"On n'avait pas estimé le danger": pourquoi les feux de forêt n'épargnent plus les villes

L'incendie des Pennes-Mirabeau (Bouches-du-Rhône), près de Marseille, le mercredi 9 juillet 2025. - BFMTV
Depuis le mardi 8 juillet, la ville de Marseille est touchée par un incendie. Parti des Pennes-Mirabeau, le feu a fini par toucher la cité phocéenne. Dans le 16e arrondissement de la ville, les habitants du quartier de l'Estaque ont dû être évacués et plusieurs maisons ont été ravagées par les flammes arrivant du massif forestier à proximité.
Durant l'incendie, les habitants de l'Estaque ont dû être confinés chez eux après avoir reçu un message d'alerte de la préfecture. Un feu qui a aussi contraint les autorités à stopper la circulation des trains départ et à l'arrivée de Marseille en direction du nord et de l’ouest et le personnel de la gare Saint-Charles a été évacué. L'aéroport de Marseille-Provence, situé à Marignane (Bouches-du-Rhône), a lui aussi été fermé, ce mardi.
Des scènes de désolation qui pourraient se répéter à l'avenir dans les agglomérations françaises désormais plus à la merci des feux de forêt.
Un mouvement mutuel de rapprochement des villes et des forêts
Depuis l'exode rural en France, les campagnes se sont vidées et les villes se sont remplies. Pour garantir de l'espace à cette nouvelle population, les agglomérations se sont progressivement de plus en plus étendues sur de nouveaux territoires. Selon l'Institut national de Géographie, les villes ont gagné 3 millions d'hectares entre 1985 et 2023.
Conjointement à cette conquête de territoires opérée par les zones urbaines, les forêts ont elles aussi grappillées du terrain dans l'Hexagone. Les campagnes ayant été laissées vides par l'exode rural, une politique de boisement a été mise en place par les autorités. Des forêts entières ont donc été plantées par l'homme, comme dans les Landes. Toujours selon, l'Institut National Géographie, la forêt est passée de 8,9 millions d'hectares occupés en 1840 à 17,5 millions en 2023.
"L'urbanisation avance beaucoup plus vite que la forêt qui a pris la place, dans certaines régions, des espaces abandonnés par le pâturage", indique à BFMTV.com, Arthur Guérin-Turcq, géographe.
À cause de ces deux extensions, les feux peuvent maintenant plus facilement passer d'une zone à l'autre. C'est particulièrement le cas à Marseille, où des habitations sont à proximité directe d'un massif forestier composé d'une végétation très inflammable.
En France, en France, environ une commune sur cinq est exposée au feu de forêt, soit environ 6.700 communes. Cinq régions concentrent 90% de ces communes: Occitanie, Auvergne-Rhône-Alpes, Nouvelle-Aquitaine, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Corse, selon le ministère de la Transition Écologique.
"Les zones les plus concernées sont les périurbaines où il y a des points de contact direct entre la forêt et la ville", décrit à BFMTV.com, Arthur Guérin-Turcq. Dans certaines régions, comme le sud-est, ces points de contact s'expliquent par une politique de construction immobilière mise en place dans les années 70.
"On a fait construire des résidences secondaires dans des espaces à risque. Aujourd'hui, ce sont des résidences principales exposées aux feux, car on n'avait pas estimé le danger à l'époque", décrypte le géographe.
"Il faudrait des espaces avec le moins de combustibles"
Les villes sont désormais aussi plus sujettes aux feux à cause du réchauffement climatique et de l'augmentation des incendies violents depuis plusieurs étés. La récurrence des épisodes de sécheresse couplés au vent et aux fortes températures offre au feu des conditions climatiques optimales pour se développer et s'entendre rapidement. Pour preuve, l'incendie des Pennes-Mirabeau de ce mardi a déjà parcouru 750 hectares.
Pour réduire ce risque de propagation des feux de forêt dans les villes, certains experts plaident pour la mise en place d'une politique de lisière. "Il faudrait des espaces avec le moins de combustibles, comme des pâturages, entre les villes et la forêt", déclare à BFMTV.com, Arthur Guérin-Turcq, géographe. "De plus, il faut aussi miser sur des politiques préventives pour être moins confronté à des situations d'urgence", conclut-il.
Dans le futur, les feux devraient continuer se rapprocher des villes. Vers 2040 l'état de sécheresse sur tout le territoire dès le mois de mars, les canicules en juin et les vagues de chaleur d’une durée de 10 jours en août pourraient se reproduire tous les quatre ans dans les territoires méditerranéens, selon l'Office national des forêts.