Avec la crise, le football grec ne tourne plus rond

Les clubs de foot grecs connaissent une véritable descente aux enfers, entre manque de moyens et corruption. - John and Melanie Kotspoulos - Flickr CC
La crise du football grec, Ricardo Faty l'a vécue de près. En 2011, son club de l'Aris Salonique ne lui envoie plus son salaire à la fin de chaque mois. "Cette année-là, on a raté la qualification pour la coupe d'Europe de très peu et les retards de salaires ont commencé pour tout le monde, précise le milieu défensif de 28 ans. Les dirigeants payaient un peu chaque mois. 3.000 euros par-ci, 4.000 euros par-là. C'était au compte-goutte." Evidemment, la situation agace les joueurs qui sèchent plusieurs séances d'entraînement et menacent de boycotter un match. "Finalement, on ne l'a pas fait, se souvient Faty. Ça aurait empiré la situation."
"Certains n'avaient plus assez d'argent pour se chauffer"
Déjà passé par quatre clubs et ancien international espoir français, Ricardo Faty s'en sort grâce à l'argent qu'il a mis de côté depuis plusieurs années. "Pour les jeunes du club et les Grecs, c'était plus compliqué, souffle celui qui évolue désormais au Standard de Liège en Belgique. Les étrangers étaient prioritaires sur les salaires donc les 'locaux' avaient moins de revenus que nous. Lorsqu'on se réunissait avec les dirigeants, certains expliquaient qu'ils n'avaient plus assez d'argent pour se chauffer chez eux."
Trois ans après avoir quitté le championnat grec, Faty est encore en procès avec l'Aris Salonique qui a été rétrogradé en troisième division à cause de ses problèmes financiers récurrents. La situation est la même dans presque tous les clubs. Selon une étude de la Fédération internationale des associations de footballeurs (FIFPro) publiée en 2012, près des deux tiers des joueurs évoluant dans les différentes divisions du championnat grec reçoivent leurs salaires épisodiquement. Un tiers d'entre eux attendent même jusqu'à six mois avant d'être payés. Des statistiques qui concernent presque exclusivement les joueurs de nationalité grecque et qui empirent année après année.
Financièrement, les clubs grecs n'ont jamais été autant dans le rouge. Les rétrogradations administratives se multiplient. Parmi elles, celle de l'AEK Athènes, club historique onze fois champion de Grèce. Même les deux clubs phares du pays, l’Olympiakos et le Panathinaïkos, sont en difficulté. Ce dernier a par exemple demandé à jouer tous ses matchs en journée, pour ne pas payer l'éclairage du stade.
"Volos a corrompu le championnat"
Le football grec est également durement touché par la corruption. Des soupçons de trucage pèsent chaque année sur des dizaines de rencontres de championnat et de coupe. En 2012, deux clubs, Kavala et l'Olympiakos Volos, ont par exemple été relégués pour leur implication dans une affaire de matchs arrangés. Une sanction qui n'a pas surpris Ricardo Faty. "A l'époque, on s'est tous dit que quelque chose clochait, explique-t-il. Volos venait de monter en première division et s'est immédiatement qualifié pour la coupe d'Europe. C'était étonnant."
"Il y a des matchs qu'on devait gagner mais qu'on ne gagnait pas. Il y a des matchs que Volos devait perdre mais qu'il gagnait, poursuit Faty. Concrètement, il y avait un arbitrage très particulier. Des hors-jeux imaginaires, des fautes non sifflées... Volos a corrompu le championnat. Je ne voulais pas y croire sur le coup. Mais la suite m'a donné raison." La situation est telle qu'en France, l'Union nationale des footballeurs professionnels (UNFP) déconseille désormais aux joueurs français de partir en Grèce.
Article publié sur Newsgreek.fr, le projet des étudiants en journalisme du Celsa à Athènes, en partenariat avec BFMTV.com.