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Duel El Aaraje-Simonnet: comment l'accord de la gauche s'est fracturé dans la 15e circonscription de Paris

Lamia El Aaraje (PS) et Danielle Simonnet (LFI).

Lamia El Aaraje (PS) et Danielle Simonnet (LFI). - AFP

Bien que non investie, la candidate socialiste sortante s'estime "légitime" et a décidé de présenter sa candidature. Elle risque l'exclusion.

Personne n'y aurait cru il y a encore quelques semaines. Après moult rebondissements, le Parti socialiste (PS) et La France Insoumise ont topé le 4 mai, scellant avec les écologistes et les communistes un grand rassemblement des forces de gauche derrière une même bannière pour les élections législatives: la Nouvelle union populaire écologique et sociale.

L'Europe a longtemps été l'un des points d'achoppement des pourparlers et un frein à l'obtention d'un compromis. La répartition des circonscriptions en a été un autre. Et la signature de l'accord, entériné par un vote du Conseil national du PS, n'a pas totalement tu les débats autour de la 15e circonscription de Paris.

Car les socialistes militaient pour la candidature de Lamia El Aaraje. La candidate sortante administre plusieurs quartiers du 20e arrondissement depuis la législative partielle de 2021. Un scrutin finalement annulé en janvier dernier en raison de la participation frauduleuse d'un faux candidat La République en Marche. Les Insoumis ont balayé cette possibilité et investi Danielle Simonnet... laquelle avait été défaite dans les urnes par la socialiste lors du dernier scrutin.

Pierre Jouvet a tenté de convaincre Jean-Luc Mélenchon

Preuve que le débat n'est pas enterré, le 5 mai, le Conseil national du PS donne certes son aval à un mariage électoral avec LFI, mais les militants se prononcent également à plus de 90% en faveur d'une révision de l'accord sur la candidature à présenter dans la 15e circonscription de Paris.

C'est pour renégocier ce point que Pierre Jouvet se rend au QG des Insoumis au lendemain du vote du Conseil national du PS, a indiqué Lamia El Aaraje à BFMTV, une information confirmée par l'intéressé lui-même. Son rendez-vous avec Jean-Luc Mélenchon se révèle finalement infructueux.

Mais qu'importe. S'estimant "légitime" et déterminée à soumettre son nom aux urnes, Lamia El Aaraje publie mercredi un tweet officialisant sa candidature, accompagné d'une photo de son affiche de campagne la dépeignant tout sourire. Le poing et la rose du PS sont bien présents dans un coin.

"Je ne suis pas une candidate dissidente"

La jeune socialiste se défend de contrevenir aux intérêts de la Nupes. "Je ne suis pas une candidate dissidente, je suis socialiste, clame-t-elle. La seule condition préalable à l’accord, c’était que tous les sortants puissent se représenter. Ça a fonctionné sur toutes les circonscriptions sauf la mienne."

Dans son combat, Lamia El Aaraje a récemment reçu l'appui de différentes grands noms du PS. En premier lieu: Lionel Jospin. L'ancien Premier ministre l'a accompagnée lors d'un déplacement sur un marché dimanche. Il devrait prochainement participer à un nouvel événement de campagne à ses côtés, a appris BFMTV auprès de l'équipe de la candidate.

Bernard Cazeneuve, aussi, entend grossir les rangs des soutiens de Lamia El Aaraje,. Et ce même si l'éléphant socialiste a rendu sa carte du parti, un marqueur de son aversion pour l'accord noué avec LFI.

Même son de cloche du côté d'Anne Hidalgo. La maire de Paris lui a témoigné son soutien, illustré dans un tweet publié mercredi. Selon nos informations, les deux femmes sont en "lien étroit" et échangent au téléphone. "Elle est bienveillante", vante Lamia El Aaraje. Elle sait ce que c'est de mener une campagne dure."

Un risque d'exclusion?

Pour autant, en maintenant sa candidature, Lamia El Aaraje s'expose à des sanctions pour non-respect du compromis électoral.

"Les statuts du Parti socialiste sont très clairs. S'il y a des candidats en dissidence, ils seront exclus du Parti socialiste", explicitait la semaine dernière Pierre Jouvet.

Olivier Faure, Premier secrétaire du PS et aux avant-postes des négociations avec LFI se retrouve dans une situation inconfortable. S'il déplore "une forme d'injustice" et dit se battre pour que Lamia El Aaraje puisse être candidate, il a aussi mis en garde les dissidents, "parce qu'ils seront balayés par ces candidatures qui vont incarner une espérance aux yeux de tout le monde".

Les électeurs "au taquet"

Pour l'heure, la situation ne semble pas entamer la confiance de Danielle Simonnet, la candidate officielle. L'Insoumise vise même une victoire au premier tour des législatives dans la 15e circonscription de Paris, un territoire dont les électeurs ont largement plébiscité Jean-Luc Mélenchon (45,7%).

"Ils sont au taquet", confie Danielle Simonnet à BFMTV au sujet des électeurs mélenchonistes.

L'intéressée bâtit également sa confiance sur son ancrage territorial. "Ça fait 30 ans que je milite sur cet arrondissement, frétille-t-elle. J’ai la réputation d’être la nana qui est sur le terrain et qui bosse ses dossiers."

Interrogée par BFM Paris Île-de-France, elle invite néanmoins Lamia El Aaraje à "retirer sa candidature" et à "comprendre la mesure de l'enjeu historique" de ces législatives. Au risque, sinon, de faire "le jeu des macronistes".

Marie Gentric avec Florian Bouhot