Alex Hitchens, Nasdas, AD Laurent... qui sont ces influenceurs controversés convoqués à l'Assemblée nationale?

Le 10/06 à 10h49

Ce mardi 10 juin, Alex Hitchens, Nasdas, AD Laurent et Julien et Manon Tanti seront entendus par la commission d'enquête sur les effets psychologiques de Tiktok sur les mineurs. Les conclusions définitives seront présentées au plus tard le 12 septembre prochain.

Les discussions devraient être intenses. Ce mardi 10 juin, l'Assemblée nationale s'apprête à entendre des stars du petit écran. En effet, la commission d'enquête sur les effets psychologiques de Tiktok va auditionner une ribambelle de créateurs de contenus.

Si les auditions sont déjà commencé le 3 juin dernier, avec l'intervention du vidéaste Hugo Décrypte ou encore de Monsieur le Chat, cette fois-ci, c'est au tour des influenceurs plus controversés d'être entendus par les 30 députés. Au programme? Le vidéaste reconverti dans le porno AD Laurent, le couple issu de la téléréalité Julien et Manon Tanti, la star de Snapchat Nasdas ou encore l'influenceur au discours masculiniste Alex Hitchens.

"Enormément de mineurs les regardent"

Cinq personnalités qui n'ont pas été choisis au hasard. Leurs noms sont ceux qui sont arrivés en tête des plus de 30.000 réponses de la grande consultation citoyenne, lancée de mars à fin mai. "Ils sont remontés des signalements faits par les citoyens", rappelle Arthur Delaporte, député PS et président de la commission d'enquête, au micro d'Apolline Matin. "Parmi ceux qui revenaient de façon récurrente quand on demandait: 'quels influenceurs vous choquent', il y avait ces noms-là." Des profils qui sont également remontés lors des auditions ou de tables-rondes.

"On a choisi de les convoquer à la fois pour discuter avec eux, et savoir s'ils comprennent bien qu'il y a énormément de mineurs qui regardent leur contenu, et pour voir leur modèle économique, car tous ces contenus rapportent beaucoup d'argent", poursuit le député du Calvados.

En effet, "ce sont des très jeunes qui suivent ces comptes. Je vais dans des classes de CM2, quand je leur demande quels influenceurs ils connaissent, ils me parlent de Nasdas, d'AD Laurent. Parfois en rigolant un peu parce qu'ils sentent bien qu'il y a une forme d'interdit", observe-t-il. "A l'age de 11 ans, on va dire qu'un jeune sur deux a un compte Tiktok qui est potentiellement exposé à ces contenus." Mais alors qui sont ces influenceurs?

Nasdas

C'est le deuxième créateur de contenus le plus suivi sur Snapchat. Nasdas, de son vrai nom Nasser Sari, s'est spécialisé dans la "vie des quartiers". Dans ses vidéos, le créateur de contenus suivi par 9 millions d'abonnés montre le quotidien du quartier Saint-Jacques de Perpignan, l'un des plus pauvres de France. Par exemple des matchs de football sur le terrain du coin, des blagues avec ses amis, ou quelques moqueries sur les personnes qu'il filme.

En parallèle, Nasdas a pris l'habitude de distribuer de l’argent en live ou dans la rue à des jeunes dans le besoin. "Je donne 1.000 euros à la première personne qui me reconnaît dans la rue", lance-t-il par exemple dans certaines vidéos. Un dispositif qui incite nombre de ses fans à traverser la France entière pour rencontrer l'influenceur... quitte à créer plusieurs mouvements de foule.

Il aime également accueillir des jeunes en difficulté qu'il loge dans une villa pour les filmer au quotidien, comme dans une téléréalité. Un concept qui interroge et suscite de nombreuses critiques. Plusieurs internautes l'accusent de se servir de la misère des jeunes pour faire de l'audience, ou de les humilier.

"C'est un influenceur qui accueille parfois des jeunes chez lui et qui redistribue de l'argent. Ca peut interroger", rappellait Arthur Delaporte auprès de Tech&Co en mai dernier. "C'est pour ça qu'on a voulu le faire venir à l'Assemblée. Pour comprendre son rapport aux plus jeunes, et interroger plus largement le modèle économique de mise en valeur de quelque chose qui peut avoir des côtés perturbants ou gênants."

Depuis, le créateur a annoncé, ce 8 juin, qu'il se retirait des réseaux sociaux pour des raisons familiales. Nasdas avait déjà fait une annonce similaire en juin 2024, avant de reprendre son activité.

