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Police-Justice

Au deuxième jour du procès Jubillar, les gendarmes livrent leur récit de la nuit de la disparition de Delphine

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Au lendemain de l'ouverture du procès de Cédric Jubillar à Albi, la journée a été marquée par l'audition de l'administratrice des enfants du couple et celle des premières gendarmes intervenues au domicile de Cagnac-les-Mines, dans la nuit du 15 au 16 décembre 2020.

La cour d'assises du Tarn a commencé ce mardi 23 septembre à plonger dans le mystère de la disparition de Delphine Jubillar, en auditionnant les premières gendarmes arrivées à son domicile lors de la nuit du 15 au 16 décembre 2020, des dépositions bousculées par la défense de l'accusé.

Les deux jeunes militaires en poste dans la zone de Cagnac-les-Mines (Tarn) avaient été dépêchées sur place peu avant 5 heures du matin le 16 décembre, à la suite d'un appel de Cédric Jubillar: il s'inquiétait de ne pas trouver son épouse à la maison, après avoir été réveillé par les pleurs de sa fille de 18 mois.

Ce qui était une "disparition inquiétante" est depuis devenu un dossier de "meurtre par conjoint", constatait factuellement l'une des deux gendarmes, au début de sa déposition face à la cour.

Pour Cédric Jubillar, une nuit entre calme et stress

Sur place cette nuit-là, dans ce quartier résidentiel de cette petite ville proche d'Albi, les deux enquêtrices se sont entretenues avec l'accusé qui alternait "les moments de calme et d'autres où il semblait stressé", ont-elles rappelé.

Selon l'une d'entre elles, alors qu'une demande de géolocalisation du portable de la disparue avait été faite au centre opérationnel, Cédric Jubillar a tenté sans relâche de joindre son épouse. "Il va avoir un geste répété, voire frénétique, sur la touche appel de son téléphone", a-t-elle relaté, ajoutant avoir elle aussi essayé de contacter l'infirmière:

"Certains de mes appels sont tombés directement sur le répondeur, tandis que d’autres ont sonné."

Au fil de leurs dépositions, elles sont revenues sur de nombreux éléments du dossier: les propos de Cédric Jubillar rapportant que sa femme promenait parfois leurs chiens de nuit, le fait que l'accusé était en train de préparer une machine à laver quand elles sont arrivées, ou la présence du véhicule de Delphine Jubillar, garé dans le sens de la descente de l'allée légèrement en pente du domicile. Cette dernière précision est importante car il s'agit, selon l'accusation, d'un élément démontrant que le véhicule a été déplacé pendant la nuit.

La défense de Cédric Jubillar à l'offensive

Mais la défense de Cédric Jubillar a choisi de s'attarder sur deux aspects particuliers, à ses yeux passés sous silence par les témoignages des deux agentes: la présence d'un "petit fourgon blanc" à proximité du domicile de la disparue, et un élément du témoignage de sa meilleure amie.

Me Emmanuelle Franck a ainsi rappelé que cette dernière avait dit en audition qu'il arrivait à Delphine "de se balader régulièrement à pied la nuit", un élément contredisant la thèse de l'accusation affirmant que Delphine avait peur du noir et ne sortait jamais seule la nuit.

Pas un mot sur le fourgon non plus, a déploré également Me Franck, ajoutant: "ni vous ni votre collègue, cela ne vous semble intéressant de mentionner ces deux éléments hyper importants devant la cour".

Et l'avocate de lancer: "Etes-vous briefées avant de venir devant nous?", sous-entendant que les gendarmes étaient préparées avant le procès pour déposer dans le sens de l'accusation. Les deux témoins ont évoqué, en réponse, l'existence, au sein de la gendarmerie, de formations générales dispensées pour la préparation d'une intervention aux assises.

Delphine Jubillar, une femme "discrète" et "timide"

Plus tôt dans la journée, la cour avait consacré son audience à la personnalité de la disparue: une infirmière "timide" mais "très investie". Dévouée, bienveillante, "discrète" aussi, telle est apparue Delphine au fil du rapport d'un enquêteur de personnalité, salué par sa famille pour sa justesse.

En fin de matinée, les frères et la soeur de Delphine Jubillar ont d'ailleurs été entendus. Cette dernière a écarté l'hypothèse d'une disparition volontaire. "Elle n’aurait jamais laissé ses enfants. Ce n'était pas son genre", a-t-elle affirmé.

L'autre temps fort de l'audience était l'audition de l'administratrice des enfants du couple, mandatée par la justice pour défendre les intérêts de Louis, 11 ans, et Elyah, 6 ans.

L'aîné, qui avait 6 ans au moment des faits, est un enfant "taiseux", "très, très en colère" contre son père, qu'il juge responsable de la disparition de sa mère, a-t-elle expliqué. "Il est convaincu que c’est son père qui l’a fait".

Et quand elle a abordé le procès avec les enfants, leur demandant ce qu'ils souhaitaient dire à leur père, sa soeur, qui n'avait que 18 mois lors du drame, a spontanément dit qu'elle l'aimait et demandé "de dire si sa maman est vivante ou pas" :

"Elle nous dit qu’elle aimerait avoir une baguette magique, elle fait 'abracadabra' pour que sa maman revienne pour ne pas l’oublier."

"Il va falloir qu'ils essaient d'avancer avec ce traumatisme et la première personne qui peut les amener à bien évoluer, c'est vous, M. Jubillar, en répondant à leurs questions", a-t-elle exhorté, en se tournant vers l'accusé qui, depuis son box, a opiné de la tête, en signe d'approbation.

Vincent Gautier avec Maxime Cliet Ruzza, Mélanie Bertrand et AFP