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Gilets jaunes: des caméras sur les forces de l'ordre utilisant des LBD dès ce samedi

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Face à la polémique autour des lanceurs de balles de défense (LBD), à l'origine de plusieurs blessures graves parmi des manifestants, le ministère de l'Intérieur assure que les agents les utilisant seront équipés de caméras. Beaucoup d'associations réclament l'interdiction pure et simple de ces armes.

En équipant de caméras-piétons les forces de l'ordre dotées de lanceurs de balles de défense (LBD), Christophe Castaner a fait un pas mardi vers davantage de "transparence" sur l'utilisation de cette arme, décriée au sein des gilets jaunes.

La controverse autour des LBD, accusés d'avoir causé de graves blessures et même d'avoir éborgné des manifestants, a récemment pris de l'ampleur, alimentant la colère des gilets jaunes et mettant le gouvernement sur la défensive. 

Face à la polémique, Christophe Castaner a affirmé mardi devant une commission de l'Assemblée nationale que les policiers et gendarmes utilisant cette arme non-létale seraient équipés d'un système-vidéo dès ce samedi, lors du 11e week-end de mobilisation des gilets jaunes. Un dispositif testé samedi dernier à Bourg-en-Bresse, dans l'Ain. 

Cette instruction "répond à la double exigence de transparence et d'exemplarité que nous devons aux Français", a ensuite tweeté le ministre.

Ces caméras-piétons devront être actionnées "au moment de l'usage des LBD" afin qu'en cas de "débat", "contestation" ou "contentieux", "on puisse produire ces images y compris dans le cadre judiciaire", a précisé le ministre devant les députés. 

"On utilise ces caméras-piétons au quotidien. On a des patrouilles qui circulent. Avec ces caméras, à partir du moment où on enclenchait, le comportement de la victime changeait", assure à BFMTV Christophe Rouget, syndicat des cadres de la sécurité intérieur. 

Une exception pour les forces de l'ordre "bousculées à terre"

Seule "réserve" du locataire de Beauvau: dans les cas où les forces de l'ordre "seraient bousculées, à terre", "je ne leur en voudrais pas d'utiliser une arme de défense pour garantir leur propre défense", a-t-il dit.

Le ministre, qui s'était dit vendredi "sidéré" par les accusations de violences policières portées par des gilets jaunes, a par ailleurs affirmé que quatre personnes ont été gravement blessées à l'oeil par des LBD depuis le début du mouvement le 17 novembre.

Ce premier bilan officiel est bien inférieur au chiffre de 17 personnes ayant perdu un oeil, avancé par le collectif militant "Désarmons-les" et le journaliste indépendant David Dufresne, avec détails, photos et parfois vidéos à l'appui.

"Aucune (blessure) n'est acceptable mais toutes doivent faire l'objet d'une enquête pour déterminer les raisons avec lesquelles cela s'est produit et les conditions dans lesquelles cela s'est passé", a déclaré le ministre de l'Intérieur, qui disait la semaine dernière n'avoir "jamais vu un policier ou un gendarme attaquer un manifestant".

Ces quatre cas de blessures graves recensés par les autorités font partie des 81 enquêtes judiciaires dont a été saisie l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) au titre des projectiles tirés par LBD, a précisé le ministre.

Deux personnes ont été blessées à l'oeil, dont l'une a été éborgnée, samedi à Rennes lors de la manifestation des gilets jaunes, a par ailleurs annoncé mardi le parquet local.

Le Défenseur des droits demande la suspension du LBD-40

Jeudi, le Défenseur des droits Jacques Toubon a de nouveau réclamé la suspension de cette arme pour "prévenir plutôt que soigner". La France est un des derniers pays européens à utiliser les LBD, successeurs des flashballs dans les années 1990. Selon les manuels d'instruction, les forces de l'ordre ne doivent recourir au LBD qu'"en cas d'absolue nécessité" et "de manière strictement proportionnée", ne pas tirer au dessus des épaules et prendre soin d'éventuels blessés.

Des vidéos qui inondent Internet et les réseaux sociaux depuis le début de la crise des gilets jaunes montrent que ces consignes ne sont pas toujours respectées.

"On ne peut pas demander aux manifestants d'être exemplaires si on ne l'est pas soi-même", avait estimé dimanche le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux. "L'exemplarité, elle est dans les deux sens", avait-il ajouté, appelant les témoins de violences à le signaler sur le site dédié de la police.

Pour beaucoup d'associations, il faut une interdiction pure et simple. "Je pense que le gouvernement a intérêt à baisser les tensions et certainement pas à jouer les provocations. Ce n'est pas simplement en filmant comment le maintien de l'ordre est fait que l'on apaisera cette situation", analyse sur notre antenne Malik Salemkour, président de la Ligue des Droits de l'Homme

Yasmine Muffoletto, Sébastien Riou et Jean-Baptiste Graziani, avec Liv Audigane et AFP