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Algérie

Essais nucléaires au Sahara: l'Algérie vote une loi exigeant que la France "élimine" les déchets radioactifs

L'entrée d'un site d'essai nucléaire français dans la province de Tamanrasset en Algérie, le 25 février 2010

L'entrée d'un site d'essai nucléaire français dans la province de Tamanrasset en Algérie, le 25 février 2010 - FAYEZ NURELDINE / AFP

Le Sénat algérien a voté une loi demandant à la France d'"assumer pleinement ses responsabilités" dans "l'élimination des déchets radioactifs" après des essais nucléaires réalisés au Sahara dans les années 1960.

C'est l'un des nombreux contentieux qui agitent les relations franco-algériennes. Le Conseil de la nation algérien, équivalent du Sénat, a voté jeudi 24 février un texte reconnaissant la "responsabilité" de la France dans le nettoyage des sites d'essais nucléaires menés au Sahara.

De 1960 à 1966, la France a réalisé 17 essais nucléaires dans le désert algérien, d'abord dans les airs à Reggane, puis dans des souterrains à In Ecker dans le massif du Hoggar. Des documents déclassifiés en 2013 ont révélé des retombées radioactives encore importantes, s'étendant de l'Afrique de l'Ouest au sud de l'Europe.

"Responsabilités historiques"

La ministre algérienne de l'Environnement, Nadjiba Djilali, a souligné que les conséquences de ces essais constituent "une autre violation à l’encontre de notre pays et de notre peuple", selon des propos rapportés par la chaîne AL24News.

La France doit "assumer pleinement ses responsabilités historiques, morales et juridiques dans l’élimination de ces déchets radioactifs et reconnaître l’énorme préjudice qu’il a causé à notre pays et aux populations d’Adrar, de Reggane, d’In Ecker et d’autres régions", a-t-elle ajouté.

"Que notre position soit claire et fasse l'objet d'un message à faire entendre au-delà de nos frontières", a insisté le président du Conseil de la nation, Salah Goudjil, selon la correspondante de l'hebdomadaire Le Point en Algérie, qui précise qu'à ce stade aucun texte d'application ne précise les démarches permettant d'exiger de Paris les opérations de nettoyage des anciens sites d'essais nucléaires.

Fin décembre, le président algérien Abdelmadjid Tebboune avait déjà exhorté la France à "venir nettoyer" les sites. "La France est devenue une puissance nucléaire, et a laissé des maladies en Algérie (...) Il faut venir nettoyer, je ne veux pas de votre argent, je n’ai rien à faire avec votre argent", avait-il lancé, au moment où les relations entre Paris et Alger sont notamment polluées par la question du Sahara occidental et de l'incarcération de l'écrivain Boualem Sansal.

En février 2024, la branche française de la Campagne internationale pour l'abolition des armes nucléaires (Ican) dénonçait dans un communiqué le fait que la France "traite ces questions avec une grande confidentialité, en invoquant des secrets de défense nationale et de sécurité". "Elle refuse toujours de divulguer les cartes précises qui révèleraient les emplacements des déchets nucléaires et qui permettraient d’identifier précisément les sites d’enfouissement de ces déchets", déplorait l'ONG.

Créé en France en 2010, le Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen) reçoit chaque année des demandes de personnes, françaises ou étrangères, affirmant souffrir de pathologies liées à une exposition aux essais nucléaires menés au Sahara ou en Polynésie française. En 2023, le Civen dit avoir reçu 564 nouvelles demandes d’indemnisation, dont seulement trois ont été formulées par des Algériens.

François Blanchard