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Société

Repas distribués aux migrants: la justice donne raison aux associations

Distribution de repas aux migrants hébergés dans un camp de Grande-Synthe, dans le nord de la France après la fermeture de la Jungle de Calais, le 21 mars 2017

Distribution de repas aux migrants hébergés dans un camp de Grande-Synthe, dans le nord de la France après la fermeture de la Jungle de Calais, le 21 mars 2017 - PHILIPPE HUGUEN, AFP

Le tribunal administratif a annulé les arrêtés de la mairie de Calais, visant à interdire les distributions de repas dans certains lieux.

Les associations d'aide aux migrants ont remporté un nouveau round devant la justice dans leur bras de fer avec la mairie de Calais: le tribunal administratif a annulé les arrêtés visant à interdire les distributions de repas dans certains lieux.

Dans son jugement rendu mercredi, le tribunal administratif de Lille ordonne que "l'exécution des arrêtés (...) et décisions (...) interdisant la distribution de repas sur des emplacements situés dans la zone industrielle des Dunes et le Bois Dubrulle est suspendue à compter de la notification de la présente ordonnance".

En début de semaine dernière, dix associations pro-migrantes avaient déposé un "référé liberté" au nom de la "liberté d'aller et venir et de manifester" contre des arrêtés pris début mars par la mairie (Les Républicains). L'audience avait eu lieu jeudi dernier.

Second revers devant le tribunal

Ainsi, le tribunal considère que "la maire de Calais a porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’aller et venir, à la liberté de réunion" et a fait obstacle "à la satisfaction par les migrants de besoins élémentaires vitaux au droit à ne pas subir des traitements inhumains et dégradants (...)".

Certes les juges disent "comprendre le souhait de la commune, soucieuse de préserver ses habitants et leur cadre de vie, isolée et démunie face à cette problématique complexe, de ne pas se retrouver dans la situation éprouvante qu’elle a déjà connue" avec plus de 6.000 migrants qui étaient présents dans l'ex-"Jungle", démantelée à l'automne. Mais les mesures prises par la mairie "ont pour effet de priver une population en très grande précarité d’une assistance alimentaire vitale" et "ne sont ni adaptées, ni nécessaires, ni proportionnées au regard du but réellement poursuivi".

"Déni de réalité"

Il s'agit du second revers en quelques semaines devant le tribunal administratif pour la mairie de Calais qui cherche coûte que coûte à éviter tout point de fixation de migrants dans leur ville. Ainsi, début février, la municipalité n'avait pas hésité à utiliser une benne à ordures pour bloquer le passage de douches modulaires devant un local du Secours catholique dans le centre de la cité portuaire. Cette décision avait déjà été retoquée par le tribunal administratif de Lille.

Dès l'annonce de la décision jeudi, les associations ont aussitôt fait part de leur satisfaction, alors que les distributions de repas n'ont jamais cessé, étant organisées en dehors des périmètres concernés par les arrêtés municipaux.

Cette décision a ainsi été saluée par Vincent De Coninck, chargé de mission au Secours Catholique. "On est satisfaits que le juge ait fait droit à notre demande de respect de la dignité humaine. Dans notre république on n'a pas à être exposé à des traitements inhumains et dégradants", a-t-il dit.

"Continuer de nier la présence des exilés et faire comme si on pouvait avoir zéro dispositif d'accueil nous parait un déni de réalité", a-t-il ajouté.

"Soulagement"

François Guennoc de l'Auberge des migrants ne s'est pas dit "surpris" par la décision. "Il y avait des choses pas régulières dans ces arrêtés. Notre soucis est de trouver une solution en accord avec les autorités. On va refaire une demande pour trouver un endroit où ils seront d'accord pour qu'on puisse faire des distributions de repas, rencontrer des mineurs...", a-t-il dit à l'AFP.

Une autre association active, Utopia 56, a fait part de son "soulagement", estimant à 400 le nombre de migrants présents à Calais. Enfin, le défenseur des droits estime que "cet arrêté poursuit en réalité un objectif étranger à la sauvegarde de l’ordre public et vise à interdire les distributions humanitaires de nourriture aux migrants".

Une conférence de presse de la maire de Calais Natacha Bouchart est attendue en début d'après-midi.

G.D. avec AFP