Affaire Griveaux: Piotr Pavlenski peut-il perdre son statut de réfugié politique?

Piotr Pavlenski pourrait-il perdre son statut de réfugié politique? C'est en tout cas ce que réclament certaines personnalités politiques après que l'activiste russe a reconnu avoir diffusé les vidéos intimes de Benjamin Griveaux. "Qu’on foute ce mec dehors, il est réfugié politique, il est venu demander l’asile, mais il se comporte comme un salopard", s'emportait vendredi Bruno Questel, député LaREM de l'Eure, invité sur le plateau de La Chaîne Parlementaire.
Piotr Pavlenski a fui la Russie en janvier 2017 avec sa femme et ses enfants. Dans son pays, il est connu pour son opposition affichée au pouvoir. Il s'est fait connaître en 2012 après s'être cousu la bouche en soutien aux Pussy Riot, groupe féministe contestataire. L'année d'après, il se cloue la peau des testicules sur les pavés de la place Rouge, à Moscou, pour protester contre "l'Etat policier". En 2014, l'artiste, nu, se coupe le lobe de l'oreille alors qu'il est assis sur le toit d'un hôpital psychiatrique. Il quittera son pays visé par des accusations d'agression sexuelle, qu'il nie.
Opposant notoire
En France, Piotr Pavlenski est également dans le viseur de la justice. En janvier 2019, il est condamné à trois ans de prison, dont deux avec sursis, pour avoir incendié la façade d'une succursale de la Banque de France à Paris en octobre 2017. Une action pour dénoncer les banquiers qui, selon lui, "ont pris la place des monarques, commises cinq mois après qu'il a obtenu son droit d'asile. Depuis le 2 janvier, il était recherché par la police pour des violences commises le soir du Nouvel an avant d'être interpellé samedi puis placé en garde à vue d'abord pour cette affaire puis pour la diffusion des vidéos intimes de Benjamin Griveaux.
Si désormais Piotr Pavlenski pourrait être placé à nouveau en détention provisoire, comme l'a requis le parquet de Paris après avoir ouvert deux informations judiciaires le visant, le retrait ou la cessation de son droit d'asile par l'OFPRA, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, paraît peu probable aux yeux des spécialistes du droit. Ce statut de réfugié est obtenu quand l'intégrité d'une personne est menacée dans son pays en raison de sa race, de sa religion, de son orientation sexuelle ou de ses opinions politiques.
Le retrait, une disposition rétroactive, est prévu par le CESEDA, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, si le statut a été obtenu par fraude. "Or, dans le cas de Piotr Pavlenski, on sait que c'est un opposant notoire à Vladimir Poutine", note une avocate spécialisée en droit d'asile.
Un comportement qui représente une "menace"
La cessation du droit d'asile, droit constitutionnel, peut être décidée si le bénéficiaire de ce statut agit de manière contraire aux dispositions de la Convention de Genève datant de 1951 ou de l'ONU, c'est-à-dire "si leur comportement personnel représente une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société", précise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
On parle alors de crimes contre l'humanité, de crimes de guerre, contre la paix ou d'acte de terrorisme. Le statut de réfugié peut être également retiré pour des bénéficiaires qui se rendraient coupable de multiples délits.
"On peut retirer le statut pour cinq cas dont la condamnation pénale, précise Me Myriam Thomas, avocate spécialisée en droit d'asile. Il ne suffit pas d'une condamnation pénale lambda, il faudrait une condamnation pour crime ou délit mais un délit passible d'une peine de 10 ans d'emprisonnement."
Ce mardi, le parquet de Paris a ouvert deux informations judiciaires. Piotr Pavlenski et sa compagne Alexandra de Taddeo doivent être mis en examen dans l'enquête sur la diffusion des vidéos intimes de l'ancien candidat LaREM à la mairie de Paris. Le parquet a requis leur placement sous contrôle judiciaire. Mais l'activiste russe pourrait retourner en prison cette fois-ci dans le cadre de l'information judiciaire ouverte pour les violences commises le soir du 31 décembre. Le parquet a requis le placement en détention provisoire.