Voiture folle à Nantes: l'acte suicidaire d'un "déséquilibré"

Un "déséquilibré" a foncé délibérément sur la foule, lundi soir sur le marché de Noël de Nantes, en percutant plusieurs personnes. - Georges Gobet - Pool - AFP
C’est un geste fou, d’une violence inouïe. Pour la troisième fois en autant de jours, une ville de France a été la cible d’une attaque imprévisible. Après les événements de Joué-lès-Tours samedi et de Dijon dimanche, un homme véhiculé a pénétré, lundi soir, sur une place très fréquentée du coeur de Nantes, alors en plein marché de Noël.
Au volant d'une camionnette blanche, il a foncé sur la foule, au hasard, blessant une dizaine de personnes, roulant sur certaines d’entre-elles. Après avoir percuté un stand de vin chaud, mettant un terme à son entreprise macabre, le conducteur s’est ensuite asséné lui-même plusieurs coups de couteaux dans le thorax, tentant ainsi de se suicider.
Que sait-on du profil de cet homme? Peut-il exister un quelconque lien avec les drames des jours précédents? Eléments de réponse.
> Sous curatelle et connu des services de police
"Les services secrets vont me tuer." Au milieu de mots incompréhensibles et de phrases incohérentes, voici, comme le révèle BFMTV, ce que les enquêteurs ont notamment pu lire, dès ce lundi soir, sur un calepin retrouvé dans la camionnette utilisée par le forcené. Toujours selon nos informations, le conducteur, qui aurait fait plusieurs références au suicide dans ce même carnet, serait âgé de 37 ans et originaire de Saintes, en Charente-Maritime.
Comme l’avait annoncé dans un premier temps le Ministère de l’Intérieur, ce suspect est déjà connu des services de police pour recel, dégradation de véhicule et vol simple. Il était placé sous régime de curatelle.
> "Une forme très particulière de suicide"
Pour les experts, et alors que l’enquête des forces de l’ordre ne fait que commencer, l’élément le plus marquant de ce nouveau drame est le fait que le conducteur de la camionnette se soit asséné plusieurs coups de couteau au thorax. "Qu’il se poignarde lui-même après avoir foncé sur la foule est important", a analysé Roland Coutanceau, expert national en psychiatrie, sur BFMTV.
"C’est une forme très particulière de suicide, qui ressemble à ce qu’on appelle des meurtriers de masse, des sujets qui agressent plusieurs personnes avec la volonté de les tuer, sauf qu’ici le fait de se suicider est intégré dans la dynamique de passage à l’acte", a-t-il ajouté. "C'est une manière très agressive de ponctuer sa fin de vie, en accompagnant avec lui un certain nombre de concitoyens."
> Un mode opératoire qui suscite des questions
"C’est une forme de passage à l’acte suicidaire tout à fait exceptionnel", a souligné de son côté le criminologue Jean-Pierre Bouchard, toujours sur BFMTV. "Il a choisi de suicider en public en agressant d’autres personnes avec son véhicule C’est ce qu’on appelle un suicide élargi, ou alors une tentative de suicide élargi".
Ce qui surprend d’autant plus ce spécialiste, c’est le mode opératoire utilisé par le forcené pour mettre un terme à ses jours une fois son acte réalisé. "Il décide de s’auto-mutiler, avec acharnement, alors qu’il existe des modes opératoires de suicide beaucoup plus efficaces et plus rapides", a encore souligné ce criminologue.
Le lieu du marché de Noël a-t-il été choisi par hasard? Pour nos deux spécialistes, il n’est pas impossible que ça ait eu un sens pour le conducteur de la camionnette. "Pendant la période des fêtes de fin d’année, où tout le monde est heureux, certains sont désespérés et en difficulté. Ça peut les pousser à l’acte", a expliqué à ce titre Jean-Pierre Bouchard.
> Trois événements hors-normes en trois jours
Un jour après le drame de Dijon, où un malade mental a foncé sur treize personnes en voiture, la ressemblance entre les deux affaires interpelle. Est-il toutefois possible de faire un lien entre les deux? Officiellement, non. L’Elysée a expliqué dans un premier temps que les événements de ces trois derniers jours "semblent sans rapport entre eux". Sur place lundi soir, Bernard Cazeneuve, le ministre de l’Intérieur, a bien insisté sur le fait que "tous ces actes doivent être replacés dans leur contexte".
"Il peut y avoir dans l’effet de médiatisation quelque chose qui inspire celui qui s’apprête à frapper", a nuancé Roland Coutanceau. "Dans l’affaire nantaise, on peut se demander, c’est une question, si le mode opératoire, qui est particulièrement la portée de tous, celui de foncer sur des piétons, a été inspiré ou pas par l’affaire de Dijon."
Gare toutefois aux éventuels amalgames, a-t-il averti. "Peut-être que l’auteur de Nantes s’est inspiré de celui de Dijon sur un aspect particulier, mais que sa motivation et sa personnalité sont très différentes."