L'éléphante d'un cirque tue un octogénaire: 800 euros d'amende requis

Deux éléphants dans un cirque de Mexico en 2001 (illustration). - -
L'accident est rarissime. Une amende de 800 euros, dont la moitié avec sursis, a été requise lundi à Meaux contre le directeur d'un cirque dont l'éléphante Tanya avait tué un octogénaire dans un village de Seine-et-Marne. La représentante du parquet Hélène Collet entend avec cette amende pour homicide involontaire "éviter un nouveau drame par la suite". L'éléphante continue depuis l'accident, en septembre dernier, de se produire avec le Cirque de l'Europe.
Ce 8 septembre 2013, sur la place du village de Lizy-sur-Ourcq, 3.600 habitants, célèbre dans le monde des chapiteaux car son cimetière accueille le tombeau de la famille Bouglione et d'autres tombes de grands noms du cirque, il y a "une adjonction de comportements fautifs", a déclaré Hélène Collet.
Le propriétaire du cirque, Max Aucante, venait de reconduire l'éléphante d'Afrique dans son enclos en plein air, après un numéro sur une place gazonnée, lorsque le pachyderme a saisi avec sa trompe une bâche, pour la poser sur la clôture électrique, que les éléphants craignent et qui l'empêchait de s'enfuir. "L'éléphant a été laissé sans surveillance après son numéro, alors qu'il était énervé", a déclaré Hélène Collet.
Tanya, en souffrance psychique?
L'animal de 5 tonnes avait chargé, franchissant d'un pas la ligne de protection édifiée par ses gardiens: une seconde enceinte formée de barrières et de remorques. D'un coup de trompe, il avait fauché l'homme, âgé de 84 ans, interdit devant la bête. Projeté au sol et blessé, cet agriculteur de la région était mort après avoir été héliporté et hospitalisé.
Aux enquêteurs, le propriétaire du cirque avait raconté que "normalement, l'éléphant n'aurait pas dû pouvoir attraper cette bâche", qui protégeait sa réserve de foin de la pluie. L'animal, avec lequel Max Aucante travaille depuis 25 ans, avait déjà provoqué des courts-circuits en s'attaquant à sa barrière électrique avec des branchages. Avait-on négligemment laissé traîner la bâche dans l'enclos, ou le vent l'a-t-il mise à portée de trompe de l'animal ? La question reste en suspens, Max Aucante n'ayant pas été interrogé par les gendarmes sur ce point et ne s'étant pas présenté à l'audience - son cirque est en tournée.
Mêmes doutes à propos des conditions de vie dans le cirque, dénoncées de longue date par les défenseurs des animaux. La souffrance psychique de Tanya a pu la rendre agressive. Le tribunal n'a pu s'appuyer que sur les photos de l'enclos prises le jour du drame, les spécialistes de l'Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) n'ayant visité le cirque que trois jours après, alors qu'il a déjà déménagé.
Jugement fin juillet
Le propriétaire "a respecté les règles, ce n'est pas un cirque dans lequel on laisse les animaux vaquer à leurs occupations sans clôture", a affirmé de son côté pour la défense Me David Missistrano. "On est face à un accident. Max Aucante et son assureur couvriront les dommages civils" mais il n'y a pas lieu à une condamnation pénale, a-t-il ajouté.
Les associations de défense des animaux qui comptaient profiter de cette tribune pour demander l'interdiction des éléphants dans les spectacles, n'ont pas pu se constituer parties civiles. "Ces animaux n'ont rien à faire dans les cirques", a déclaré en marge de l'audience la présidente de l'association One Voice, Muriel Arnal. "Ce sont des animaux sociaux, qui ont besoin de deux à trois heures de marche par jour et sont en souffrance" sous les chapiteaux, a-t-elle ajouté.
Une quarantaine d'éléphants se produisent selon elle dans des cirques en France, une pratique qu'elle juge condamnée à disparaître. "Les zoos refusent de leur en donner ou ne leur en vendent plus", souligne-t-elle. "Que ceux qui sont là finissent leur vie dignement", demande-t-elle. Le jugement doit être rendu le 28 juillet.