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Police-Justice

Paris: comment la police a truqué les chiffres de la délinquance

Les chiffres de la délinquance auraient été sciemment maquillés à Paris, selon un rapport de l'IGA (photo d'illustration)

Les chiffres de la délinquance auraient été sciemment maquillés à Paris, selon un rapport de l'IGA (photo d'illustration) - -

Les techniques utilisées par les policiers parisiens pour réduire les chiffres de la délinquance sont diverses: de la minoration des faits à la destruction d'informations... Et les faits ont duré jusqu'à l'été 2013.

Rapport "explosif", de l'avis d'un haut fonctionnaire. Les statistiques de la délinquance de la préfecture de Paris ont été maquillées pendant des années, selon un rapport de l'Inspection générale de l'administration (IGA).

Si elles ont fortement diminué depuis l'arrivée de Manuel Valls à l'Intérieur, ces pratiques ont perduré par endroits, précise ce rapport "très sensible", selon plusieurs sources policières, dont l'AFP et Europe 1 ont pu consulter lundi des extraits.

Les auteurs de ce rapport, commandé par le préfet de police de Paris Bernard Boucault en septembre 2012, ont mis à nu un système mis en place depuis plus d'une dizaine d'années, visant à minorer la délinquance.

Un cambriolage enregistré comme une dégradation

Minoration des faits (un cambriolage enregistré comme une dégradation par exemple), report (les services stoppent l'enregistrement des plaintes avant la fin du mois), ou même destruction pure et simple de certains faits, sont pointés comme les principales techniques utilisées.

Le rapport cite l'exemple d'un commissaire parisien reconnaissant qu'il notait sciemment, y compris depuis les nouvelles directives du préfet, toutes les tentatives de cambriolages dans la rubrique des dégradations, afin de "ne pas faire exploser les chiffres". Un commissaire de banlieue parisienne a également expliqué aux rapporteurs classer toutes les tentatives de cambriolages en dégradations lorsqu'il n'y a pas de préjudice car, selon lui, "les magistrats ne poursuivent pas, alors, pourquoi se tirer une balle dans le pied?"

Le rapport évoque notamment près de 16.000 faits de délinquance disparus en 2011 à Paris, selon une source proche du dossier.

Des pratiques qui perdurent jusqu'à l'été 2013

Le ministre de l'Intérieur Manuel Valls a de nombreuses fois attaqué la droite sur la dissimulation de ces chiffres, insistant sur une exigence de transparence. Mais si ce nouveau rapport confirme bien l'escamotage organisé des statistiques à la préfecture de police (PP), un système qui s'est accéléré en 2008, il atteste également de la persistance de mauvaises pratiques dans certains services, au moins jusqu'à l'été 2013, soit un an après l'arrivée de Bernard Boucault nommé par Manuel Valls.

"Le rapport note la fin du report. Mais c'est vrai, certains commissaires ont fourni des réponses étonnantes. En fait, il semble difficile pour certains de rompre avec des habitudes qui avaient été établies pendant des années", explique un haut fonctionnaire à la PP. "Mais les consignes données par le préfet sont très claires, ces pratiques, qui ont diminué comme le note le rapport, doivent cesser", a-t-il souligné.

Ces anomalies "sont sur le point d'être définitivement réglées", a ajouté un haut fonctionnaire, notamment avec le déploiement fin avril d'un nouveau logiciel d'enregistrement.

A. D. avec AFP