Maternité d'Orthez: le recrutement de l'anesthésiste en question

La maternité d'Orthez doit être fixée ce vendredi sur son avenir. L'anesthésiste belge de 45 ans, mise en examen après la mort d'une patiente de 28 lors d'un accouchement, a passé une première nuit en détention. - Gaizka Iroz - AFP
Les questions restent nombreuses à la maternité d’Orthez, ce vendredi. Une anesthésiste belge de 45 ans a été mise en examen pour "homicide involontaire", jeudi, après la mort d’une patiente de 28 ans lors de son accouchement sous anesthésie générale. Elle a passé sa première nuit en détention provisoire.
Un "problème pathologique d'alcool"
Lors de son interrogatoire à la gendarmerie, la médecin, qui s’est présentée avec taux d’alcoolémie de 2,40 gramme par litre de sang, a reconnu un "problème pathologique d’alcool".
S'il n'a pas été clairement établi si l'accusée était ivre au moment des faits, comment a-t-elle pu, dans ces conditions, se voir confier une telle responsabilité?
Que savait l’établissement?
Anesthésiste depuis 1999, la quadragénaire, qui exerçait à titre libéral, avait été recrutée depuis moins de deux semaines à la maternité d’Orthez. Face à la pénurie subie par cette profession difficile, ces médecins sont de plus en plus souvent recrutés via des boîtes d’intérims. Quand ils débutent leurs missions, il arrive que leurs employeurs ne savent rien de leur cursus.
En ce qui concerne l’anesthésiste belge, "la question est de savoir quel était le niveau d’information de l’employeur", a expliqué à BFMTV le procureur de la République de Pau, Jean-Christophe Muller. Aux enquêteurs de répondre, désormais.
La faute à un désert médical.
S'exprimant au micro de RTL, Yves Darrigrand, le maire d'Orthez, a tancé "un problème dramatique de démographie médicale". Un manque de personnel "absolument catastrophique", a insisté l'élu, en précisant que l'établissement en question voyait "défiler des gens de toutes nationalités".
"La tournure dramatique de l'événement" tient au fait qu'"il n'y avait pas d'anesthésiste de remplacement et qu'il fallait que ce soit elle qui fasse le boulot, et qu'elle était la seule à pouvoir le faire" a ajouté le maire d'Orthez, qui préside par ailleurs le conseil de surveillance de l'hôpital d'Orthez.
Pas de "conclusion hâtive"
Si cette femme est aujourd’hui soupçonnée "d’homicide involontaire aggravé par la violation manifeste et délibérée d'une obligation de prudence et de sécurité", passible de cinq ans d'emprisonnement, l'une de ses avocates a mis en garde contre toute "conclusion hâtive", auprès de l'Agence France-Presse (AFP).
"Ma cliente assumera ses responsabilités par rapport aux faits qu'elle a reconnus, mais elle n'est pas seule responsable, il existe des zones d'ombre que l'enquête élucidera", a prévenu Me Florence Hegoburu.
Plusieurs manquements ciblés
Pour déterminer dans quelles conditions se sont déroulées cette anesthésie générale, les enquêteurs vont se pencher sur deux pistes. Tout d’abord, "l'utilisation des produits anesthésiants et de respiration artificielle semblent non conformes", a-t-il été indiqué par le procureur de Pau, Jean-Christophe Muller.
La seconde piste, sans qu’elle ne soit en l’état forcément liée avec la première, concerne donc l’état dans lequel se trouvait l’anesthésiste au moment du drame. Ce soir-là, l'équipe médicale avait "constaté un comportement bizarre, sans savoir à quoi il se rattachait". "Des difficultés d'expression, de compréhension et des problèmes de réactivité" ont ainsi été énumérés par le procureur.
La maternité fixée sur son sort ce vendredi
En marge de ce volet judiciaire, la maternité d’Orthez, dont l’activité a été suspendue depuis l’affaire, doit savoir ce jour si elle va définitivement fermer ou non. L’établissement est en effet en sursis depuis plusieurs mois, la faute à un nombre insuffisants de gynécologues-obstétriciens et de grandes difficultés pour en recruter.
Dans ce volet, l’avenir s’assombrit pour les employés de cet établissement. "Je ne me vois absolument pas rouvrir cette maternité", a jeudi sur France Bleu Béarn le directeur de l'Agence régionale de santé (ARS) d'Aquitaine, Michel Laforcade. Réponse ce vendredi.