Manifestations: un policier explique la difficulté d'interpeller des casseurs

Les "casseurs cassent la République", a estimé ce samedi sur Twitter Gérald Darmanin. Le ministre de l'Intérieur s'exprimait à l'issue de la manifestation parisienne contre la loi Sécurité globale émaillée de scènes de vandalisme: voitures brûlées, banques et agences immobilières vandalisées, policiers et gendarmes noyés sous une pluie de projectiles...
"On n'a jamais vu autant de gens déterminés contre la police, c'était compliqué", raconte sur BFMTV Abel, un policier présent ce samedi, dont la mission est de faire du renseignement en civil pendant les manifestations, également délégué chez Alliance Police Nationale,.
"La police est prise entre le marteau et l'enclume"
Dans le cortège parisien samedi, un groupe de "400 à 500 éléments radicaux" a fait irruption, selon une source policière citée par l'AFP, formant un "black bloc" et empêchant la progression des manifestants. Mais sur les 29 personnes placées en garde à vue pour les faits constatés samedi à Paris, il n'y avait aucun "casseur", a indiqué une source proche de l'enquête à BFMTV.
"On peut interpeller quelqu'un, on le prend en compte, mais là on se fait caillasser", déclare Abel, tentant d'expliquer pourquoi plus de casseurs ne sont pas davantage interpellés à chaque manifestation. Selon lui, "malheureusement parfois", d'autres manifestants viennent en aide à ceux venant d'être arrêtés.
"La police est prise entre le marteau et l'enclume", continue-t-il. "Si on utilise les moyens de défense, le souci c'est qu'il peut y avoir des dommages collatéraux, et s'il y a des dommages collatéraux, on peut crier ou scander aux violences policières". Mais "en face on a des manifestants qui nous jettent des pierres, des fois des cocktails molotov, on est aussi dans le devoir de pouvoir repliquer".
Rappelant que certains manifestants sont venus avec des marteaux ou encore des barres de fer, "vous voulez demander sincèrement à des fonctionnaires de police d'aller au contact?", interroge Guillaume Farde, consultant sécurité pour BFMTV. "Mais qui va assumer le risque de blessures? Appeler à des interventions beaucoup plus fermes c'est faire prendre plus de risques." 67 policiers et gendarmes ont été blessés samedi, selon le ministère de l'Intérieur.
Des techniques rôdées
Les casseurs semblent également avoir des techniques et une organisation bien rôdées pour éviter l'arrestation.
"Les activistes qui prennent part aux violences sont familiers des méthodes de la police. Ils savent décrypter les réactions des forces de l'ordre et éviter les interpellations en flagrant délit", déclare à LCI Olivier Cahn, professeur de droit pénal à l’Université de Tours.
Dans une note de 2016, le CREOGN (Centre de Recherche de l'école des officiers de la gendarmerie nationale) compare le fonctionnement d'un Black Bloc à celui d'un banc de poissons: le bloc se disperse "en petits groupes au moment des actions pour saturer les services d'ordre adversaires" puis "se rassemble au sein du bloc pour assurer une défense de manière solidaire (...) Cette forme leur permet d'être à la fois mobiles et soudés pour se défendre".
"C'est tout à fait nouveau (...), on a affaire à une organisation paramilitaire de gens très bien entraînés", déclarait, à propos des black blocs, le sénateur LR Bruno Retailleau, dimanche sur BFMTV appelant à créer des "brigades anti black blocs".
