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Police-Justice

Tuerie devant un centre kurde: pourquoi l'état psychique du suspect est un point-clé de l'enquête

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La garde à vue de l'homme de 69 ans, soupçonné d'avoir tué trois Kurdes vendredi à Paris, avait dû être interrompue, après un court séjour à l'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police. Son état psychique et psychiatrique pourra déterminer la suite de la procédure.

William M., soupçonné d'avoir tué trois Kurdes et d'avoir blessé trois autres personnes par balles vendredi, en plein coeur de Paris, doit être présenté ce lundi à un juge d'instruction en vue d'une éventuelle mise en examen.

Sa garde à vue, qui a repris dimanche, avait dû être interrompue samedi en fin de journée en raison de son état de santé. L'ex-cheminot de 69 ans avait en effet été transféré à l'infirmerie de la préfecture de police de Paris où il a passé la nuit de samedi à dimanche.

Une responsabilité pénale à déterminer

L'homme, qui s'est décrit comme "dépressif" et "suicidaire" devant les enquêteurs, a reconnu ressentir une "haine des étrangers devenue complètement pathologique" depuis le cambriolage de son domicile en 2016. Vendredi au petit matin, il a indiqué s'être rendu armé à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) "pour commettre des meurtres sur des personnes étrangères", a relaté la procureure de Paris Laure Beccuau. Mais, faute de monde et ne pouvant recharger facilement son arme "en raison de sa tenue vestimentaire", il a renoncé à son projet.

Si la motivation raciste de ces actes se confirme, son état psychique pose question. "Il faudra déterminer s'il est responsable pénalement", explique au micro de BFMTV la magistrate Evelyne Sire-Martin, membre du bureau de la Ligue des droits de l'Homme. En cas de mise en examen, des experts devront déterminer si William M. est considéré responsable ou non devant la justice, ce qui pourrait changer la nature de la peine.

"Ça va être compliqué parce que s'il a des problèmes mentaux, s'il est déclaré irresponsable partiellement ou totalement pénalement, si son discernement est aboli ou altéré, ça ne sera pas la même chose", détaille la magistrate.

Un acte commandité?

Autre point du dossier: la piste terroriste qui est, pour l'heure, écartée. Le suspect a ainsi expliqué "s'en être pris à des victimes qu'il ne connaissait pas", précisant en vouloir "à tous les migrants" et "aux Kurdes pour avoir 'constitué des prisonniers lors de leur combat contre Daesh (l'organisation État islamique, NDLR) au lieu de les tuer'", comme l'a relaté Laure Beccuau. La communuaté kurde, elle, réclame qu'il soit poursuivi dans le cadre d'une procédure terroriste, "qui est beaucoup plus sévère" en terme de peines.

Enfin, William M., s'il est reconnu responsable pénalement, a-t-il agi seul? "Tout est très mélangé: le caractère dérangé psychiquement de cet homme obsédé par les étrangers et toute la période actuelle qui transporte un certain nombre de racisme (...) est-ce qu'il a été inspiré par l'air du temps, par un trouble délirant, ou est-ce qu'il a une organisation terroriste derrière?", s'interroge Evelyne Sire-Martin.

Si finalement le caractère terroriste était retenu par la justice, il sera jugé par une cour spéciale. À l'inverse, si la piste est toujours écartée par l'enquête, William M. sera jugé par une cour d'assises ordinaire.

Fanny Rocher