Dans le Finistère, l'IA scrute les élevages d'animaux et vient en aide aux éleveurs

Des porcs dans un élevage à Wambrechies (Nord), le 28 juillet 2010. (Photo d'illustration) - DENIS CHARLET / AFP
Détecter et prévenir le stress et les maladies chez les animaux d'élevage à partir de simples caméras et micros: l'arrivée de l'intelligence artificielle dans les exploitations doit doper la productivité en améliorant le bien-être animal, tout en soulageant les éleveurs, estiment des acteurs du secteur.
L'IA, rebaptisée pour l'occasion "intelligence agricole", sera au coeur du Salon international de l'élevage, le Space, organisé à Rennes (Ille-et-Vilaine) du 16 au 19 septembre prochain où plus de 100.000 visiteurs sont attendus.
"La spécificité de l'élevage, c'est que c'est 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24, c'est une pression psychologique", souligne Jean-Alain Divanac'h, responsable de l'"espace pour demain" du salon, où plusieurs exposants présenteront leurs systèmes "d'aide à la décision" par l'IA.
"On demande à ces outils de nous soulager: il faut que l'IA soit choisie, non subie, et propose des solutions concrètes", insiste cet éleveur laitier et porcin, président de la FDSEA du Finistère.
Son collègue Sébastien Brishoual teste déjà dans ses bâtiments d'engraissement de truies, à Tréméven (Finistère), un outil IA "d'hypervision" développé par l'entreprise Tell Elevage.
En couplant les relevés de différents capteurs (température, humidité, CO2, ammoniac, luminosité...) avec un système de vision infra-rouge par ordinateur, cet outil collecte en continu des données sur l'ambiance intérieure et le comportement des animaux, puis calcule un "indice de répartition spatiale", indicateur clé du bien-être des truies.
Densité, cochons debout, cochons couchés et surtout, "cochons en position décubitus latérale", la position de confort: l'algorithme identifie tous ces facteurs et "cherche à optimiser ça toute la journée", détaille Jean-Luc Martin, directeur de Tell Elevage.
Chant choral ou plaintes ?
Grâce aux tableaux de bord et alertes du système, "on sait quand ça a dévié, quand c'est pas bon. Et le matin, on peut arriver et ajuster le réglage", résume Sébastien Brishoual pour l'AFP.
"Le premier résultat a été l'augmentation des croissances: les animaux se comportaient mieux et poussaient plus vite", assure l'éleveur, pour qui ces outils rendent "moins pénible et plus valorisant" son métier.
La puissance d'apprentissage et de calcul des intelligences artificielles permet non seulement d'exploiter des images mais aussi des sons pour les mettre en relation avec différents comportements ou signes avant-coureurs.
C'est ce qu'a développé le groupe Michel, spécialiste breton de la nutrition animale et de l'organisation des filières d'élevage, à destination des éleveurs de dindes et de poulets de chair.
Ces volailles "émettent des vocalises spécifiques à certaines pathologies ou certains problèmes", explique Maëlle Philippe, responsable "business intelligence" du groupe Michel. "Notre objectif avec le son, c'est de détecter précocement des troubles de santé", comme la coccidiose (un parasite) ou la diarrhée.
Ces vocalises sont collectées via des micros placés directement dans les poulaillers, à hauteur d'animaux.
"Anticiper les problèmes"
Pour concevoir son outil, qui sera commercialisé en 2026, le groupe a recueilli des données directement dans des élevages commerciaux "dans des conditions réelles" puis a fait analyser ces sons par des experts "maison". "Chant choral" ou petits piaillements "plutôt bons signes", ou au contraire "plaintes caractéristiques de problématiques", des centaines d'heures de vocalises ont ensuite été patiemment étiquetées par ces experts pour apprendre à l'IA à les reconnaître par elle-même.
L'outil Comi Sense utilise aussi la vidéo "pour aller un peu plus loin dans la détection et la compréhension des événements". A terme, il compte proposer des indicateurs sur la répartition des animaux mais aussi sur la qualité des fientes, l'état des litières et même la propreté des volailles, des éléments déterminants pour le bien-être animal et certains cahiers des charges.
"On veut pouvoir anticiper encore plus précocement les problèmes", une demande forte des éleveurs sur le terrain, résume Joachim Michel, directeur général "volailles" du groupe.