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Police-Justice

Affaire Benalla: Mediapart avait-il le droit de s'opposer à la perquisition?

Le logo de Mediapart - Image d'illustration

Le logo de Mediapart - Image d'illustration - AFP

Le site d'information Mediapart, qui a publié un enregistrement d'une conversation entre Alexandre Benalla et Vincent Crase, a refusé une perquisition dans ses locaux ce lundi matin. Une possibilité qui est permise aux médias dans le cadre d'une enquête judiciaire.

Il y a moins d'une semaine, Mediapart a frappé un grand coup en révélant l'enregistrement d'une conversation entre Alexandre Benalla et Vincent Crase datant, selon le site, du 26 juillet 2018, en violation de leur contrôle judiciaire. Ce lundi, des enquêteurs et deux représentants du parquet de Paris se sont présentés dans les locaux du média pour procéder à une perquisition afin d'obtenir les bandes diffusées sur le site. Mediapart s'est opposé à cette procédure judiciaire.

Outre le fracas provoqué par la diffusion des enregistrements dans lesquels Alexandre Benalla se vante du soutien que lui accordait à l'époque le président de la République, Mediapart avait-il le droit de s'opposer à cette perquisition? Juridiquement, oui.

Ordonnance d'un juge

Cette perquisition a été organisée dans le cadre d'une enquête préliminaire ouverte par le parquet de Paris pour "atteinte à l'intimité de la vie privée" et sur les conditions d'enregistrement de la conversation entre les deux hommes. Les investigations, lancées à la suite de la réception d'"éléments" par le parquet, vise également la "détention illicite d'appareils ou de dispositifs techniques de nature à permettre la réalisation d'interception de télécommunications ou de conversations". Elle était donc menée par des magistrats, "deux procureurs" selon Edwy Plenel, le patron de Mediapart.

Si par principe, il est interdit de s'opposer à une perquisition, il existe des exceptions pour certains lieux, dont les organes de presse font partie. Dans le cadre d'une enquête préliminaire, donc menée par le parquet, seule une ordonnance rendue par un juge des libertés et de la détention peut contraindre la personne visée par une perquisition à laisser pénétrer des enquêteurs.

"S'il n'y a pas d'autorisation d'un juge des libertés et de la détention, la personne visée par la perquisition doit consentir autrement dit elle peut refuser", note Jacky Coulon, du Syndicat de la Magistrature.

Protection des sources

La suite est totalement différente lorsque cette perquisition est menée dans le cadre d'une information judiciaire, c'est-à-dire par un juge d'instruction, statutairement indépendant.

"Les perquisitions dans les locaux d'une entreprise de presse, d'une entreprise de communication audiovisuelle, d'une entreprise de communication au public en ligne, d'une agence de presse, dans les véhicules professionnels de ces entreprises ou agences ou au domicile d'un journaliste lorsque les investigations sont liées à son activité professionnelle ne peuvent être effectuées que par un magistrat", précise d'ailleurs l'article 56-2 du Code de procédure pénale.

Par ailleurs, Mediapart a dénoncé cette procédure judiciaire estimant qu'"il y a des diligences pour trouver nos sources". "C'est une situation particulièrement inquiétante", a dénoncé auprès de l'AFP Fabrice Arfi, co-responsable des enquêtes du journal en ligne. Si les enquêteurs venaient à obtenir l'autorisation d'un juge des libertés et de la détention pour aller perquisitionner les locaux du média, ses représentants pourraient en effet s'opposer à donner l'origine des documents visés par l'enquête. Et ce même dans le cadre d'une information judiciaire.

Justine Chevalier