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80 km/h: après les déclarations de Collomb, le mécontentement des associations

Le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb

Le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb - Thomas Samson - AFP

Alors que le ministre de l’Intérieur laisse deviner sa réprobation de cette mesure controversée, plusieurs associations de sécurité routière renouvellent leur soutien à l’abaissement de la vitesse maximale sur les routes secondaires.

Le débat est-il relancé? À deux mois de l’entrée en vigueur de l’abaissement de la limitation de 90 à 80 km/h sur les routes secondaires, Gérard Collomb laisse deviner sa désapprobation... au grand regret des associations de sécurité routière.

Interrogé jeudi sur cette mesure portée par Édouard Philippe lors d’une réunion publique, le ministre de l’Intérieur a esquissé un sourire en demandant à le droit à "un joker". Ce vendredi matin, il peinait encore à défendre la mesure sur notre antenne. Autant de déclarations qui agacent Chantal Perrichon, présidente de la Ligue contre la violence routière:

"Il se permet de parler de joker alors que nous parlons d’un problème de santé publique extrêmement important", condamne-t-elle sur BFMTV, pointant du doigt "son mépris, son désintérêt total en ce qui concerne la vie de ceux qui vivent dans les départements."

Éviter "du chagrin et du malheur"

Selon la spécialiste, "la majorité des accidents mortels ont lieu sur ces fameuses routes départementales qui n’ont pas de séparateur médian". Grâce à l’"excellente équipe d’experts qui travaille depuis des mois sur ce point", elle assure que l’abaissement de la vitesse maximale aura "des résultats". Très remontée, elle interpelle le ministre: "Ne prenez pas ce petit air malin lorsque vous contrez une mesure de rupture qui va permettre de sauver des vies et éviter bien du chagrin et bien du malheur sur les routes de France".

Agacée face à "ce ministre ignorant de l’accidentalité de son propre département", elle l’invite à un débat face à elle: "Je verrai ce qu’il en est de ses connaissances de la sécurité routière." Et de comparer le ministre à Jacques Mézard, lui aussi opposé à cette mesure, "un parfait ignorant en ce qui concerne l’accidentalité du Cantal" et à Laurent Wauquiez: "Ces gens-là font de la démagogie, ces gens-là refusent de protéger nos concitoyens. "

Les restes d'un "doute"

Même son de cloche du côté de l’Association prévention routière. Anne Lavaud, déléguée générale, regrette que "chacune des prises de parole", qui laisse supposer que la mesure n’est pas définitive, "ressème le doute chez les Français et nuise à l’acceptabilité d’une mesure prise pour leur propre sécurité":

"C’est comme ça que cette prise de parole a été interprétée", explique-t-elle à BFMTV.com. "Le fait qu’il n’ait pas été affirmatif laisse traîner un doute, et ce doute tous les opposants à la mesure s’en sont emparés (…) Le grand public, auprès duquel il y avait eu une pédagogie importante, risque de revoir sa position une fois encore."

Nouveau souffle pour l'opposition

Car les opposants à cette réforme, très controversée, ont eux aussi profité de la prise de parole du ministre pour faire à nouveau entendre leur agacement. Pierre Chasseray, délégué général de l’association 40 millions d’automobilistes, insistait ce matin sur BFMTV sur le mécontentement que partageraient des membres du gouvernement:

"Déjà à l’époque, beaucoup de ministres se sont inscrits en opposition au sein du conseil des ministres contre cette mesure. Il y avait déjà le ministre de l’Intérieur qui n’y était pas favorable, mais il y avait aussi Gérald Darmanin, il y avait le ministre de la Cohésion des territoires." "Quand on entend Édouard Philippe, on a l’impression qu’il est le seul à y être attaché", fait-il valoir.

Malaise au gouvernement

Le gouvernement a tenté d’éteindre l’incendie dès ce vendredi. À Strasbourg, Édouard Philippe a rappelé à son ministre l’importance de la cohésion: "L’ensemble du gouvernement est mobilisé sur cette mesure, l’ensemble des positions s’est exprimé avant que la mesure soit prise. Elle a été décidée, elle a été annoncé", a-t-il déclaré.

De son côté, Christophe Castaner a estimé sur Franceinfo qu’il n’y avait pas eu de "couac", et s’est exprimé en faveur de la réforme: "Je crois qu'aujourd'hui il faut avoir un peu de fermeté sur ces sujets-là. Je sais que c'est impopulaire, mais vous voyez il faut aussi assumer sa part d'impopularité si elle sauve des vies". La mesure doit prendre effet le 1er juillet.

Benjamin Pierret