Manifestation de céréaliers ce mardi à Paris

Quelque 5.000 céréaliers juchés sur un millier de tracteurs sont attendus ce mardi à Paris, où ils manifesteront leur angoisse devant la chute de leurs revenus dans le sillage du recul des cours mondiaux. /Photo d'archives/REUTERS - -
par Elizabeth Pineau
PARIS (Reuters) - Quelque 5.000 céréaliers juchés sur un millier de tracteurs sont attendus ce mardi à Paris, où ils manifesteront leur angoisse devant la chute de leurs revenus dans le sillage du recul des cours mondiaux.
Après les maraîchers et les producteurs de lait il y a quelques mois, c'est au tour des producteurs de blé, soja et autre maïs, ce que l'on appelle les "grandes cultures", de réclamer l'aide de l'Etat.
Déjà en baisse en 2008, leurs revenus ont chuté de 51% en 2009, "au-dessous du niveau historiquement bas de 2005", écrit le ministère de l'Agriculture dans une note de synthèse.
Véritables chefs d'entreprises nécessitant de lourds investissements, les céréaliers craignent aussi le démantèlement, à l'horizon 2013, de la Pac, dont ils sont les premiers bénéficiaires.
Bruno Haas, qui cultive 460 hectares en Picardie avec deux membres de sa famille, sera au nombre des manifestants conviés à Paris par les fédérations régionales des syndicats d'exploitants agricoles (FRSEA), avec le soutien de la Fédération nationale (FNSEA).
"Il y a des exploitations qui vont se retrouver dans le rouge", a expliqué à Reuters dans sa ferme du XVIIIe siècle cet exploitant de 57 ans. "C'est assez inhabituel dans la région".
Selon les chiffres du ministère, le prix des céréales en France a reculé de 24% en 2009 dans le sillage des cours mondiaux.
La colère des céréaliers de France, dont la productivité est l'une des meilleures du monde, a été ravivée par la hausse des coûts de production, le durcissement des normes environnementales et la redistribution, effective cette année, de subventions européennes en faveur des éleveurs, notamment.
Selon les syndicats, le manque à gagner pour les céréaliers sera compris entre 80 et 100 euros l'hectare.
"GROSSE INQUIÉTUDE"
Ces derniers avaient déjà manifesté leur colère à plusieurs reprises l'an dernier, notamment avenue des Champs-Elysées.
La préfecture de police a interdit cette fois l'accès à l'avenue aux manifestants, qui seront cantonnés dans l'est parisien autour des places de la République et de la Nation.
Pour la seule région Nord-Pas-de-Calais, cinq bus et une trentaine de tracteurs prendront mardi matin la direction de pour Paris.
Parmi eux, Christophe Polin, agriculteur et membre de la FDSEA du Pas-de-Calais, partira à trois heures du matin.
"Il faut être motivé pour faire dix heures de tracteur pour aller à Paris. Cela exprime un gros malaise, une grosse inquiétude", a-t-il dit à Reuters.
"Tout le monde agricole est plongé dans la même crise, les producteurs de lait il y a quelques mois, les céréaliers aujourd'hui. Le problème est le même : prix des produits au ras des pâquerettes et des charges franco-françaises que l'on connaît", a-t-il expliqué.
Dans un contexte tendu, les syndicats agricoles ont semblé apprécier le volontarisme affiché par le ministre de l'Agriculture, Bruno Le Maire, et le président Nicolas Sarkozy.
Lors d'une visite dans l'Essonne début avril, le chef de l'Etat s'est engagé à "ne pas laisser tomber" les paysans.
Mais pour Christophe Polin, "ce sont des belles paroles déjà entendues, maintenant on voudrait des actes, pas des paroles".
Nicolas Sarkozy a aussi rappelé la nécessité d'agir dans un cadre européen, réitérant que la France était prête à accepter une diminution des subventions agricoles "pour peu qu'à l'inverse on accepte la préférence communautaire et des prix qui garantissent au producteur au moins son prix de revient".
A l'heure de la renégociation de la Pac, la France, premier bénéficiaire du système, doit faire face à la farouche opposition d'autres pays comme la Grande-Bretagne.
La manifestation de mardi survient à la veille d'une visite à Paris du commissaire européen à l'Agriculture, Dacian Ciolos, et à quelques semaines du débat au Parlement français de la Loi de modernisation agricole.
Avec Gus Trompiz, Valérie Parent et Pierre Savary à Lille, édité par Yves Clarisse