"Un vrai personnage charismatique de sauveur": un ancien collègue de Frédéric Péchier témoigne à la barre

Deux patients de Frédéric Péchier, Éric Gendronneau et Sylvie Gaillard, ont survécu à des arrêts cardiaques en 2009, à 19 jours d'écarts. À l'époque des faits, les événements avaient été imputés à un syndrome de Tako-Tsubo.
"Un Tako-Tsubo, c'est le cœur qui crampe", à cause d'un excès d'adrénaline provoqué par le stress, a expliqué à la barre le directeur d'enquête Olivier Verguet. "C'est un phénomène d'une rareté absolue", a-t-il insisté.
Les deux patients, alors âgés de 49 et 41 ans, survivront. Et c'est bien plus tard, après l'ouverture d'une enquête en 2017 concernant d'autres arrêts cardiaques dans la même clinique Saint-Vincent, que les policiers envisageront l'hypothèse d'un empoisonnement par Frédéric Péchier. L'accusation lui en impute 30 au total, dont 12 mortels, entre 2008 et 2017.
"Je m'occuperai de tes patients"
Dans le cas d'Éric Gendronneau, un anesthésique local (un poison potentiel) sera retrouvé dans une poche de perfusion utilisée ce jour-là au bloc opératoire. Mais l'anesthésiste en charge du patient, Martial Jeangirard, a affirmé jeudi 9 octobre devant la cour qu'il ne l'avait pas utilisée pour ce patient.
"Il n'y a rien dans ce dossier", tance l'avocat de la défense, Randall Schwerdorffer. Pour que la thèse de l'empoisonnement tienne, "il aurait fallu que Frédéric Péchier entre dans le bloc" quand le docteur Jeangirard en était sorti, et "qu'il mette cette poche-là, sans que les infirmières le voient", un scénario invraisemblable selon lui.
Après l'arrêt cardiaque, Martial Jeangirard a raconté qu'il avait appelé à l'aide son collègue Frédéric Péchier, alors "au top de la réanimation" et qui "s'était créé un vrai personnage charismatique de sauveur".
Ce dernier "m'a pris dans les bras et m'a dit: 'Tu sais mon gars, quand on a un problème comme ça, il faut rentrer chez soi et se reposer. T'inquiète, je m'occuperai de tes patients'", s'est souvenu le praticien. "Sur le coup j'ai trouvé ça très sympa, maintenant, je trouve ça traitre", a poursuivi le médecin qui pense désormais l'accusé coupable.
Une bonne entente avec l'accusé
Selon l'accusation, l'un des mobiles présumés de Frédéric Péchier pour empoisonner des patients aurait été de nuire à des collègues anesthésistes avec lesquels il avait des différends.
Or, avant ces événements de 2009, Frédéric Péchier était parti travailler quelques mois dans une autre clinique, ce que le docteur Jeangirard lui avait reproché, a observé le directeur d'enquête. "Je ne comprends pas qu'on fasse la valse entre deux établissements", a confirmé le témoin.
"S'attaquer à un de vos patients, c'était une bonne manière de vous toucher ?", lui demande son avocat, maître Kevin Louvet. "Oui, là, c'était touché-coulé", répond l'anesthésiste, très éprouvé par cet évènement.
Interrogé par maître Schwerdorffer, Martial Jeangirard concède néanmoins qu'"à l'époque", il "s'entendait bien avec Péchier". "J'ai l'impression", abonde l'avocat, "je ne comprends toujours pas pourquoi il vous en aurait voulu".
"Je ne suis pas dans les méandres de son cerveau", répond le médecin. "Peut-être qu'il n'y en a pas", conclut le conseil, suscitant des sourires dans l'assistance.
Frédéric Péchier, qui a toujours clamé son innocence, comparait libre, mais risque la réclusion criminelle à perpétuité. Verdict le 19 décembre.