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Police-Justice

Carlton de Lille: DSK, "l'Antiquité", et les mots crus des prostituées

DSK quitte le tribunal, mardi, après sa première journée d'audition dans le cadre du procès du Carlton de Lille.

DSK quitte le tribunal, mardi, après sa première journée d'audition dans le cadre du procès du Carlton de Lille. - François Lo Presti - AFP

Appelé à la barre pour la première fois ce mardi dans le cadre du procès du Carlton de Lille, Dominique Strauss-Kahn a maintenu sa ligne de défense, réaffirmant à plusieurs reprises qu'il n'avait pas connaissance de la participation de prostituées lors des parties fines.

Le procès du Carlton de Lille est entré dans le vif du sujet, ce mardi, avec l'audition très attendue et ultra-médiatisée de Dominique Strauss-Kahn, première journée des trois que DSK s'apprête à passer à la barre. 

Accueilli par un happening très remarqué des Femen peu avant l'ouverture du tribunal, l'ancien directeur général du FMI a également dû affronter les témoignages glaçants, parfois crus, d'anciennes prostituées présentes aux soirées auxquelles il avait participé, de 2009 à 2011. Mais à aucun moment celui qui fut le favori pour l'élection présidentielle de 2012 n'a changé sa ligne de défense. Bien au contraire.

DSK, soupçonné de proxénétisme aggravé dans cette affaire hors norme - et qui risque jusqu'à dix ans de prison et une très lourde amende -, a réaffirmé à plusieurs reprises ne jamais avoir eu "connaissance de l'aspect prostitutionnel" des "douze soirées" en question.

Il réfute "une activité frénétique"

"On a l'impression d'une activité frénétique", où les dates se mélangent de manière imprécise, a regretté l'ancien ministre socialiste. "Il n'y a pas eu cette activité débridée. Quatre rencontres par an pendant trois ans", a-t-il comptabilisé.

DSK, présenté un temps durant le procès comme le "roi de la fête", nie toute implication dans l'organisation de ces orgies. "Je ne m'estime en rien organisateur de ces soirées. Je n'avais pas le temps d'organiser une quelconque soirée", a-t-il notamment déclaré.

Quant à la prostitution, Dominique Strauss-Kahn a affirmé que ça n'est pas dans sa "conception des relations sexuelles que de le faire avec des prostituées". Un choix qu'il a justifié aussi bien par goût, souhaitant que ce soit "la fête", que par crainte des "pressions" auxquelles pourraient être soumises des professionnelles.

Une relation sexuelle "brutale mais consentie", avec des "larmes"

Des professionnelles en question, justement, trois se sont de nouveau présentées devant le juge, ce mardi. Or, leurs récits divergent quelque peu avec la vision livrée par Dominique Strauss-Kahn. L'ex-prostituée "Mounia", qui s'est constituée partie civile, a décrit dans un premier temps, ce mardi matin, un véritable calvaire lors de sa relation sexuelle avec DSK, organisée dans un chic hôtel parisien. Une épreuve "brutale mais consentie", durant laquelle "elle a beaucoup pleuré".

"C'est son sourire qui m'a marquée du début à la fin. Il avait l'air content de ce qu'il faisait", a soufflé la jeune femme, devant un prévenu impassible. Toutefois, a-t-elle reconnu, il ne fut jamais question d'argent ou de son statut de prostituée avec l'ancien ministre, mais elle a redit que pour elle, DSK ne pouvait pas ne pas savoir qu'il y avait des professionnelles lors de cette soirée.

Face à ces accusations, DSK s'est remémoré "ne pas avoir senti de dénégation" de la part de Mounia. Quant aux pleurs évoqués, "je n'ai pas remarqué, cela m'aurait glacé", a-t-il assuré.

A la télévision, elle reconnaît DSK: "C'est lui, mais habillé"

Le très attendu témoignage de "Jade" a été entendu mardi en fin d'après-midi. Pleine d'une intelligente impertinence, la jeune femme, principale accusatrice de DSK, a alterné entre traits d'esprit et mots crus pour tenter de contrer la défense de l'ancien directeur général du FMI. Pour elle, à aucun moment la partie fine pour laquelle elle a été rétribuée 500 euros ne pouvait être du "libertinage".

"Je n'étais qu'une chose, qui devait accomplir quelque chose, je n'étais pas là en tant que personne", a témoigné Jade devant Dominique Strauss-Kahn. "Là c'est tout juste si on ne m'a pas mis une main sur la tête pour faire une fellation. Ce n'était pas du libertinage", a-t-elle insisté. L'ancienne prostituée se souvient également "d'un grand lit avec un seul monsieur dessus et beaucoup de femmes autour". "Comme dans l'Antiquité", a-t-elle décrit.

"On m'a dit avant que j'allais voir quelqu'un d'important, qu'il fallait faire preuve de discrétion", a encore expliqué la jeune femme. Savait-elle de qui il s'agissait? "Je ne le connaissais pas. Quand je l'ai rencontré, je ne savais pas qui c'était. Un jour, je l'ai vu à la télévision. Je me suis dit: 'C'est lui mais il est habillé'!"

Jade "mérite notre compassion", rétorque DSK

A ces attaques, Dominique Strauss-Kahn a adopté une démarche pleine de pitié envers la jeune femme. "Elle mérite notre compassion", a-t-il même avancé. "Je suis sûre que Jade dit la vérité", poursuit-il. "On a tous des souvenirs" dans ce dossier, "tout cela est fluctuant", y compris au regard des expériences douloureuses vécues par les anciennes prostituées. "Cette rencontre au Murano, je ne l'ai pas vécue comme ça", a conclu DSK.

Jérémy Maccaud, avec AFP