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Bloody Sunday: 50 ans plus tard, un ancien soldat britannique jugé pour meurtres et tentatives de meurtre

Une marche pour commémorer le 50e anniversaire du "Bloody Sunday", le 30 janvier 2022 à Londonerry, en Irlande du Nord

Une marche pour commémorer le 50e anniversaire du "Bloody Sunday", le 30 janvier 2022 à Londonerry, en Irlande du Nord - PAUL FAITH © 2019 AFP

Pour la première fois, le procès d’un ancien soldat britannique accusé de deux meurtres et de cinq tentatives de meurtre lors du "Bloody Sunday" s’ouvre ce lundi 15 septembre à Belfast, capitale de l’Irlande du Nord. Cet épisode tragique, survenu en 1972, est l’un des plus marquants du conflit nord-irlandais qui a secoué la région pendant plusieurs décennies.

Plus de 50 ans après les faits, un ancien soldat britannique est jugé à partir de ce lundi 15 septembre à Belfast (Irlande-du-Nord) pour deux meurtres et cinq tentatives de meurtre lors du "Bloody Sunday", l'un des épisodes les plus sanglants des trois décennies du conflit nord-irlandais.

Aucun soldat n'a jusque-là été jugé pour ce "dimanche sanglant", le 30 janvier 1972 à Londonderry, ville également connue sous le nom de Derry, quand des parachutistes britanniques avaient ouvert le feu sur une manifestation pacifique de militants catholiques, faisant 13 morts.

Le "soldat F" face à la justice, 53 ans après le drame

L'armée britannique avait affirmé que les parachutistes avaient répondu aux tirs de "terroristes" de l'IRA (Armée républicaine irlandaise, paramilitaires opposés à toute présence britannique sur l'île d'Irlande), une version alors confortée par un rapport réalisé à la hâte.

Malgré tous les témoignages contredisant cette version, il a fallu attendre 2010 pour que soit officiellement reconnue l'innocence des victimes, atteintes pour certaines dans le dos ou même à terre, agitant un mouchoir blanc.

Surnommé "soldat F", l'ancien parachutiste jugé à partir de lundi est accusé de deux meurtres, ceux de James Wray et William McKinney, et de cinq tentatives de meurtre, lors de la répression de ce rassemblement. En décembre, il avait plaidé non coupable devant le tribunal de Belfast.

Il était dissimulé derrière un rideau pour protéger son anonymat, qu'il conservera également pendant toute la durée du procès. Cette protection a été accordée par le juge, ses avocats craignant pour sa sécurité. Une manifestation est prévue à l'extérieur du tribunal lundi avant l'ouverture du procès.

"Nous avons attendu 53 longues années pour que justice soit faite et, espérons-le, nous obtiendrons satisfaction grâce à ce procès", a déclaré Tony Doherty, dont le père Patrick figurait parmi les victimes du Bloody Sunday, au média local Derry Now.

Le parquet nord-irlandais avait engagé des poursuites pénales contre "soldat F" en 2019. Elles avaient ensuite été abandonnées, puis relancées en 2022.

Le "Bloody Sunday", tournant tragique du conflit nord-irlandais

Le massacre du "Bloody Sunday"-immortalisé par le tube du groupe de rock irlandais U2 "Sunday Bloody Sunday" (1983)-avait eu pour effet de précipiter de nombreux jeunes catholiques républicains dans les bras de l'IRA.

Il est l'un des moments les plus sombres des trois décennies de "Troubles" qui ont opposé républicains, surtout catholiques, partisans d'une réunification avec l'Irlande, et unionistes protestants, défenseurs de l'appartenance de l'Irlande du Nord à la Couronne britannique. Il faudra attendre 1998 pour que l'accord de paix du Vendredi Saint mette un terme à ce conflit qui a fait quelque 3.500 morts.

En 2010, à la suite de la plus longue et la plus coûteuse enquête publique de l'histoire britannique qui avait reconnu l'innocence des victimes du "Bloody Sunday", le Premier ministre de l'époque, David Cameron, avait présenté des excuses officielles, qualifiant d'"injustifiables" les faits survenus ce jour-là.

Depuis la fin du conflit nord-irlandais, seul un ancien soldat britannique a été condamné: début 2023, une peine de trois ans avec sursis a été prononcée contre David Holden, qui avait tué un homme d'une balle dans le dos à un check-point en 1988. Il avait expliqué avoir tiré par accident car il avait les mains mouillées.

A.Si. avec AFP