Merci Patron!: une farce sociale qui se paie Bernard Arnault

Le journaliste François Ruffin sigae avec "Merci patron" son premier film. - BFMTV
De Bernard Arnault, on sait avant tout qu'il est l'indéboulonnable première fortune de France à la tête du groupe de luxe LVMH. Mais on oublie souvent qu'il a fondé sa fortune sur la faillite d'Isoroy et que même dans le secteur du luxe, les délocalisations vont bon train.
François Ruffin a grandi dans le Nord et connaît bien cette réalité. C'est la raison d'être de sa comédie documentaire, mais au lieu de vouloir faire pleurer dans les chaumières, le journaliste veut faire rire pour sensibiliser. Son style fait penser à Michael Moore, Pierre Carles et The Yes Men tout en ayant du Molière.
Le réalisateur suit les déboires de Serge et Jocelyne Klur, anciens ouvriers du textile, qui travaillaient pour Givenchy et Kenzo. Au chômage depuis quatre ans et croulant sous les dettes, les époux sont coincés dans cette situation depuis la délocalisation de leur usine ECCE, sous-traitante du groupe LVMH.
D'abord réimplantée en Pologne, elle est ensuite délocalisée en Bulgarie, et pourrait maintenant partir en Grèce.
"C'est un film engagé contres ces décideurs qui peuvent briser des vies comme un géant marche et écrase des fourmis sans même s'en rendre compte", explique François Ruffin.
"C'est Bernard Arnault qui a écrit le scénario"
Mais là où le film se transforme en farce, c'est que dans ce documentaire aux accents irréels mais pourtant bien vrai, Jocelyne et Serge Klur vont, avec l’aide du réalisateur, envoyer une lettre à leur ancien employeur menaçant de tout raconter à la presse. Une farce grossière à laquelle mord pourtant l'appât. En temps ordinaire, une telle doléance serait sans doute restée lettre morte. Mais à cette époque, l’image de Bernard Arnault est ternie par la divulgation de sa demande de nationalité belge. Un émissaire secret est alors missionné par LVMH, pour aller à la rencontre des Klur et acheter leur silence. Une transaction financière qui doit se faire "sans publicité" pour convenir à LVMH. Malheureusement, tout cet arrangement est filmé par la caméra de François Ruffin.
"C'est Bernard Arnault qui a écrit le scénario, j'espère qu'il ne va pas me réclamer des droits d'auteur", s'amuse François Ruffin.
Les pressions pour décommander François Ruffin de l'émission de Frédéric Taddéi sur Europe 1 ont aidé à sa notoriété. L'auteur du pamphlet Les petits soldats du journalisme, collaborateur du Monde diplomatique, longtemps reporter pour l'émission Là-bas si j'y suis de Daniel Mermet et rédacteur en chef de Fakir, n'en attendait pas tant.