Margaret Thatcher, une "Dame de fer" à l'empreinte indélébile

Margaret Thatcher en décembre 2012 - -
D'elle, François Mitterrand disait qu'elle avait "la bouche de Marilyn et le regard de Caligula". C'est dire si Margaret Thatcher, ancien Premier ministre britannique, décédée lundi à 87 ans, ne laissait personne indifférent.
Par son caractère d'abord, intransigeant et peu enclin à la concertation. Par son ambition ensuite, faisant de cette fille d'épicier la première femme britannique à accéder à la fonction de Premier ministre. Par sa politique enfin, ultralibérale et marquée par de nombreux bras de fer, autant sociaux que diplomatiques.
Carrière éclair
Son ambition, Margaret Thatcher, la forge tout au long de sa vie. De ses études de chimie à Oxford entre 1943 et 1947 à sa carrière d'avocate entamée après son mariage avec l'homme d'affaires Denis Thatcher en 1951, "Maggie", née Margaret Hilda Roberts le 13 octobre 1925, gomme petit à petit son ascendance modeste de fille d'épicier.
Après la naissance de ses jumeaux en 1953, la jeune femme aux convictions déjà bien arrêtées, résultat de la stricte éducation prodiguée par son père méthodiste, a des envies d'ailleurs. Et de plus grand. Elle rejoint les conservateurs et entre en 1959 à la chambre des Communes comme député de Finchley (nord de Londres). Entre 1970 et 1974, elle est nommée ministre de l'Éducation.
Puis tout s'accélère pour elle lorsqu'en 1975, elle prend la tête des Tories et devient quatre ans plus tard la première femme Premier ministre du pays. Elle le restera jusqu'au 22 novembre 1990, une longévité record au 20e siècle.
Onze années au pouvoir
Arrivée au pouvoir en 1979, Margaret Thatcher prend les commandes d'un navire britannique en plein naufrage économique. Le redressement du pays, pointé du doigt comme "le malade de l'Europe", se fera au prix d'une politique économique ultralibérale, multipliant les privatisations, misant sur la baisse de la pression fiscale et organisant l'affaiblissement des syndicats.
Cette politique libérale intransigeante, ce "thatchérisme" mené au pas de course et d'une main de fer, vaudra à Margaret Thatcher de nombreux bras de fer sociaux, avec des manifestations parfois réprimées très violemment comme celle des mineurs en 1984-85.
Regard bleu acier perçant, Margaret Thatcher est rapidement surnommée la "Dame de fer" en raison de son caractère implacable. "Je suis pour le consensus. Le consensus sur ce que je veux faire", lâche-t-elle un jour, trahissant ainsi son refus obstiné du compromis qui sera pourtant à l'origine de sa chute.
Atlantiste et anti-européenne
Car si Margaret Thatcher a de hautes ambitions pour le Royaume-Uni, en cherchant notamment à rétablir le prestige de l'ex-Empire, son mandat est émaillé de crises diplomatiques dont le point culminant reste la guerre des Malouines en 1982. Soixante-quatorze jours de conflits au terme desquels Margaret Thatcher gagne finalement son pari: reconquérir ces îles, possessions britanniques depuis 1833, et redorer le blason du Royaume-Uni sur la scène internationale.
Margaret Thatcher célébrant le 25e anniversaire de la guerre des Malouines avec un régiment d'anciens parachutistes, en 2007. Crédit: Alistair Grant - AFP
Intime de Ronald Reagan et Mikhaïl Gorbatchev, elle tient aussi son rôle dans la fin de la Guerre froide. Si elle privilégie les relations transatlantiques avec les Etats-Unis, Margaret Thatcher prend en revanche ses distances avec l'Europe. Ses positions farouchement anti-européennes (le célèbre "we want our money back", "nous voulons qu'on nous rende notre argent", lancé en 1979 à l'Union européenne lors des négociations sur la Politique agricole commune) contribuent à contrarier ses rapports avec François Mitterrand.
Margaret Thatcher et François Mitterrand le 14 juillet 1989. Crédit: Joel Robine - AFP
Trente-quatre ans après cette formule, la tiédeur est toujours de mise dans la mémoire collective européenne. "On se souviendra d'elle pour à la fois ses contributions et ses réserves vis-à-vis de notre projet commun", a ainsi réagi le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, à la mort de Margaret Thatcher.
Renversée par son propre parti
En onze de pouvoir, Margaret Thatcher a eu le temps de se faire nombre d'ennemis politiques. C'est pourtant à son propre parti qu'elle doit sa chute, lorsqu'elle ne parvient pas à imposer la "poll tax", cet impôt local contesté. Mise en échec par ses collègues au cours d'un mémorable défilé de ministres au 10 Downing street, elle démissionne les larmes aux yeux en novembre 1990.
Elle se retirera toutefois sur un ultime discours au Parlement, enlevé et plein d'humour, resté dans les mémoires.
La baronne Thatcher s'isole alors dans le quartier cossu londonien de Belgravia pour rédiger ses mémoires et se retire définitivement de la scène politique en 2002 pour des raisons de santé. L'ancienne femme forte du Royaume-Uni souffre en effet d'Alzheimer et son état empire régulièrement, révèle sa fille Carol en 2008.
Depuis, Margaret Thatcher était restée en retrait, ne participant pas à la réception organisée à Downing Street par le Premier ministre David Cameron pour son 85e anniversaire en 2010 ou aux célébrations du Jubilé de la reine Elizabeth II en 2012, pas plus qu'aux Jeux Olympiques de Londres. Reste cette image de Dame de fer, surnom qui faisait sa fierté et lui survivra.
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