Turquie: Erdogan dans la course à la présidentielle

Recep Tayyip Erdogan annonce sa candidature à l'élection présidentielle, le 1er juillet 2014, à Ankara. - -
Recep Tayyip Erdogan pourrait devenir le dirigeant ayant gouverné le plus longtemps la Turquie depuis Atatürk. Le Premier ministre islamo-conservateur turc, à la tête du pays depuis onze ans, est officiellement entré, ce mardi, dans la course à l'élection présidentielle d'août, disputée pour la première fois au suffrage universel direct. Et devrait, sauf surprise de dernière minute, remporter le scrutin.
Une candidature sans suspense
"Notre candidat à l'élection présidentielle est notre président général et député d'Istanbul, Recep Tayyip Erdogan", a déclaré, sans suspense, Mehmet Ali Sahin, vice-président du Parti gouvernemental de la justice et du développement (AKP) lors d'une réunion de masse des cadres du parti, à Ankara.
A 60 ans, l'homme fort de la Turquie devrait, sauf surprise, être élu pour cinq ans au sommet de l'Etat et devenir ainsi le dirigeant qui a régné le plus longtemps sur le pays depuis le fondateur de la République turque, Mustafa Kemal Atatürk. Après des mois d'un vrai-faux suspense, l'entrée en lice de Recep Tayyip Erdogan ne faisait plus guère de doutes. Contraint par une règle interne de l'AKP de quitter la tête du gouvernement à l'issue des législatives de 2015, l'homme politique le plus populaire du pays a fait savoir depuis des mois qu'il n'entendait pas mettre un terme à sa carrière.
Donné gagnant par tous les sondages
Depuis la fronde de juin 2013, de nombreux Turcs lui reprochent sa dérive "autoritaire" et "islamiste" et dénoncent la corruption de son régime. La violente répression des manifestations qui le défient dans la rue et ses dernières lois renforçant le contrôle d'Internet lui ont également valu les critiques de ses alliés européens.
Tous les sondages le donnent toutefois vainqueur du scrutin présidentiel, vraisemblablement dès le premier tour. Son principal adversaire, Ekmeleddin Ihsanoglu, un intellectuel de l'islam de 70 ans, inconnu du grand public, ne semble pas en mesure de lui contester sa victoire. Les chances de Selahattin Demirtas, député et candidat désigné lundi du principal parti pro-kurde HDP, sont tout aussi maigres.
Vers un "régime d'un seul homme"?
Telles que définies par la Constitution de 1982, les fonctions du probable futur président Erdogan sont honorifiques. Mais le Premier ministre a déjà fait savoir qu'il utiliserait tous les pouvoirs à sa disposition et, surtout, qu'il comptait bien profiter de l'onction du suffrage universel pour continuer à diriger la Turquie. "Le prochain président ne sera pas un président protocolaire, mais un président qui sue, qui court et qui travaille dur", a-t-il d'ores et déjà prévenu.
La presse libérale dénonce par avance un chef de l'Etat qui sera, à ses yeux, forcément autoritaire. "La Turquie se laisse entraîner à grands pas vers un régime d'un seul homme", a affirmé mardi Mehmet Yilmaz dans sa colonne du quotidien Hürriyet.