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Iran

"Trois ans de torture": les familles de Cécile Kohler et Jacques Paris inquiètes après le bombardement de la prison d'Evin

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L'aviation israélienne a bombardé lundi 23 juin la prison iranienne d'Evin à Téhéran, où étaient retenus les deux otages français.

"Ils subissent des traitements inhumains et dégradants." C'est par ces mots qu'Anne-Laure, la fille de Jacques Paris, retenu en Iran avec sa compagne Cécile Kohler depuis trois ans, a débuté son témoignage lors d'une conférence de presse organisée vendredi 27 juin.

Lundi, la prison d'Evin de Téhéran, où les deux Français étaient gardés, a été bombardée par Israël dans le cadre de la guerre entre les deux pays. Depuis, leurs familles n'ont pas de nouvelles.

"Je prends la parole car j’ai peur pour la vie de mon père. Il vient d’avoir 72 ans. Depuis plus de trois ans, ils sont détenus en cage depuis plus de trois ans avec Cécile. Lors de son dernier appel le 28 mai dernier, mon père m’a dit: 'Je suis lessivé'", raconte Anne-Laure Paris.

"Depuis plus de 1.140 jours, ils dorment à même le sol dans des cellules de 9m2 avec la lumière allumée en permanence, sans fenêtre", a-t-elle décrit.

"Ils ne peuvent pas sortir plus de 30 minutes, trois fois par semaine. Ils n’ont pas de quoi lire ni écrire. C’est de la torture selon le droit international, qui peut survivre à plus de trois ans de torture?", a questionné sa fille, s'exprimant pour la première fois publiquement.

"Aucune garantie"

"On nous a assuré que la prison ne serait pas bombardée, c’est tout ce qu’on redoutait", a souligné de son côté Noémie Kohler, la sœur de Cécile Kohler. "Nous n’avons aucune garantie" qu'ils n'ont pas été touchés par les bombardements, a-t-elle ajouté.

"Aujourd’hui, nous ignorons tout du sort de Cécile et Jacques. (...) On attend leur libération immédiatement, on attend des preuves de vie immédiatement", a-t-elle encore dit.

Le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot a déclaré lundi soir que les deux détenus "n’auraient pas été touchés" par les bombardements. Une information que les familles ne veulent pas croire sur parole car elle émane du régime iranien. "La parole des autorités iraniennes est loin d'être une garantie", a rappelé Noémie Kohler.

"Ils sont portés disparus. En droit, c'est une disparition forcée: les autorités iraniennes refusent de donner des garanties sur leur intégrité physique. Nous ne savons pas où ils se trouvent. Ils peuvent aussi bien avoir été transférés dans une autre prison soumise à des conditions encore plus dures que sous des décombres ou dans un lieu de détention clandestin", a énuméré Me Chirinne Ardakani, avocate de la famille Kohler.

Les avocats ont donc formulé des requêtes auprès de Téhéran: la mise en place d'une visioconférence et d'une visite consulaire. Les robes noires souhaitent aussi que le quai d'Orsay "plaide en faveur d'une exfiltration pour cause de force majeure" du fait des conséquences de la guerre et du cessez-le-feu précaire en Iran.

Le rapporteur spécial de l'ONU sur la torture bientôt saisi

"Cette situation de détention arbitraire, de disparition forcée - le fait d'avoir à subir un bombardement, d'en subir les conséquences, les transferts, l'inquiétude et l'incompréhension - qualifie un traitement cruel, inhumain et dégradant. Cela confine selon toutes les conventions internationales à des faits de torture", a expliqué Me Martin Pradel, avocat des deux ressortissants français.

"C'est la raison pour laquelle nous allons saisir l'ONU et en particulier le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture d'une demande visant à examiner la situation de Cécile Kohler et Jacques Paris", a-t-il ajouté.

Les défenseurs des familles entendent aussi saisir la Cour internationale de justice pour contraindre l’Iran à communiquer sur le lieu de détention des otages, alors qu'aucun contact n'a été établi depuis une visite consulaire auprès d'eux le 30 mai dernier.

Gabriel Joly