BFMTV
Société

"Les dons ont baissé de 30%": en difficulté financière, la Fondation Abbé Pierre change officiellement de nom

placeholder video
Après la série de révélations accusant l'Abbé Pierre d'agressions sexuelles, la Fondation Abbé Pierre a décidé de changer de nom et d'identité visuelle. Lors d'une conférence de presse ce lundi 17 mars, la Fondation pour le logement des défavorisés a fait savoir qu'elle avait perdu 30% des dons de particuliers en un an.

"C'est un nouveau chapitre qui s'ouvre". Plus de 30 ans après sa création, la Fondation Abbé Pierre veut poursuivre son action sociale sous un autre nom, au lendemain de la série de révélations accusant son fondateur d'agressions sexuelles. 18 ans après sa mort, l'Abbé Pierre est visé depuis juillet dernier par 33 accusations pour des faits de violences sexuelles datant des années 1950 aux années 2000.

"On change de nom, mais pas de combat", a martelé la Fondation pour le logement des défavorisés à l'occasion d'une conférence de presse organisée ce lundi 17 mars à Paris, au cours de laquelle elle a dévoilé sa nouvelle identité visuelle.

"Aujourd'hui on est plus en capacité de se présenter devant le public avec le nom de l'Abbé Pierre, mais on reste la Fondation pour le logement des défavorisés", a déclaré le Directeur délégué général de la Fondation Christophe Robert. Des révélations en cascade qui n'ont pas manqué d'entacher l'image de la Fondation qui œuvre contre le mal-logement des personnes défavorisées.

"Le nom, pas un truc juste pour faire beau"

Christophe Robert reconnaît que les révélations en cascade qui ont eu lieu depuis l'été dernier ont nettement "nui" à l'image de la Fondation. À tel point que les dons de particuliers - qui représentent plus de la moitié des ressources de la fondation - ont baissé de 30% entre juillet de décembre 2024. Des pertes qui s'élèvent à un peu plus de 5 millions d'euros.

"Bien sûr que l'Abbé Pierre représentait énormément pour une partie de nos donateurs... pour nous aussi. Vous n'imaginez pas la violence que cela a représenté... la colère, la tristesse...", a encore lancé le directeur de la structure sociale, avant de s'interroger: "mais est-ce que cela doit pénaliser notre action? Non, il faut continuer."

Tous les soirs dans Le Titre à la Une, découvrez ce qui se cache derrière les gros titres. Céline Kallmann vous raconte une histoire, un récit de vie, avec aussi le témoignage intime de celles et ceux qui font l'actualité.
L'abbé Pierre, "un prédateur sexuel": de nouvelles accusations accablantes
20:37

"Nous étions en progression constante depuis des années" mais aujourd'hui, "beaucoup de donateurs nous disent être en situation d'attentisme. Ils nous remercient pour avoir fait preuve de transparence, mais ils nous disent 'on attend de voir ce que vous allez faire'. C'est pour cela que c'est très important pour nous le nom. C'est pas un truc juste pour faire beau. On espère vraiment que la clarification d'aujourd'hui fonctionne."

Pour l'instant, la partie des dons liée au "mécénat, legs et assurance vie" n'a pas baissé, ce qui permet à la fondation de se maintenir à flots. La Fondation utilise pour l'instant ses réserves pour compenser les pertes mais elle affirme que cette situation ne saurait durer éternellement. "Cette partier n'a pas baissé mais elle pourrait baisser à terme".

"Une évolution mais pas une révolution"

À en croire Christophe Robert, ce changement d'identité est "une évolution" mais "pas une révolution", car la fondation "reste solide sur ses fondamentaux et son combat: "ses équipes sont toujours là, elles n'ont d'ailleurs jamais arrêté de travailler, même pendant les jours les plus difficiles que nous venons de traverser."

"Nous avons décidé de retirer la mention du nom de l'Abbé Pierre par respect pour les victimes, par respect pour les bénévoles et les salariés, par respect pour les militants du mal-logement et pour ne pas entacher l'avenir de notre fondation, qui, je le rappelle, n'agit que grâce à la générosité du public", a-t-il encore détaillé devant les journalistes.

Lors de ce point presse, Christophe Robert a également lancé un appel à "se mettre en ordre de marche": "On a besoin de vous, de tout le monde, pour mener ce digne et nécessaire combat". "On reste tournés vers un seul objectif: lutter sans relâche contre toutes les formes d'exclusion et le mal-logement. On continue notre combat coûte que coûte et nos besoins sont immenses".

Lors d'une assemblée générale extraordinaire en janvier dernier, les représentants des quelque 300 structures du mouvement Emmaüs ont elles aussi voté à 91% en faveur du retrait de la mention "fondateur abbé Pierre" du logo.

Enfin, le responsable de la Fondation pour le logement s'est dit "très préoccupé" par l'état de santé des structures associatives en France, de manière générale. " Les associations sont en difficulté aujourd'hui. Est-ce qu'on va pouvoir continuer à aider à ce niveau-là?", s'est-il interrogé, évoquant la baisse des subventions locales, nationales ainsi que la hausse des coûts fixes.

Au cours de cette conférence, la Fondation a rappelé que plus de 4 millions de personnes étaient mal-logées à ce jour en France, dont 350.000 sans-abris, ce qui représente une augmentation de plus de 140% depuis 2012.

Jeanne Bulant Journaliste BFMTV