Violences contre les femmes: "Les viols sont encore tabous", s'insurge Pascale Boistard

Pascale Boistard, la secrétaire d'Etat au Droit des femmes - Thomas Samson - AF
Les femmes victimes de violences ne doivent "surtout pas hésiter à composer le 3919", numéro gratuit et anonyme d'écoute et d'orientation, a souligné Pascale Boistard lors d'une visite à une association de soutien aux femmes victimes de viol, à l'occasion de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. "La honte doit changer de camp", a-t-elle ajouté. "Il faut qu'on s'occupe de réprimer lourdement les auteurs des violences". Soulignant les dispositifs mis en place afin d'améliorer la prise en charge des victimes, Pascale Boistard a souligné qu'il y avait "encore beaucoup de travail à faire" car il subsiste des "disparités sur des parties de territoires".
4.000 appels/an pour agression sexuelle ou viol
Pascale Boistard était accueillie par le Collectif féministe contre le viol (CFCV), qui gère un numéro d'appel destiné aux femmes victimes de viol (le 0800 05 95 95) et est partenaire du 3919, autre numéro gratuit traitant de toutes formes de violences envers les femmes.
En 30 ans d'écoute des femmes victimes, le CFCV, qui reçoit environ 4.000 appels par an pour viol ou agression sexuelle, a le sentiment que les choses "progressent", a souligné sa présidente, Emmanuelle Piet.
"La première année, il y avait plus de la moitié des appels pour des viols subis il y a 20, 30, 40 ans. Une dame de 80 ans qui disait 'j'ai été violée à 4 ans, jamais je n'en ai parlé". Aujourd'hui, "les femmes parlent plus tôt".
10% seulement des femmes osent porter plainte
Elle a cependant exprimé devant la ministre plusieurs inquiétudes, notamment sur la grande part de viols requalifiés par la justice en agressions sexuelles et donc jugés devant des tribunaux correctionnels, où les peines encourues sont moins lourdes qu'aux assises. "Pour une victime ça n'est pas acceptable".
Emmanuelle Piet a également souhaité que les soins pour les femmes victimes de viol soient pris en charge à 100% par la Sécurité sociale, comme c'est déjà le cas pour les mineures. 84.000 femmes se sont déclarées victimes de viol ou tentative de viol en 2014, dont seulement 10% portent plainte, selon le secrétariat d'Etat aux droits des femmes.
Interpellée à l'Assemblée nationale par une députée qui rappelait des "chiffres glaçants" comme le fait que 19% des homicides ont lieu au sein du couple et qu'une femme sur 7 a déjà subi un viol la ministre a rappelé qu'il était "essentiel de lever le silence". "Les violences sexuelles et les viols sont encore tabous parce qu'ils sont le fait de monsieur tout le monde, de proches; parce que les femmes sont culpabilisées, parce que ce sujet fait peur", a regretté mercredi la secrétaire d'Etat aux Droits des femmes.