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Boualem Sansal, Sahara occidental... Le président algérien Tebboune dénonce un "climat délétère" avec la France

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Dans ses critiques, Abdelmadjid Tebboune pointe directement le président français Emmanuel Macron, avec qui "nous perdons du temps."

Des tensions, mais pas de volonté de rompre avec Paris. Dans une longue interview accordée à L'Opinion dimanche 2 février, le président algérien Abdelmadjid Tebboune est revenu sur les différents sujets brûlants qui enveniment la relation entre sa nation et la France, et a déploré un "climat délétère" entre les deux pays.

"Le climat est délétère. Nous perdons du temps avec le président Macron", affirme le chef d'État, disant vouloir éviter une "séparation qui deviendrait irréparable", dans cet entretien publiée en ligne.

"Plus rien n'avance si ce n'est les relations commerciales. Le dialogue politique est quasiment interrompu", ajoute-t-il, regrettant des "déclarations hostiles tous les jours" de responsables politiques.

"Coup politique"

Parmi les principaux points d'achoppement entre Paris et Alger, l'affaire Doualemn, du nom de cet influenceur algérien menacé d'expulsion du territoire français après des menaces proférées en ligne.

Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune, le 13 juin 2024 en Italie
Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune, le 13 juin 2024 en Italie © AFP

Abdelmadjid Tebboune le rappelle, "il fait respecter les procédures légales." Le dirigeant en profite pour également attaquer l'actuel ministre de l'Intérieur français, Bruno Retailleau.

"Il a parlé de l'Algérie comme d'un 'pays qui cherche à humilier la France': il a voulu faire un coup politique en forçant son expulsion. Il vient d'être retoqué par la justice française qui n'a pas justifié l'urgence absolue de sa mesure d'expulsion."

Dans sa critique, le président algérien se rappelle du début de mandat de Gérald Darmanin, prédécesseur de Bruno Retailleau à l'Intérieur, qui avait "débuté son ministère en cherchant à nous forcer la main." "Puis il est venu à Alger et, in fine, nous avons trouvé le mon modus operandi", se rappelle-t-il.

Boualem Sansal "d'abord Algérien"

En ce qui concerne le cas de l'écrivain Boualem Sansal, critique du pouvoir algérien incarcéré depuis mi-novembre, Abdelmadjid Tebboune juge que ce "n'est pas un problème algérien. C'est un problème pour ceux qui l'ont créé (...) d'autres cas de binationaux n'ont pas soulevé autant de solidarité".

"C'est une affaire scabreuse visant à mobiliser contre l'Algérie", selon lui. Si l'écrivain, qui a obtenu la nationalité française, n'a pas pu bénéficier de visite consulaire, le président algérien juge qu'il est "d'abord Algérien".

"Il est pris en charge par des médecins et sera jugé dans le temps judiciaire imparti. Il peut téléphoner régulièrement à sa femme et à sa fille", a-t-il assuré.

L'épineux problème saharien

Dernier sujet brûlant, l'annonce par la France d'un soutien au plan d'autonomie marocain au Sahara occidental, territoire au statut non défini à l'ONU et théâtre d'un conflit depuis un demi-siècle entre le Maroc et les indépendantistes sahraouis du Front Polisario, soutenus par Alger. Les contentieux entre les deux pays ne cessent depuis de ressortir.

Face à la dégradation des relations, le président algérien se dit "totalement d'accord" avec le besoin de reprendre le dialogue, évoqué notamment par le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot.

Encore faudrait-il des déclarations politiques fortes en ce sens, selon lui, "que le président français, les intellectuels, les partisans de la relation puissent faire entendre leurs voix". "Ce n'est pas à moi de les faire. Pour moi, la République française, c'est d'abord son président", ajoute-t-il sans plus de précisions.

Hugo Septier avec AFP