Ni cinéma, ni sortie: face au coronavirus, ces Français ne prennent plus aucun risque

Une rue déserte à La Grand-Combe, dans le Gard (photo d'illustration) - Pascal Guyot-AFP
Ils ne sont pas malades, n'ont pas été en contact avec une personne infectée par le coronavirus mais ont décidé de se mettre en retrait. Alors qu'Emmanuel Macron a demandé jeudi soir à la population française de limiter "au strict nécessaire" ses déplacements, appelant à la "responsabilité" de chacune et chacun, certains ont pris les devants.
Pour ces Français, la prudence est de mise. Ils considèrent que la seule manière de lutter contre le coronavirus est de rester chez soi à l'exemple de l'Italie, qui a étendu le confinement à l'ensemble de ses habitants.
- Plus de musée, de cinéma ou de concert pour Alexandra*
C'est le cas d'Alexandra*, une Parisienne de 30 ans en recherche d'emploi, qui a radicalement changé ses habitudes de vie depuis deux semaines et le début de l'expansion du coronavirus en France. Plus de musée, de cinéma ou de concert, elle a même décidé de ne plus se rendre à la salle de sport à laquelle elle venait pourtant de s'inscrire.
"Tous les endroits confinés, je n'y vais plus", témoigne-t-elle pour BFMTV.com. "Vendredi dernier, je me suis rendue à un anniversaire dans un bar. C'était un petit espace, on était nombreux, on a dansé. J'ai évité au maximum de faire la bise. J'ai essayé de ne pas trop penser au coronavirus, mais j'ai dû me laver les mains 50 fois. Je me suis dit que c'était la dernière fois que je participais à ce genre de soirée."
S'il lui arrive encore d'emprunter les transports en commun, notamment pour ses rendez-vous médicaux, Alexandra ne sort jamais de chez elle sans gel hydro-alcoolique et se débrouille pour ne rien toucher. "J'ouvre les portes avec mes coudes." Pour faire ses courses, elle a remplacé les paniers des magasins par ses propres sacs. Adepte des livraisons à domicile, c'est dorénavant terminé. "Je ne sais pas avec combien de personnes le livreur a été en contact, ni ce qu'il a pu toucher." Un ami devait lui rendre visite chez elle, ce sera plutôt dans un café. Et encore, la question n'est pas tranchée.
Si cette jeune femme assure qu'au début de la crise, elle ne voulait pas "céder à la panique", elle estime que maintenant, il lui est important de modifier ses gestes du quotidien "par précaution". Notamment pour protéger ses proches. Ainsi, il n'est plus question pour elle d'aller rendre visite à sa mère, une sexagénaire qui a eu deux embolies pulmonaires.
- Plus aucune visite chez Henriette* et sa mère
Pour cette dernière, Henriette*, une retraitée de 66 ans qui réside à Noisy-le-Grand, en Seine-Saint-Denis, la priorité est de protéger sa propre mère, une femme de 93 ans qui vit avec elle. "Nous appliquons les mêmes recommandations que dans les Ehpad", raconte-t-elle à BFMTV.com. Toutes les visites dans les établissements pour personnes âgées sont suspendues.
Ce qui signifie plus aucun visiteur à domicile, y compris sa propre sœur qui travaille avec des enfants. Fini les visites hebdomadaires d'un couple d'amis, le passage du coiffeur pour la nonagénaire et le coup de main de l'aide ménagère.
Si elle a conservé ses rendez-vous auprès de son kinésithérapeute - elle s'y rend en taxi pour éviter les transports en commun - elle a tiré un trait sur ses sorties parisiennes. "Sans tomber dans la paranoïa, j'essaie de supprimer autant que faire se peut toutes les sorties qui peuvent présenter un risque. Cela implique des mesures draconiennes même si je sais que le risque zéro n'existe pas."
Pour le ravitaillement, Henriette privilégie le marché et évite les heures les plus fréquentées. Pour le passage au supermarché, c'est le moins possible. La dernière fois, "j'ai gardé mes gants pour pousser le chariot". Elle n'exclut cependant pas d'aller prendre l'air avec sa mère si la météo le permet. Mais seulement toutes les deux.
"Les sorties me manquent et le temps est un peu long. C'est vrai que le climat est lourd mais je sais que c'est nécessaire pour ma mère. Je prends ça comme du repos forcé."
- Adel* n'ira pas voter
Adel*, un Parisien de 41 ans, a reçu les annonces du président de la République avec soulagement. "Rester enfermé, je n'attendais que ça", confie ce webmaster à BFMTV.com. Car Adel est le père d'une petite fille de 16 mois. Il se dit très inquiet pour elle. "Ma plus grande peur, c'est qu'elle attrape le virus ou que je lui passe." Il évoque le cas de plusieurs enfants hospitalisés à Strasbourg. Bien que selon le rapport de la mission conjointe Chine-OMS publié fin février, seulement 2,4% des plus de 75.000 cas alors confirmés en Chine concernaient des individus de moins de 18 ans. Une très faible part de ces mineurs avaient développé une forme grave (2,5%) ou critique (0,2%) de la maladie.
La semaine prochaine et les suivantes, ce sera donc télétravail pour lui - la crèche de son bébé étant contrainte de fermer. "Je voulais télétravailler dès lundi dernier pour éviter tout risque de contamination mais ce n'était pas encore à l'ordre du jour, sachant que mon travail, je peux le faire partout dans le monde." Il n'ira plus au café en bas de chez lui où il avait ses habitudes et envisage déjà de mettre entre parenthèses sa vie sociale.
"Je ne vais plus sortir de la maison et éviter tous les endroits publics. Il faudra bien faire des courses mais je vais limiter mes déplacements au strict minimum. Et dimanche, je n'irai pas voter. La situation est critique, il ne faut pas jouer avec ça. Il ne faut pas pour autant paniquer, mais la peur est une bonne alerte."
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