Élection législative anticipée à Montauban: un scrutin aux allures de banc d'essai de l'union des droites

Panneau électoral à Montauban le 8 octobre 2025 pour le deuxième tour de l'élection législative partielle - BFMTV
Ce qui devait être une banale élection législative partielle dans le Tarn-et-Garonne est devenue un laboratoire de l'union des droites. Dimanche 12 octobre, les 94.500 électeurs de la première circonscription du département sont appelés aux urnes pour départager les deux candidats qualifiés au second tour.
Pierre-Henri Carbonnel, le candidat de l'UDR, le parti d'Éric Ciotti (allié au RN) est arrivé en tête dimanche dernier avec 29,25% des voix, il affronte la socialiste Cathie Bourdoncle créditée de 24,3%, soutenue par le Parti radical de gauche.
Écartée, Brigitte Barèges nomme son successeur
Ce scrutin anticipé a été provoqué par le rejet des comptes de campagne de Brigitte Barèges (UDR) début juillet, sanctionnée d'un an d'inéligibilité et d'une démission d'office. Maire de Montauban pendant 20 ans, cette avocate de formation encartée à l'UMP puis à LR a cumulé son mandat local avec celui de députée jusqu'en 2012 avant d'être sèchement battue lors de la vague rose. À plusieurs reprises, elle a mis son parti dans l'embarras avec des sorties polémiques notamment contre le mariage homosexuel.
Partisante d'une droite dure, elle a naturellement suivi Éric Ciotti en 2024 lorsqu'il a fondé l'UDR et conclu un accord avec le RN. C'est sous cette étiquette qu'elle a détrôné la socialiste Valérie Rabault après douze ans de mandat et retrouvé son siège au Palais Bourbon.
LR et UDR investissent chacun un candidat
Au milieu de l'été, le 28 juillet, l'UDR a annoncé l'investiture de son adhérent, Pierre-Henri Carbonnel, un agriculteur d'une trentaine d'années, conseiller municipal de la commune rurale de Saint-Cirq, qui était jusqu'alors le suppléant de Brigitte Barèges. Cet ancien espoir du rugby forme un ticket avec Marie-Claude Berly, ancienne première adjointe devenue maire de Montauban toujours encartée chez LR.
Le même jour, la Commission National d'Investiture des LR investit Bernard Pécou, dirigeant d'entreprise, conseiller municipal à Montauban et conseiller départemental.
Quelques heures plus tard, Brigitte Barèges apporte sur les réseaux sociaux son soutien au tandem Carbonnel-Berly. Elle joue sur l'appartenance politique de la maire de Montauban. "Elle est toujours restée fidèle à sa famille politique, Les Républicains. Son engagement est constant, son cap clair", assure-t-elle.
L'échec du candidat LR au premier tour
Les instances nationales de LR décident alors d'exclure Marie-Claude Berly pour ne pas entretenir la confusion chez les électeurs. "Elle prend la décision de se présenter contre le parti politique auquel elle prétend appartenir. Elle prend la décision de se présenter avec l'étiquette RN qui est un concurrent politique", relevait le secrétaire départemental du parti auprès de France 3.
Bruno Retailleau, président de LR donne de sa personne et participe à un meeting aux côtés de son candidat à Montauban le 3 octobre mais Bernard Pécou est finalement distancé de presque 12 points par Pierre-Henri Carbonnel. Arrivé troisième du scrutin, il lui est impossible de se présenter au second tour faute d'avoir atteint le seuil des 12,5% d'électeurs inscrits.
"Pas une voix pour la gauche", déclare Retailleau
Le soir même de la défaite, dimanche 5 octobre, la fédération LR du Tarn-et-Garonne publie un communiqué invitant "conformément à la ligne politique historique (...) chaque électeur à voter en son âme et conscience".
Deux jours plus tard, Bruno Retailleau va plus loin lorsqu'il est interrogé sur la consigne de vote de son parti lors d'un entretien chez Europe1-CNews. "Pas une voix pour la gauche", expliquant que "c'est notre ligne", attendant que "les électeurs se déterminent", sans appeler à faire barrage à l'extrême droite.
Dans la journée, Éric Ciotti adresse une lettre ouverte au ministre de l'Intérieur démissionnaire dans laquelle il lui demande "solennellement" à appeler à voter pour son candidat. "Je n'ose imaginer qu'une absence de soutien de ta part et une abstention de LR puisse provoquer la victoire d'une députée soutenue par le Parti communiste".
Le patron de l'UDR est venu soutenir son candidat ce jeudi 9 octobre dans la préfecture du Tarn-et-Garonne, confiant dans ses chances de victoires et appréciant les propos du ministre de l'Intérieur démissionnaire. "Des murs sont en train de tomber. L'union et le rassemblement sont une évidence", a-t-il déclaré selon des propos rapportés par La Dépêche.
L'alliance UDR-RN compte également ce dimanche sur un report des voix de Brigitte Poma, responsable départementale RN jusqu'à fin juin, qui a fait dissidence et rassemblé 7,34% des bulletins au premier tour.
Constitution d'un front républicain de LFI à EPR
Candidate naturelle pour la gauche dans cette première circonscription du Tarn-et-Garonne, Valérie Rabault a annoncé le 28 octobre qu'elle ne se présenterait pas. A l'instar de Brigitte Barèges qui a désignée son successeur, l'ancienne présidente de la commission des finances de l'Assemblée nationale a propulsé une candidate: Cathie Bourdoncle, conseillère dans l'habitat et élue PS au conseil départemental dans un canton de Montauban.
Soutenue par le Parti radical de gauche et la présidente de la région Carole Delga, elle n'a pas pu faire le plein de voix au premier tour à cause de la présence du militant Generation.s Samir Chikhi, soutenu notamment par EELV, LFI et le PCF, crédité de 10,49% des voix. Celui-ci a appelé à voter pour Cathie Bourdoncle afin de faire barrage à l'extrême droite. Même chose pour Catherine Simonin-Bénazet (Renaissance, 5,3%).
Le contexte politique national complexe
Ce duel est d'autant plus observé qu'il se déroule dans un contexte d'instabilité politique lié à la démission du Premier ministre Sébastien Lecornu. Le président de l'Union des Droites Éric Ciotti estime qu'une alliance entre Les Républicains et le Rassemblement national lors d'une dissolution de l'Assemblée nationale, appelée par le RN, est une "occasion unique".
Le Premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure, la patronne des Écologistes Marine Tondelier et le Secrétaire national des communistes Fabien Roussel plaident pour une cohabitation avec "la nomination d'un Premier ministre et d'un gouvernement de gauche et écologiste qui permettra la construction de majorités à l'Assemblée".