"Je sors de ma zone de confort": Redouane Bougheraba à l'assaut des cinémas avec "Délocalisés"

Des salles de stand-up aux salles de cinéma. Redouane Bougheraba débarque sur grand écran. Le comique à l'humour acéré, connu pour ses saillies improvisées, est à l'affiche ce mercredi 12 mars de son premier film en tant que réalisateur, Délocalisés, qu'il a co-signé avec son frère Ali Bougheraba (Les Segpa).
Redouane Bougheraba incarne Redouane, un ouvrier français qui accepte de suivre la délocalisation de son usine de matelas en Inde pour conserver sa promotion. Sur place, où il s'est installé avec son épouse (Vanessa Guide), il découvre que la promesse de voir son salaire doublé ne l'est en fait qu'en roupies, la monnaie locale.
Furieux, il décide de se venger et enseigne aux employés indiens les techniques françaises de grève et de manifestation pour renverser leur patron. Une révolution inattendue qui pourrait changer le destin de l'usine et le sien.
Pour Redouane Bougheraba il s'agit là d'un rôle de composition, bien loin de ce qu'il fait sur scène.
"C'est un autre exercice, beaucoup plus difficile. Même si c'est un rôle inspiré de Redouane Bougheraba, je ne joue pas Redouane Bougheraba à l'écran. Il y a moins d'exagération, moins de surjeu. Ali m'a poussé pour que je sorte de ma zone de confort", précise Redouane Bougheraba auprès de BFMTV.com.
"Une facette différente"
Pour son premier film, Redouane Bougheraba aurait pu se contenter de transposer ce qu'il fait sur scène. "Ça aurait pu être possible, mais ça aurait été tomber dans la facilité", précise celui qui incarne à l'écran un mari aimant. "Je voulais montrer une facette différente de moi car il n'y a pas que des insultes dans mon spectacle!"
On retrouve malgré tout dans Délocalisés une poignée de "fils de pute", une de ses insultes favorites sur scène. "Il y en a quelques-uns qui sont justifiés et ils sont utilisés dans un autre registre", insiste Ali Bougheraba. Tout au long du film, Redouane se fait ainsi appeler "Monsieur Fils de Pute" par l'hôtel où il loge à Calcutta.

"C'est une histoire vraie qui nous est arrivée à New York", révèle Ali Bougheraba. "On était dans un Foot Locker pour acheter des baskets. Redouane avait interpellé le vendeur en lui disant: 'C'est mon frère, il s'appelle Monsieur Fils de Pute! Appelez-le comme ça, il va être content.' Le mec m'a appelé comme ça. On l'a ajouté au scénario."
Comme Louis de Funès
Avec Délocalisés, les frères Bougheraba ont souhaité explorer "le comique de situation, le burlesque, la caricature", énumère Ali Bougheraba, qui signe son troisième film après le succès des deux volets des Segpa (deux millions d'entrées cumulées). Leur objectif: réaliser une comédie pour tous les publics.
"C'était notre ligne de conduite avec ce film: réaliser une comédie populaire comme celles de notre enfance avec Louis de Funès, qui ont fait le ciment de la société française. Tout le monde pouvait se retrouver dans ses films peu importe ses origines, sa confession ou son statut social", analyse encore Ali Bougheraba.
"Les enfants ne peuvent pas venir voir mon spectacle", déplore de son côté Redouane Bougheraba. "Il y a trop des blagues sous la ceinture. Les personnes âgées, quand elles viennent, elles risquent de perdre leur pacemaker. Mais le cinéma, c'est tout public. Dans les salles, on a vu des jeunes et leurs parents hilares."
"Montrer une autre culture"
Contrairement à son spectacle, où il laisse toujours une part d'improvisation, Redouane Bougheraba a "très peu" improvisé sur le plateau. "90% du film était écrit, préparé et répété." En Inde, son personnage travaille dans son usine avec des hommes ressemblant à... Nicolas Sarkozy, Cyril Hanouna ou Jul. Là aussi, tout était écrit.
"On a fait ça depuis la France, en envoyant des photos et des morceaux d'émissions. Puis je suis allé en Inde. J'en ai vu du monde pour trouver le sosie indien de Cyril Hanouna!", s'amuse Ali Bougheraba. "On a trouvé des acteurs hyper forts! Limite, ils me donnaient des conseils sur le plateau", ajoute Redouane Bougheraba.
Si Délocalisés a pu voir le jour grâce au soutien de son frère Ali ("c'est le mec le plus doué que je connaisse"), mais aussi des scénaristes Germain Blot et Cédric Dosne, qui ont contacté Redouane à la sortie d'un spectacle. "Ils ont cru en moi avant tout le monde. Ils sont arrivés à une période de ma vie où ça n'avait pas encore explosé."

Ils ont écrit ensemble Délocalisés. "Le père de Germain travaillait dans une usine de matelas dans le nord de la France qui a été délocalisée. On aurait pu délocaliser au Maroc, en Pologne, au Tibet mais on a choisi l'Inde parce qu'on s'est dit qu'on allait dépayser les gens, leur montrer une autre culture", s'exclame Redouane.
Et Ali d'ajouter: "On a choisi la ville de Calcutta pour ses qualités cinématographiques: les taxis jaunes, la végétation luxuriante... On avait tous les ingrédients pour faire une belle comédie. On aime réaliser des comédies qui soient belles, avec de beaux costumes, de beaux décors."
Bientôt son "Tchao Pantin"?
Fiers du film, les frères Bougheraba vont l'accompagner dans les prochaines semaines dans les salles. "On va faire vivre ce film. Je pense qu'il a un bel avenir au cinéma", assure Redouane, qui sera bientôt de retour sur scène avec un nouveau spectacle. "A la fin de l'année, je repars sur les routes, je vais le roder."
Ils réfléchissent aussi à "quelques sujets" de films. "On est en train de se pencher dessus. On va vite revenir", promettent-ils. En attendant, Redouane Bougheraba sera à l'affiche le 18 juin de Sur la route de papa réalisé par Nabil AitakkaouaIi et Olivier Dacourt. "Je suis très sérieux dedans", prévient Redouane. "C'est un film où vous ne m'avez jamais vu comme ça."
Ce rôle sera-t-il son Tchao Pantin à lui? Le film de Claude Berri qui a révélé au public le côté sombre de Coluche et lui a valu un César du meilleur acteur, est devenu emblématique du clown à contre-emploi. "C'est trop tôt pour le dire!", indique Redouane Bougheraba. "Tchao pantin, ça voudrait dire que c'est un chef d'œuvre! Ça peut être juste 'tchao' tout court!"