Des policiers en service minimum à Marseille: ont-ils le droit de faire "grève"?

Le commissariat du XIVe arrondissement de Marseille était fermé au public ce dimanche. A quelques centaines de mètres de là, seules les plaintes les plus importantes, comme pour des agressions ou des cambriolages, étaient enregistrées dans l'arrondissement voisin du XVe. Cette situation est la conséquence de la multiplication des arrêts maladie au sein des effectifs policiers.
Moins d'une semaine après la mise en examen de quatre policiers de la BAC marseillaise et le placement en détention provisoire de l'un d'entre eux, la colère est montée d'un cran. Alors que les syndicats de police évoque un "état de sidération" dans les rangs à la suite de cette décision, et réclament une "juridiction spécialisée", les arrêts maladie se sont multipliés d'abord au sein des effectifs de la BAC, puis de toutes les unités de voie publique à Marseille, mais aussi dans plusieurs villes du sud de la France et en Ile-de-France.
"Mes collègues ne sont pas en mesure de reprendre le service eu égard à l’onde de choc provoquée par le placement en détention de leur collègue", explique Eddy Sid, délégué Unité SGP Police FO.
Interdiction du droit de grève
Le motif de ces arrêts maladie est un "état d’anxiété chronique avéré", souligne le syndicaliste. "Ils ont accumulé des nombres d'heures pour rétablir l'ordre lors des émeutes, et ça se retourne contre nous", détaille Bruno Bartoccetti, responsable zone Sud au syndicat Unité SGP FO.
Ce ras-le-bol chez les policiers n'est par ailleurs pas nouveau, d'autant que la profession peut rarement le faire entendre étant soumise au droit de réserve et n'ayant pas le droit de faire grève, à l'instar d'autres professions comme les surveillants pénitentiaires, les magistrats ou les militaires. Leur droit à manifester est plus trouble.
"Lorsqu'il n'est pas en service, il (le policier, NDLR) s’exprime librement dans les limites imposées par le devoir de réserve et par la loyauté à l’égard des institutions de la République", prévoit le code de déontologie.
Les policiers ont déjà contourné cette interdiction du droit de grève. En février 2016, les policiers de la police aux frontières (PAF), qui protestaient contre contre la perte d'avantages sociaux, avaient mené des contrôles "zélés", créant la pagaille dans les aéroports de Roissy et d'Orly. Quelques semaines plus tard, après l'attaque de leurs collègues à Viry-Châtillon, des centaines de policiers avaient manifesté, de manière inédite, sur les Champs-Elysées.
Code 562
Depuis vendredi dernier, le syndicat Unité SGP Police FO a aussi appelé à appliquer le "code 562". "Nous n'avons pas appelé aux arrêts maladie mais de ne plus faire le travail d'initiative", décrypte Bruno Bartoccetti, responsable de la zone Sud, qui assure que les policiers ne "lâchaient pas la population".
Concrètement, les policiers sortent uniquement sur réquisitions ou pour les affaires urgentes. "Tout ce qui est urgent sera assuré à Marseille, insiste Eddy Sid. Si on appelle pour une agression, les policiers seront présents."
Le code 562 correspond à "position d'attente pause". Le but est ainsi "de plomber la politique du chiffre de l'administration", explique un policier, en faussant les statistiques. Les codes des missions traditionnelles, les patrouilles, les interventions, entre autres, n'étant plus renseignés dans le logiciel des commissariats. "C'est une action symbolique, nous voulons une sortie de crise qui passera par la garantie d'une juridiction spécialisée", conclut Bruno Bartoccetti.