Syrie: la coopération entre la France et la Russie en trois points

François Hollande a obtenu de Moscou l'intensification des frappes principalement sur les positions de Daesh. - Yuri Kadobnov - AFP
"La France et la Russie vont coordonner leurs attaques en Syrie, cela ne s'est pas vu depuis la Guerre froide", décryptait jeudi soir Ulysse Gosset, l'éditorialiste international de BFMTV. La rencontre symbolique entre François Hollande et Vladimir Poutine a débouché sur des décisions concrètes et inédites qui seront mises en oeuvre dans ce nouveau partenariat franco-russe pour lutter contre le terrorisme et Daesh.
L'étape russe du marathon diplomatique de François Hollande était primordiale, aux lendemains de sa rencontre avec Barack Obama et de l'incident provoqué après qu'un avion russe a été abattu par la Turquie. Dans une conférence de presse commune, le chef de l'Etat français a rappelé que le terrorisme était l'affaire de tous, citant les attentats de Paris mais aussi l'attaque de Daesh contre un avion commercial russe.
Les bonnes cibles visées
Un appel que semble avoir entendu le président russe, puisqu'au terme de leur entretien qui a duré environ une heure et demie, les deux pays se sont mis d'accord sur "trois points essentiels". Mercredi, l'ambassadeur de Russie en France parlait de créer un état-major commun. Il n'en sera rien. Toutefois, après la rencontre avec son homologue russe, François Hollande a assuré que désormais la France et la Russie allaient "coordonner" et "d'intensifier" leurs frappes.
En octobre dernier, Moscou annonçait qu'après un mois de frappes, elle avait bombardé 1.623 cibles "terroristes" lors de 1.391 raids aériens, qui ont tué 600 personnes. De son côté, Paris a réalisé 300 sorties depuis le début de son engagement en Syrie.
Vladimir Poutine a insisté sur l'échange d'informations "pour éviter les doublures et les incidents". Car depuis le début des frappes russes en Syrie, il est reproché à Moscou de viser davantage les positions des opposants au régime de Bachar al-Assad plutôt que celles du groupe terroriste Etat islamique. Si le Kremlin ne s'engage pas à cesser les frappes contre les rebelles modérés, il communiquera des renseignements "concernant les zones où se trouvent l'opposition saine, et non pas terroriste, et (s'abstiendra) de les viser".
Points de crispation
Les frappes conjointes vont principalement viser les sources de revenus du groupe terroriste. "Ce consensus est nécessaire mais pas suffisant", a détaillé François Hollande. "Nous devons prendre aussi nos responsabilités; c’est ce que fait la France en bombardant les sites pétroliers contrôlés de Daesh qui se financent grâce à la contrebande". La manne financière dégagée de la vente de l'or noir représenterait 500 millions d'euros.
Des points de crispation persistent toutefois dans cette nouvelle alliance franco-russe. Rien ne dit que cette entente puisse se faire dans le cadre d'une coalition internationale. A l'heure actuelle, l'Elysée est plus enclin à travailler avec le Kremlin que ne l'est la Maison Blanche, précisait il y a quelques jours une source diplomatique française. Les Etats-Unis, qui sont d'accord pour intensifier les frappes en Syrie, avaient prévenu la Russie que seul un changement de stratégie constituait un préalable à une potentielle collaboration.
Si sur ce point-là, Moscou a fait un pas en avant, reste la délicate question du sort du président syrien. François Hollande a notamment rappelé que l'avenir de la Syrie se dessinerait sans Bachar al-Assad. "Eradiquer Daesh, nous en convenons avec le président Poutine, ça veut aussi dire traiter le mal à la racine", a insisté le chef de l'Etat, rappelant la dégradation de la situation dans le pays depuis 2011. Et ajoutant: "Pour la France, Bachar al-Assad n’a plus sa place en Syrie".