"Nuit debout" à Paris: de "l'apéro chez Valls" aux violences

Le mouvement citoyen des "Nuits Debout" a essaimé ce samedi soir dans près de 60 villes, avec notamment une tentative de manifestation aux abords du domicile parisien de Manuel Valls, à l'issue d'une nouvelle journée de mobilisation contre la loi Travail, marquée par une moindre affluence et des violences.
Après une sixième journée d'action en un mois, pour demander le retrait de ce projet, plusieurs milliers de personnes ont entamé une "Nuit debout", mouvement né il y a dix jours à Paris et dépassant la seule opposition à la loi travail.
"Quelque chose est en train de se lever", a lancé à Paris face à la foule l'économiste Frédéric Lordon.
"Apéro chez Valls" et gaz lacrymogènes
En fin de soirée, plusieurs centaines de personnes ont décidé d'aller "prendre l'apéro chez Valls", convergeant vers le domicile parisien du Premier ministre, actuellement en visite officielle en Algérie, avant d'être bloquées par les forces de l'ordre qui ont utilisé des gaz lacrymogènes. "Paris, debout, soulève-toi", scandaient les manifestants.
"Ces gars-là, ils n'ont rien à voir avec nous"
De bon enfant au départ, la situation s'est tendue, quelques dizaines de personnes jetant des projectiles sur le commissariat du XIe arrondissement, action visiblement désapprouvée par la plupart des manifestants. Plus tard, après la dispersion, une dizaine de vitrines de banques ou d'assureurs ont été brisées à coups de pied ou de barre de fer par des casseurs visage masqué.
Place de la République, l'un des membres de Nuit debout soufflait "ces gars-là, ils n'ont rien à voir avec nous". En fin de nuit, une voiture a même été incendiée, toujours aux abords de la place de la République, a pu constater l'envoyé-spécial de BFMTV.
Huit interpellations
A la suite de ces événements, huit personnes ont été interpellées et placées en garde à vue dans la nuit de samedi à dimanche, après des incidents à Paris, en marge du rassemblement "Nuit debout", a annoncé dimanche la préfecture de police de Paris (PP).
Ces personnes ont été arrêtées pour des "jets de projectiles, port d'arme prohibé, vol par effraction, dégradations et dégradations par incendie", a précisé la préfecture.
Nantes, Tulle, Reims, Toulouse...
Après avoir manifesté dans la journée, Gérard, 62 ans, intéressé par "ces types de mouvements citoyens", "en dehors des partis", a rejoint la cinquième "Nuit debout" à Nantes et ses quelque 300 participants, ses barnums, ses banderoles, ses prises de parole.
"Occuper la place de nuit, c'est aller contre le couvre-feu intellectuel. C'est aussi le seul temps restant dans nos vie modernes pour parler des problèmes de notre société. Et rester debout, c'est ne pas demeurer assis, courbé, prostré", fait observer à Reims Antoine Farcette, 23 ans, étudiant en droit.
A Tulle, en Corrèze, fief du chef de l'Etat, une centaine de personnes se sont rassemblées. "J'étais là le 6 mai 2012, ce n'est pas pour la politique qu'il mène qu'on a élu François Hollande", explique Stéphanie, une quadragénaire venue participer aux débats.
A Marseille, on fait "tourner le micro"
A Toulouse, les "Nuit Debout" se sont retrouvées sur la place du Capitole, tandis qu'à Marseille, le mot d'ordre était de ne pas rentrer chez soi et de "faire tourner le micro" au sein de ce mouvement qui s'assume sans leader.
Dans la journée, les autorités ont recensé 120.000 manifestants dans toute la France, dont 18.000 à 20.000 à Paris (110.000 selon les organisateurs dans la capitale). Loin des 390.000 à 1,2 million de personnes, selon les sources, du 31 mars. La mobilisation avait lieu pour la première fois un week-end, en période de vacances scolaires. Une nouvelle mobilisation est prévue le 28 avril.