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Police-Justice

Hérault: deux collégiennes se disant fascinées par les histoires d'horreur tuent le père de l'une d'entre elles

Le drame s'est déroulé à Fabrègues, près de Montpellier, dans l'Hérault.

Le drame s'est déroulé à Fabrègues, près de Montpellier, dans l'Hérault. - Capture Google street view

La mère et une des soeurs ont également été grièvement blessées lors de cette attaque, dimanche après-midi. En garde à vue, les deux adolescentes ont avoué préparer cet acte depuis des semaines.

Deux adolescentes de 13 ans ont été mises en examen mardi pour "assassinat, tentatives d'assassinat et complicité", pour avoir tué à l'aide de ciseaux et d'un couteau le père de l'une d'entre elles et blessé grièvement sa mère et l'une de ses soeurs. Des faits qui ont eu lieu près de Montpellier, que rapportait en début de semaine Le Midi Libre et que confirme ce vendredi une source policière auprès de BFMTV.com.

Lors de leur garde à vue, les deux jeunes filles ont avoué avoir prémédité ce passage à l'acte depuis plusieurs mois, s'inspirant des "creepy pasta", des légendes horrifiques virales sur Internet, disponibles sous différents formats et très facilement accessibles.

Inspirées par le personnage horrifique de "Slender man"

Dimanche, Mathilde invite son amie Sarah (les prénoms ont été modifiés) à déjeuner chez elle avec sa famille, dans leur maison de Fabrègues, un village près de Montpellier. Le repas se termine sur une réflexion des parents de Mathilde au sujet du ménage. Le reproche de trop, déclarera plus tard cette dernière aux enquêteurs.

Après le repas, les deux collégiennes regagnent la chambre de Mathilde et décident de mettre à exécution un plan auquel elles réfléchissent depuis plusieurs mois: tuer tous les membres de la famille à l'aide d'armes blanches.

Lors de leur garde à vue, les adolescentes disent avoir été inspirées par un personnage fictif en particulier, le "Slender man", sorte d'homme sans visage aux membres très longs auxquels elles auraient fini par s'identifier. Créé en 2009, ce personnage qui commet des crimes a eu droit à son adaptation au cinéma en 2018.

Selon le récit des faits confirmés de source policière à BFMTV.com, Mathilde et Sarah passent à l'acte vers 15 heures, armées d'une paire de ciseaux dont elles ont séparé les deux branches et d'un couteau.

Le père succombe, la mère et la soeur blessées

Elles se rendent d'abord dans la chambre de la soeur cadette, qu'elles décident d'épargner au dernier moment, précise-t-on de même source. Selon nos confrères du Midi-Libre, celle-ci est âgée de 6 ans. L'autre soeur de Mathilde, âgée de 8 ans, n'échappe pas à leur violence: elle est grièvement blessée au rein après avoir reçu un coup de couteau.

Alertés par le remue-ménage, les parents se précipitent dans la chambre et sont à leur tour pris pour cible: la mère de famille est touchée au niveau du poumon, et le père meurt des suites de ses blessures au thorax.

Après le drame, les deux collégiennes prennent la fuite et se réfugient à Sommières, à une cinquantaine de kilomètres de Fabrègues, chez des membres de la famille de Sarah. C'est là qu'elles seront finalement interpellées.

"Très peu de filtres" sur Internet

Si ces faits semblent hors-norme, la fascination pour l'horreur chez les adolescents l'est moins, éclaire Arianne Casanova, experte pédopsychiatre qui intervient auprès de la Cour d'appel de Paris. "J’ai travaillé à la protection judiciaire de la jeunesse, des cas de fascination comme celui-là, ça existait", détaille-t-elle, contactée par BFMTV.com. Tout comme, soulige-t-elle, les violences sexuelles perpétrées par des enfants ou des adolescents très exposés à la pornographie.

"La majorité des parents n’ont aucune perspective sur ce que leurs enfants peuvent voir et comment ils le comprennent. Très peu de filtres sont effectifs pour les accès à Internet, et quand il y en a, certains enfants sont plus doués en informatique que leurs parents et peuvent contourner ce qu’ils veulent", précise l'experte psychiatre.

Une expertise psychiatrique doit être réalisée au cours de l'instruction. Cependant, pour l'experte, tout n'est pas à chercher du côté de la psychologie des deux adolescentes. Si l'identification à des personnages ou à des groupes est normale à cet âge, Arianne Casanova affirme qu'il faut aussi que l'adolescent ait la possibilité de dialoguer avec son entourage pour en comprendre les limites.

Placées en détention provisoire

"On oublie souvent que pour parler de pédopsychiatrie, il faut parler du développement d’un sujet, et que ça démarre dès tout petit". Est-ce qu’il y a eu du psychotraumatismes dans la construction de l'adolescent? Si oui, à quel moment? Des questions essentielles, pointe l'experte.

"Se décharger directement du côté de la psychiatrie, c’est une façon de ne pas aller gratter sur les manquements sur le plan éducatif, familial mais aussi de la collectivité sociale et éducative", conclut-elle.

Selon nos confrères de Midi-Libre, au terme de l'instruction, les adolescentes devraient être jugées par un tribunal pour enfants statuant en matière criminelle. Comme pour tous les mineurs âgés de 13 à 16 ans, elles devraient bénéficier de la "clause de minorité": elles n'écoperont donc que la moitié de la peine qui aurait été attribuée à un adulte. Elles encourent donc 20 ans de réclusion criminelle au lieu de la perpétuité, peine que risque un adulte reconnu coupable d'assassinat.

Fait très rare pour des mineures aussi jeunes, elles ont été placées en détention provisoire, sur demande du Procureur de la République de Montpellier.

Elisa Fernandez