Attentat de Nice: les pompiers ont assisté à "une véritable boucherie"

On vivra avec ça pour toujours, chaque 14-Juillet." Comme Amelie Graa, jeune pompier volontaire de 21 ans, le lieutenant Pierre Binaud et Albert Tortiello, également volontaire, restent choqués par ce qu'ils ont vu le soir de l'attentat à Nice. Tous trois étaient présents au palais de la Méditerranée transformé en hôpital de fortune quelques minutes après que le camion a foncé dans la foule, tuant sur son passage 84 personnes.
Albert Tortiello, pompier volontaire depuis 16 ans, a assisté "au camion qui fauchait tout le monde, les gens qui volaient... l'apocalypse", confie-t-il au Parisien. Amel Graa, étudiante en marketing professionnel, parle de "véritable boucherie". Le choc est pourtant vite effacé par la nécessité d'agir: "Il y avait cette femme qui se jetait sur moi, hurlant le nom de ses enfants." Obligés de garder leur sang-froid, les pompiers ont dû prendre en charge de nombreux blessés.
"Je lui ai dit qu'il est parti"
Le lieutenant Pierre Binaud était mobilisé ce soir-là pour l'Union départementale des sapeurs-pompiers, dont il est le président. Il assiste depuis le PC de sécurité à cette scène de panique quand le camion a pénétré sur la promenade des Anglais. Rapidement, il tente de venir au secours des blessés. Impossible: la zone est alors bloquée par la police, qui craint que le camion ne soit piégé. Il décide lui aussi de rejoindre le palais de la Méditerranée.
Des dizaines de corps sont amenés à dos d'homme ou sur des barrières. Les trois pompiers font face à des gens en sang, d'autres qui vomissent. Dans un premier temps, les secouristes tentent de cacher les cadavres pour éviter que les survivants ne les voient. Essayant de "ne pas piétiner ce vrac de gens", ils apportent les premiers soins.
"Un papa m'a mis son enfant de deux ans dans les bras. Je lui ai dit qu'il est parti. Il ne faut pas mentir dans ces moments-là", confie le lieutenant Pierre Binaud au quotidien.
Le pompier a pourtant 35 ans de carrière. Malgré ses nombreuses interventions, il reste troublé par ces "corps enchevêtrés, malaxés par le camion". Le plus dur, explique-t-il, ce sont ces sonneries de téléphone qui ont retenti au milieu de l'hôpital de campagne, ces lumières qui s'allumaient dans les poches des victimes. J'aurais tellement voulu que, comme dans un film, on dise 'Coupez' et que tout le monde se relève...", conclut-il.