Appels à la démission, soins: ce que l'on sait après le flagrant délit d'achat de drogue du député Andy Kerbrat

Le député insoumis Andy Kerbrat raconte ce mardi 22 octobre sur X avoir été contrôlé jeudi dernier "en possession de stupéfiants". "J'assume entièrement ma responsabilité et me mets à la disposition de la justice", écrit-il dans un communiqué.
L'élu de la 2e circonscription de Loire-Atlantique est poursuivi pour usage de stupéfiants et convoqué pour notification d'une ordonnance pénale. Cette information a fait beaucoup réagir la classe politique française. Plusieurs personnalités appellent à sa démission tandis que le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau l'appelle à "tirer les conséquences de ses actes".
• 1,35g de 3-MMC
Andy Kerbrat n'a pas été mis en garde en vue, mais entendu le lendemain, le 18 octobre, au commissariat en audition libre. Il dit se mettre "à disposition de la justice" qui va le convoquer "dans le cadre d'une ordonnance pénale".
Selon le parquet de Paris, sollicité, "les policiers ont constaté un échange entre deux individus faisant penser à une transaction de stupéfiants".
Lors du contrôle, les policiers ont trouvé 1,35g de 3-MMC, une drogue de synthèse, sur Andy Kerbrat, tandis que le vendeur, un adolescent, avait 1g de 3-MMC et 200 euros, selon la même source.
Le vendeur, mineur, a été placé en détention provisoire dans l'attente d'une audience unique au tribunal pour enfants (TPE). Selon le parquet, il est "déjà connu pour une dizaine de faits et condamné début octobre pour des faits de trafic de stupéfiants à une peine de quatre mois avec sursis probatoire, sous le coup duquel il se trouvait donc" lors du contrôle.
• Une drogue de synthèse en plein essor
La 3-MMC, 3-methylmethcathinone, est en plein essor en France, notamment dans les milieux festifs, prise comme une cocaïne à moitié prix. Selon l'Observatoire français des drogues et des tendances addictives, cette molécule se présente principalement sous forme de poudre dont les propriétés sont similaires aux amphétamines.
Les effets recherchés sont généralement l’euphorie, la stimulation et la libido. "On observe des effets indésirables au niveau du cerveau avec des états psychotiques comme la paranoïa et les hallucinations, de l’anxiété ou des insomnies importantes, de la pression artérielle ou de la fréquence cardiaque mais aussi au niveau du cerveau avec des états psychotiques comme la paranoïa et les hallucinations, de l’anxiété ou des insomnies importantes", met en garde l'organisation.
La 3-MMC est classée comme stupéfiant en France et "de par sa diffusion croissante en Europe, a été placée sous surveillance intensive" par l'Observatoire européen des drogues et des toxicomanies dans le cadre de l’Early Warning System, son outil d’alerte et de surveillance des NPS, indique encore l'Observatoire français.
• Andy Kerbrat va "entamer un protocole de soins"
Dans un communiqué de presse, Andy Kerbrat annonce avoir "entamé un protocole de soins" afin de pouvoir reprendre son activité parlementaire.
"Face à des problèmes personnels et des fragilités psychologiques, j'ai pu consommer des drogues de synthèse et suis pleinement conscient de leurs effets sur la santé et notamment sur la mienne", avance le député.
"Au-delà de ma personne, l'addiction est un problème de santé publique et droit être traitée comme tel", ajoute-t-il.
L'élu de Loire-Atlantique dit porter "ce combat depuis longtemps auprès d'autres victimes de l'addiction" et vouloir continuer de le mener.
"Je présente mes excuses à mes électrices et électeurs avant tout ainsi qu'à mon groupe parlementaire, à mon équipe, et à tous les militants insoumis et du Nouveau Front populaire", écrit-il, indiquant que "dans l'intervalle, mon équipe de collaborateurs est à la disposition des habitants de ma circonscription".
• Appels à la démission
"Un député a un devoir d'exemplarité": Bruno Retailleau a appelé le député LFI à "tirer les conséquences de ses actes". "Alors que le narcobanditisme s’installe en France avec son cortège de violences, il n'est pas tolérable de voir un député de la République acheter des drogues de synthèse à un dealer de rue", tance le ministre de l'Intérieur qui a déclaré ces dernières semaines vouloir "faire la guerre" au "narcoterrorisme".
"Consommer de la drogue, ce n'est pas seulement détruire sa santé, c'est également nourrir des réseaux criminels", dénonce de son côté la secrétaire d'État Laurence Garnier.
"Par respect pour les Nantais qui lui ont accordé leur confiance et consacrer toute son énergie à sa nécessaire guérison, il doit se démettre de son mandat", avance encore l'ancienne sénatrice proche de Bruno Retailleau, et ex-voisine de circonscription d'Andy Kerbrat.
"Quand on a été arrêté par la police en train d'acheter de la drogue, on n'a plus sa place à l'Assemblée nationale. Tout le monde lui trouve des excuses. Si j'étais lui, j'assumerais", réagit de son côté Pieyre-Alexandre Anglade, député macroniste.
Quant au député du Rassemblement national, Laurent Jacobelli, il ironise, demandant pourquoi le député "ne s'est-il pas fourni chez son collègue Louis Boyard", faisant référence au fait que ce dernier avait reconnu en 2021 avoir vendu du cannabis lorsqu'il était plus jeune pour financer ses études.
• "L'addiction est un problème de santé"
Plusieurs personnalités de gauche, comme Sandrine Rousseau, ont, à l'inverse, apporté leur soutien au parlementaire âgé de 34 ans.
"La consommation de drogue et l’addiction sont un enjeu de soin, de santé psychique et d’accompagnement. Tu as reconnu, tu es dans un parcours de soin. Reviens-nous en forme", a écrit la députée de Paris, qui ajoute au micro de BFMTV qu'Andy Kerbrat "est très affecté" et qu'il "vient de rentrer dans un parcours de soin".
Même son de cloche du côté de la présidente des députés insoumis: "L'addiction est un problème de santé", a confié Mathilde Panot, qui espère qu'Andy Kerbrat puisse vite reprendre son activité parlementaire.
La sénatrice écologiste Mélanie Vogel souhaite "bon courage dans le chemin de soin" emprunté par Andy Kerbrat, et regrette que la politique française soit "focalisée sur la répression plutôt que sur l'essentiel: le soin".
Du côté du groupe Ensemble pour la République, le député Denis Masséglia estime qu'"une personne qui souffre d’addiction n’a pas à être traitée comme un criminel et humiliée devant tous" et que "la pénalisation des consommateurs de drogues est une impasse".
Thomas Ménagé, député RN du Loiret, affirme que son parti "n'attaque pas personnellement les personnes, notamment dans cette situation" mais dit déplorer que les élus de gauche aient "tendance à attaquer sur des faits personnels leurs opposants politiques". "Les donneurs de leçons sont pris à leur propre jeu", dit-il à notre micro.