AD Laurent

Cette fois-ci, AD Laurent ne devra pas s'expliquer devant ses "pupuces", le nom qu'il donne à sa communauté de plus d'1,8 million d'abonnés, mais bien devant les députés de la commission.

L'ancien candidat de téléréalité, qui s'est depuis reconverti dans le porno, l'influenceur est régulièrement accusé de tenir des propos misogynes et un contenu viriliste. La majorité de ces contenus tournent autour de la sexualité.

Dans de nombreuses vidéos et certains lives, il profère des propos obscènes, rabaisse les femmes et n'hésite pas à imiter des grognements canins lorsqu'une de ses invités, dont il est difficile de déterminer l'âge, danse ou réalise un strip-tease. En février dernier, une de ses animations en boite de nuit, où l'on peut voir des stripteaseuses mimer des fellations, a été particulièrement critiquée par les internautes.

Des contenus qui dérangent, donc, à tel point que son profil Tiktok a été supprimé par la plateforme, le 15 mai dernier, à la suite d’un signalement d'Aurore Bergé. La ministre déléguée chargé à l’Egalité femmes-hommes avait justifié sa décision en expliquant qu'AD Laurent diffusait "une vision déformée et toxique de la sexualité où la domination et la violence prennent le pas sur le respect et le consentement".

En 2020, son compte Instagram avait également été supprimé. Le créateur y diffusait régulièrement des vidéos où des jeunes femmes étaient invitées à faire des danses et strip-tease devant la caméra. Le vidéaste est par ailleurs visé par une plainte pour viols aggravés.

Manon et Julien Tanti

Autres candidats sommés de s'expliquer devant la commission, Julien et Manon Tanti. Installés à Dubaï, le couple d'influenceurs s'est fait connaître en participant à plusieurs émissions de téléréalité, dont Les Marseillais.

Depuis, le couple partage son quotidien dubaïote sur les réseaux sociaux. Ils sont respectivement suivis par 869.000 et 1,3 million d'abonnés sur Tiktok. Régulièrement, ils partagent des vidéos de leur quotidien, leurs disputes et leurs réconciliations. Mais surtout, ils n'hésitent pas à exposer à leurs millions d'abonnés leurs enfants de 7 et 4 ans.

"Cette exposition peut soulever une question parce que cela porte parfois atteinte à l'image de ces enfants", explique Arthur Delaporte à TF1 Info. "Tout ceci doit aussi nous interroger collectivement parce qu'il y a aussi des principes de protection de l'image des enfants sur les réseaux sociaux."

De son côté, Julien Tanti a récemment été condamné à une amende par la répression des fraudes pour des "pratiques commerciales trompeuses" liées au trading sur son compte Instagram et sa chaîne Telegram.

Alex Hitchens

Son nom a été ajouté à la liste à la dernière minute. Alex Hitchens sera également auditionné par la commission Tiktok à l'Assemblée nationale. Bien connu pour ses discours masculinistes, le créateur de contenu est suivi par 164.000 personnes sur Instagram et 370.000 sur Youtube.

Alex Hitchens s'autoproclame "coach en séduction". Sur son site, sa formation "L'art de la séduction 2.0" à 199,99 euros promet, par exemple, d'enseigner "les secrets de la psychologie féminine pour réussir vos interactions en rue".

Le vidéaste a souvent eu des propos misogynes, largement relayés sur les réseaux sociaux. Il considère par exemple que "si ta femme fait une bêtise, il faut la punir" , que les femmes, qui ont "la force d'un gamin de 11 ans" n'ont "rien à faire dans la rue après 22 heures" et prône la violence physique contre les femmes. Il a également participé à répandre la théorie du 'Body count', selon laquelle plus une femme a de partenaires sexuels, moins elle aurait de valeur.

Dans certaines vidéos, on peut également le voir embrasser des femmes dans la rue sans leur consentement ou les aborder avec insistance, malgré leurs nombreux refus. Il a également partagé une vidéo intitulée "comment dominer une femme", visionnée plus de 80.000 fois sur Youtube.

45 minutes pour répondre

Les cinq influenceurs controversés seront auditionnés à partir de ce mardi 10 juin, dès 16 heures. Ils auront 45 minutes pour répondre aux questions de la commission. Arthur Delaporte espère "que les auditions permettront de poser un diagnostic sur les effets réels de Tiktok sur les jeunes". Les députés devront également proposer des pistes de régulation pour pouvoir avancer et protéger les plus jeunes.

De leur côté, les représentants de Tiktok et des salariés chargés de la modération seront auditionnés le 12 juin prochain. Les conclusions définitives de la commission seront présentées au plus tard le 12 septembre prochain.

Salomé Ferraris