"Innocence of Muslims", ce film qui a tout du bidonnage

Tout porte à croire que cette affaire est donc un coup monté. - -
En ne diffusant qu'une bande-annonce d'"Innocence of Muslims", les auteurs du film ont réussi à lui donner l'importance d'une super-production hollywoodienne. Mais y-a-t-il réellement un long-métrage derrière ces 13 minutes diffusées sur YouTube ? Voici les six raisons qui laissent penser que ce film n'existe probablement pas.
• Personne n'a vu le film en entier
Les internautes ont, pour l'heure, vu l’extrait de 13 minutes d'"Innocence of Muslims" largement diffusé sur Internet. Mais qui a vu le film entier, qui, selon les dires de son réalisateur, est sensé durer deux heures ? The Hollywood Reporter a mené l’enquête et sa réponse tient en un mot : personne.
Le film n’aurait été projeté qu’une seule fois dans un cinéma d’Hollywood, le Vine Theatre. Problème : aucun employé ne se souvient l’avoir vu. Les acteurs et techniciens eux-mêmes n’ont jamais vu le produit final, comme l’a affirmé l’une d’elle, Cindy Lee Garcia. Un Conseil des affaires publiques musulmanes a cherché, en vain, la fameuse bobine. Il en a conclu qu’elle n’avait jamais existée.
Même la chaîne Media For Christ, qui a prêté son studio pour le tournage, n’a jamais su pour quel genre de film il a été utilisé. Le réalisateur avait déclaré tourner un film sur la persécution des chrétiens en Egypte.
• Un faux long-métrage existe sur YouTube
Les plus curieux auront fini par trouver sur YouTube une vidéo de 74 minutes intitulée "Muhammad full movie - Innocence of Muslims 74 Min", déjà visionnée par plus d’un million et demi d’internautes.
Seulement, mis à part une introduction faite d’images en arabe, on ne voit tout au long de cette "version complète" que les scènes déjà connues répétées en boucle.
Pour résumer : non seulement, dix jours après les premières manifestations, le véritable film n'a toujours pas été trouvé, mais en plus, des faux commencent à circuler à la place.
• La bande-annonce ne rime à rien
Que nous dit cette "bande-annonce" de l’intrigue du film, comment est-elle montée ? Ce n’est qu’un empilement de scènes sans rapport. Il n’y a ni progression, ni intrigue, ni cohérence.
Dans ce patchwork réalisé à la va-vite, aucun indice ne laisse entendre qu’un véritable film cohérent, rassemblant ces personnages et ces scènes, puisse exister.
• Les paroles ont été manipulées
Le spectateur attentif n’aura pas manqué de le remarquer : la coordination entre les lèvres des acteurs et les paroles de la bande-son semble plus qu’approximative, et parfois totalement incohérente. Il arrive régulièrement que, prise d’une soudaine autonomie, la bouche d’un acteur continue de s’agiter dans le vide, alors que l'acteur a fini de parler.
On peut aussi remarquer de fréquents "décrochages" sonores : le son - si mauvais qu’il semble avoir été enregistré dans un hall de gare - change brusquement de tonalité au milieu même d’une phrase.
Ces détails suggèrent que la prise de son n’est pas celle du tournage, mais qu’elle a été faite à part, en plusieurs prises et dans des conditions différentes. C’est le signe qu’une grande part de manipulation sonore est intervenue dans le mixage final. Elle saute d’autant plus aux yeux que le rendu est digne de la pire des vidéos amateurs trouvée sur Internet.
Cette manipulation est très suspecte : pourquoi doubler un film qui a vraisemblablement été tourné en anglais ? La réponse des acteurs est limpide : on leur a fait dire des choses qu'ils n'ont jamais dites.
• Des acteurs se disent trompés
L'une des actrices, Cindy Lee Garcia, a d'ailleurs porté plainte pour tromperie contre Nakoula Basseley Nakoula, et a été déboutée car la justice n'a pu remettre l'assignation à l'intéressé.
Selon le témoignage de Cindy Lee, le résultat est en totale rupture avec le projet pour lequel toute l’équipe a été engagée. Elle a tourné ce film en croyant jouer dans une histoire d’aventure intitulée "Desert Warrior" et ses dialogues ont été modifiés. L'actrice soutient que dans le dialogue original, le mot "Mohamed" était... "Maître Georges". Puisque le film a été tourné sur fond vert, personne n'a pu non plus voir les décors avant la post-production.
• Et au final ...
Tout porte à croire que cette affaire est donc un coup monté, une provocation ayant pour but de raviver les tensions inter-religieuses à un moment critique (fin du printemps arabe, élection présidentielle américaine, anniversaire du 11-Septembre…).
Certes, il existe toutes sortes de mauvais films. Certains cinéphiles se prennent même de passion pour les nanars. Mais cette vidéo-ci atteint un abîme. Déjà absurde et insoutenable de médiocrité pendant treize minutes, la possibilité que quelqu’un ait pu pousser le vice jusqu’à produire une telle chose sur une durée de deux heures laisse pantois.