Hollande - Gattaz: "je t'aime moi non plus"

François Hollande et Pierre Gattaz, le président du Medef. - -
"Entre le président de la République et le président du Medef, c'est un peu comme la chanson de Gainsbourg ‘Je t'aime, moi non plus’". Même si Jean-Claude Mailly est un expert dans le maniement de l’ironie, cette déclaration n’en est pas moins juste. Et le voyage aux Etats-Unis de François Hollande n’a fait que confirmer la tendance.
Flanqué de Pierre Gattaz, le chef de l’Etat s’est ainsi rendu, mercredi, dans la Silicon Valley pour y rencontrer des entrepreneurs français, pas forcément acquis à sa cause. Le président du Medef, qui endossait le rôle de pare-feu pour l’occasion, s’est donc senti poussé des ailes.
Hollande se moque de Gattaz
Lundi, il a ainsi réaffirmé que les allègements de charges promis aux entreprises dans le cadre du pacte de responsabilité ne devaient pas s'accompagner d'une "contrainte". Une sortie que n’a pas vraiment goûtée François Hollande et que certains observateurs ont qualifiée de "communication hasardeuse". Le lendemain, Pierre Gattaz a donc été contraint de reculer, n’excluant désormais plus des "objectifs chiffrés" en matière d’emplois.
Car François Hollande a retourné la situation à son avantage. Lors de son déplacement à San Francisco, le président français s’est employé à se rabibocher avec les patrons tricolores présents. Une réconciliation symbolisée par un "hug" échangé avec Carlos Diaz, l’un des initiateurs du mouvement des Pigeons.
En marge de cette rencontre, le chef de l’Etat en a profité pour louer les nouveaux liens qui le lient à Pierre Gattaz. Evoquant "cet avantage d'avoir eu le président du Medef tout au long de (son) déplacement", il en a remis une couche quelques minutes plus tard. "Il sera même dit que j'ai fait applaudir le président du Medef (…) Je ne doute pas qu'il me rendra la pareille le moment venu, ça fait partie du pacte de responsabilité, je l'avoue", a-t-il ironisé
Sarkozy et Parisot, une relation tumultueuse
"Sur le fond, ça n'a pas changé", selon Jean-Claude Mailly. Là encore, difficile de lui donner tort, tant les relations entre le président de la République et celui du Medef se sont souvent résumées à une bataille de mots.
Si Nicolas Sarkozy est apparu comme le plus proche du patronat, quelques-unes de ses orientations, notamment sociales, sont mal passées. Notamment en 2011, lorsque Claude Guéant, ministre de l’Intérieur, annonce son intention de réduire le nombre d’immigrés légaux.
Colère de Laurence Parisot, alors patronne de l’organisation patronale, pour qui l’immigration liée au travail a toujours été considérée comme bénéfique. La sortie d’un ouvrage anti-FN, coécrit par la dirigeante la même année, lui vaut de s’attirer les foudres de Nicolas Sarkozy. Globalement, leur relation s’est avérée tumultueuse, ne trouvant jamais son rythme de croisière.
La méfiance de Chirac envers Seillière
Que dire de celle de Jacques Chirac et Ernest-Antoine Seillère? Dans ses mémoires (2011), l’ancien président se fend d’un condescendant: "Je me souviens du baron Seillière venant se faire l’interprète auprès de moi des doléances de ses pairs".
La France était alors brouillée avec les Etats-Unis après le refus d’intervenir en Irak. Beaucoup soulignent la méfiance qu’entretenait Jacques Chirac envers le patron des patrons, même si sa politique économique répondait globalement à leurs attentes.
Paradoxalement, durant la même période, les relations se sont avérées beaucoup moins tendues entre Ernest-Antoine Seillière et… Lionel Jospin, Premier ministre socialiste. Dans les années 1960, les deux hommes ont en effet travaillé dans le même bureau au quai d’Orsay, et sont issus de la même promotion de l’Ena.