Une Française revenue de Syrie jugée pour génocide contre la minorité yazidie?

Une juge ouvre un dossier dans une salle d'audience (photo d'illustration) - Ludovic MARIN © 2019 AFP
La cour d'appel devrait se prononcer le 8 juillet prochain sur les poursuites pour génocide visant une Française de retour de Syrie, suspectée d'y avoir réduit en esclavage une adolescente yazidie au printemps 2015, a appris l'AFP de source judiciaire ce mercredi 18 juin.
Un juge d'instruction antiterroriste du tribunal de Paris avait fait en septembre de Sonia Mejri, 36 ans, ex-épouse d'Abelnasser Benyoucef, un émir du groupe État islamique (EI), la première revenante française de Syrie à comparaître en France pour génocide sur les Yazidis, minorité ethnoreligieuse kurdophone. Mais la cour d'appel de Paris avait infirmé cette décision en janvier, ne retenant que les poursuites pour infractions terroristes et complicité de crimes contre l'humanité.
La Chambre criminelle de la Cour de cassation a cassé cet arrêt début mai.
Qualification des faits en génocide
La plus haute juridiction judiciaire française a estimé que l'on pouvait être poursuivi pour génocide si l'on s'en était pris à un seul membre d'un groupe faisant l'objet d'"un plan concerté tendant à sa destruction totale ou partielle", et non nécessairement à plusieurs comme le soutenait la cour d'appel de Paris.
Elle a donc renvoyé le dossier devant cette dernière, qui a examiné ce mardi au fond ces poursuites pour génocide. Celles pour les infractions terroristes ainsi que pour complicité de crimes contre l'humanité sont actées. Selon une source proche du dossier, l'avocat général a prôné la confirmation des poursuites pour génocide.
"La Cour de cassation ne s'est prononcée que sur un point de droit précis (...), ont déclaré à l'AFP les avocats de Sonia Mejri, Maîtres Marceau Perdereau et Nabil Boudi.
"Selon nous, ces charges sont tout à fait insuffisantes, comme la chambre de l'instruction l'a déjà décidé dans son précédent arrêt concernant le crime contre l'humanité sans être remise en cause par la Cour de cassation sur ce point", ont-ils ensuite ajouté.
L'esclavage sexuel, une arme des jihadistes
Les violences sexuelles ont été utilisées par les jihadistes de l'EI comme des armes pour briser la résistance des Yazidis et instaurer un climat de peur généralisé. En atteste notamment l'instauration de marchés aux esclaves sexuelles.
Sonia Mejri a contesté toute infraction liée à la Yazidie: son ex-mari en était le "propriétaire", avait-elle déclaré au cours de l'enquête, et elle n'avait "aucun droit" sur la jeune fille.
Un procès par défaut a été ordonné contre Abdelnasser Benyoucef comme auteur de génocide et de crimes contre l'humanité, et pour des infractions terroristes. Visé par un mandat d'arrêt, il est présumé mort depuis 2016.