit comme incapable de trancher les conflits personnels et politiques à temps. L’hebdomadaire écrivait ainsi s’agissant des dernières passes d’armes entre Emmanuel Macron et Manuel Valls: "Fidèle à lui-même, François Hollande n'a pas tranché. Pas encore. Il les laisse donc s'entredéchirer encore un peu. Il se dit que le plus fort aura raison de l'autre."
Les monter l’un contre l’autre, ou à tout le moins, laisser leur inimitié s’enliser n’a finalement pas arrangé les affaires du président: à l’arrivée, Manuel Valls est pressenti pour représenter le pouvoir sortant dans la primaire de la gauche en vue de la présidentielle, et Emmanuel Macron est d’ores et déjà candidat au scrutin du printemps.
Une primaire embarrassante
La primaire, justement, aura empoisonné la vie politique gouvernementale ces dernières semaines. Les intentions de François Hollande étaient mystérieuses. On a successivement supposé qu’il déposerait sa candidature pour cette compétition préliminaire avant le 15 décembre comme le prévoyait les statuts, puis on s’est demandé s’il ne court-circuiterait pas le processus pour annoncer sa volonté de défendre son bilan directement à la présidentielle.
"Impossible", avait répondu le journaliste Christophe Barbier sur le plateau de BFMTV il y a quelques jours, "il en a lui-même validé le principe".