INFO BFMTV. Un collectif d’avocats dépose plainte contre Nicolas Sarkozy pour "outrage à magistrat" et "atteinte à l’autorité de la justice"

L'ancien président Nicolas Sarkozy, le 8 octobre 2021 à Bordeaux - Philippe LOPEZ / AFP
Selon les informations de BFMTV, une vingtaine d’avocats ont déposé plainte contre Nicolas Sarkozy pour "outrage à magistrat" et "atteinte à l’autorité de la justice", ce mercredi 1er octobre.
En cause: les propos tenus par l’ancien président de la République dans Le Journal du dimanche (JDD) le 27 septembre, après sa condamnation à cinq ans de prison ferme pour "association de malfaiteurs", dans l’affaire libyenne. Nicolas Sarkozy a estimé que sa condamnation "violait toutes les limites de l’État de droit"; d’autres passages de l’interview sont également incriminés.
Qui dépose plainte?
À l’initiative de cette plainte : Jérôme Giusti, pénaliste, avocat des chauffeurs Uber en France et fondateur d’une "Brigade du droit", qui se dit engagée dans la défense de l’État de droit.
Me Giusti a déposé cette plainte au nom d’une vingtaine d’autres avocats, membres des barreaux de Paris, de Caen ou encore de Montpellier. On trouve parmi eux Jean-Baptiste Soufron, l'un des avocats de l’association anti-corruption Anticor, qui dépose plainte à titre personnel.
"Lorsque Nicolas Sarkozy a été condamné, sa prise de parole à la sortie de l’audience semblait déjà être une attaque contre la justice. Mais c’est la réitération de ses propos dans le JDD qui nous a fait réagir", affirme à BFMTV Jérôme Giusti.
"Tout le monde a le droit de critiquer une décision de justice. Nicolas Sarkozy a le droit de se défendre. Mais il y a des limites. On ne peut pas laisser passer cette attaque en règle de la justice", estime Me Giusti.
Trois passages ciblés
Déposée directement auprès du parquet de Paris ce 1er octobre, cette plainte, que BFMTV a pu consulter, attaque en particulier trois passages de l’interview de Nicolas Sarkozy: quand il estime que sa condamnation "violait toutes les limites de l’État de droit"; quand il associe les actes de justice le concernant à des "pratiques si contraires à l’État de droit" ; et quand il dit qu’il ne pliera pas "face au mensonge, au complot et à l’insulte" (des juges, pour les signataires, NDLR).
Ces propos "ne sauraient être regardés comme une simple critique d’une décision de justice dont M. Nicolas Sarkozy a déclaré au demeurant faire appel: ils constituent de fait un acte délibéré de discrédit porté à l’institution judiciaire, de nature à affaiblir la confiance des citoyens dans l’impartialité et l’indépendance de la justice", estiment les signataires.
Ses propos "nuisent à l'État de droit"
À leurs yeux, en tant qu’avocat et ancien président, "Nicolas Sarkozy connaît la portée de ses paroles et l’effet direct qu’elles exercent sur l’opinion publique". "Ses propos portent atteinte non seulement à la décision de justice visée, aux magistrats l’ayant rendue mais aussi au respect dû à l’institution judiciaire", soulignent-ils encore, ajoutant: "Ils nuisent gravement à l’État de droit".
D’abord l’atteinte à l’autorité de la justice. L’article 434-25 du Code pénal sanctionne d’une peine de six mois d’emprisonnement et de 7.500 euros d’amende "le fait de chercher à jeter le discrédit, publiquement par actes, paroles, écrits ou images de toute nature, sur un acte ou une décision juridictionnelle, dans des conditions de nature à porter atteinte à l’autorité de la justice ou à son indépendance".
Ensuite l’outrage à magistrat. L’article 434-24 du Code pénal qui définit l’outrage envers les magistrats dans l’exercice de leurs fonctions.
Menaces sur les magistrats
"Nous considérons qu’en tant qu’avocats et auxiliaires de justice, nous sommes personnellement victimes de cette atteinte à la justice. Notre rôle est que les citoyens aient confiance dans les juges, les magistrats et les avocats. C’est une atteinte à notre exercice que de mettre en cause l’institution judiciaire", souligne Me Giusti.
"Les propos outranciers et dangereux de M. Nicolas Sarkozy nous causent par conséquent un préjudice d’exercice et d’image, tant matériel que moral", précise la plainte.
Depuis la condamnation de Nicolas Sarkozy, les magistrats qui ont rendu le jugement dans l’affaire libyenne, dont la présidente du tribunal, Nathalie Gavarino, ont été menacés de mort. Deux enquêtes distinctes sont ouvertes par le parquet de Paris. Sur notre antenne le 30 septembre, Laure Beccuau, la procureure de Paris, a dénoncé "un déchaînement haineux" contre les juges.