"Servir sans faillir": le Raid, unité d'élite de la police, a 30 ans

Unité d'élite de la police française, le Raid fête ce vendredi ses 30 ans. - Thomas Samson - AFP
Quatre mots: recherche, assistance, intervention, dissuasion. Quatre mots pour désigner ce qui constitue l'élite de la police française: le Raid. Une unité à la devise légendaire: "Servir sans faillir", qui a fêté ce vendredi ses 30 ans.
Retour sur l'histoire de ce service qui s'est frotté aux plus spectaculaires prises d'otages ou affaires terroristes. Et qui doit aujourd'hui se réinventer face au "risque majeur" d'aujourd'hui, ainsi qu'à des délinquants et forcenés qui ne cèdent plus, rendant ainsi de moins en moins efficace les techniques de négociations qui ont fait son succès.
Une histoire qui débute autour d'une table de bistrot
Comment est né le Raid? Son sigle, tout d'abord, a vu le jour il y a donc trente ans...dans un bistrot. Autour de la table, ce jour-là, des gens de cabinet de la place Beauvau, où se trouve le ministère de l'Intérieur, échangent avec d'autres membres des forces de l'ordre. Parmi lesquels des "grands flics", comme Robert Broussard, connu pour être le "tombeur" de Jacques Mesrine, l'ennemi public N°1.
Tout ce beau monde partage alors un constat: la police française ne dispose pas, à l'époque, d'un service d'intervention digne de ce nom pour faire face aux forcenés, et au risque terroriste. Au contraire des gendarmes qui, depuis 1974, possèdent le Groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN).
Mais le Raid n'est "pas une réponse au GIGN", se remémore le préfet Ange Mancini, le premier patron historique du Raid. Cette création se veut la traduction de la "volonté commune de créer une culture d'entreprise, un service réactif avec des policiers de toutes origines".
Une "vitrine", "un laboratoire", une "Formule 1"
Robert Broussard soumet ainsi l'idée au ministre de l'Intérieur du gouvernement socialiste de François Mitterrand, Pierre Joxe. Séduit par le projet, il se lance dans l'aventure avec l'objectif d'en faire une "vitrine", un "laboratoire" de la police, selon son expression. Une "Formule un", juge aujourd'hui Ange Mancini, avec le recul.
Le Raid naît officiellement le 23 octobre 1985. Sa première affaire arrive à peine deux mois après, avec une retentissante prise d'otages au palais de Justice de Nantes à laquelle Mancini, Broussard - qui n'en est pas le chef - et leurs hommes mettent fin sans effusion de sang. Une première intervention qui se solde par un succès, et qui allait en appeler bien d'autres.
Près de 500 interventions par an
La liste des interventions du Raid -500 par an- est longue: forcenés anonymes mais aussi arrestation des chefs de l'organisation armée d'extrême gauche Action Directe en 1987, neutralisation du preneur d'otages dans une école maternelle de Neuilly-sur-Seine, dans les Hauts-de-Seine, "HB" - pour "human bomb" comme il se surnommait - en 1993, où il est tué.
Merah, Coulibaly
Comme Mohamed Merah qui avait semé l'effroi en France en mars 2012 en assassinant sept personnes au nom du jihad à Toulouse et Montauban. Ou Amédy Coulibaly, en janvier 2015 lors des attentats de Paris, dans un supermarché casher où quatre personnes de confession juive sont morts.
Sans compter la traque d'Yvan Colonna, condamné à perpétuité pour l'assassinat, en 1998, du préfet de Corse Claude Erignac. Ou l'assaut contre une planque du "gang de Roubaix", des truands entre banditisme et islamisme radical, en 1996.
Se confronter "à la démence"
"La mission du Raid", rappelle son actuel chef, Jean-Michel Fauvergue, "c'est se confronter à la démence du désespéré, du forcené ou criminel dans un lieu clos, la folie meurtrière du tueur ou la barbarie du terroriste".
Un terrorisme "low cost", ajoute-t-il citant Merah et Coulibaly. Mais "il faut se préparer à un attentat de masse", dit-il, "le danger est prégnant sur le long terme". Selon des sources internes, le Raid s'y prépare à partir de différents scenarii.
Pour l'actuel patron du Raid, la difficulté vient aujourd'hui de "délinquants, sans parler des radicalisés revenus de Syrie, qui sont de plus en plus désinhibés par la violence". Si bien que la négociation, si longtemps utilisée au Raid, l'est "de moins en moins". "Ils ne se rendent pas", assène-t-il.
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