BFMTV
Syrie

Youcef Seddik, un journaliste syrien prêt à tout pour informer l'Occident

Youcef Seddik a créé une agence de presse à Alep.

Youcef Seddik a créé une agence de presse à Alep. - BFMTV

Cinq ans après le début de la guerre en Syrie, le pays est exsangue et difficilement accessible aux Occidentaux. Sur place, des journalistes syriens tiennent à montrer ce qui s'y déroule exactement.

Youcef Seddik vient d’Alep, la deuxième ville de Syrie. Il vit dans la partie tenue par l’opposition, dans des quartiers dévastés où seulement 10% des habitants sont restés. C’est pour décrire leur quotidien qu’il est devenu journaliste.

En mars 2011, au début du soulèvement contre le régime de Bachar el-Assad, il étudiait la littérature à l’Université de Damas. Il a rapidement été poursuivi par les forces de sécurité pour sa participation à des manifestations pacifiques. Il quitte alors la capitale pour retourner à Alep où il continue d’organiser des manifestations. Quelques mois plus tard, une grande partie du nord de la Syrie et de la ville d’Alep sont libérées des forces du régime.

Cet événement suscite l’arrivée de nombreux journalistes étrangers qui ont besoin de guides, de traducteurs, de fixeurs, de chauffeurs, de protection. Il crée alors, avec d’autres journalistes syriens, l'Aleppo Media Centre (AMC), un centre de ressources pour les journalistes étrangers et les reporters-citoyens syriens qui veulent se former aux métiers du journalisme. Il en occupe le poste de directeur depuis 2013.

Mais avec l’expansion des groupes jihadistes et la multiplication des frappes aériennes par la coalition internationale, les journalistes étrangers se font de plus en plus rares sur le terrain et le travail des Syriens est d'autant plus important pour porter leur voix.

35 personnes travaillent au péril de leur vie

L’AMC fournit ses informations à différentes agences de presse internationales comme l'AFP et Reuters. Y travaillent 35 personnes: des reporters citoyens qui filment cette vie sous les bombes au péril de leur vie. De nombreux opposants et journalistes syriens ont été arrêtés, et ont même disparu dans les geôles du régime. Des risques qui s'ajoutent aux bombardements et que Youcef Seddik et ses équipes connaissent par cœur.

"Pour moi, la situation la plus difficile, et elle se répète souvent, c’est après un bombardement qui a fait des victimes. Lorsque j’arrive sur place, je me demande toujours quelle attitude adopter. Est-ce que je reste ici uniquement pour couvrir cette information ou je dois laisser tomber et aller aider les secouristes?", questionne Youcef Seddik.

"C’est une révolution pour la liberté"

Youcef Seddik est venu quelques jours en France, dans le cadre d'un projet mené par le "Collectif des Amis d'Alep", pour revenir sur les origines de ce conflit et rappeler qu’en 2011, tout avait commencé par de simples manifestations.

"Ce qui blesse les Syriens, c’est que malgré tous les morts et les martyrs que nous avons connus, le monde n’a toujours pas compris que c’est une révolution pour la liberté et le droit. La communauté internationale continue à considérer que le criminel qui est toujours en place, Bachar el-Assad, est peut-être innocent", déplore le jeune homme de 34 ans.

Dans quelques jours, Youcef va retourner à Alep pour continuer à témoigner de cette guerre qui se déroule à huis clos. A Paris, il a été touché par les hommages aux victimes des attentats toujours présents place de la République: "J'aurais aimé qu’en Syrie on puisse avoir un endroit comme celui-ci, un lieu où on puisse rendre hommage aux morts".
K. L. avec Laetitia Soudy