Interdiction de fumer sur les plages: mission impossible pour les élus du littoral?

Une population multipliée par près de dix l'été, mais toujours deux policiers municipaux pour assurer la sécurité. Pas question pour Dominique Guillou, maire de la commune de Névez, dans le Finistère, de faire appliquer la loi qui bannit la cigarette de nouveaux espaces.
Depuis le 29 juin, l'interdiction de fumer a été élargie et concerne de nouveaux espaces. À proximité des établissements scolaires, dans les parcs et jardins publics ou encore sur les plages, durant la saison balnéaire. "Là où il y a des enfants, le tabac doit disparaître", justifiait fin mai Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles, en annonçant la mesure.
Deux policiers pour 20.000 personnes
Mais selon Dominique Guillou, l'État n'a pas donné de moyens supplémentaires aux communes, notamment en période estivale. "Névez c'est une commune avec 2.700 habitants l'hiver, mais on passe à 20.000 l'été, avec le même effectif de police municipale". Deux agents, et Névez n'a pas les moyens d'embaucher davantage.
"C'est pas possible. Ça ferait un coût de 70.000 euros si je devais embaucher deux personnes supplémentaires. C'est 70.000 euros que je ne pourrais pas rebasculer au niveau investissement", explique le maire.
Il n'est pas le seul élu du littoral à se déclarer impuissant à faire appliquer la loi anti-tabac. Le même scepticisme se retrouve de la Picardie à l'île de Ré à en croire la presse locale.
Même les pionniers de la lutte contre le tabagisme ne sont pas forcément convaincus. De nombreuses communes ont en effet déjà mis en œuvre de manière volontaire, des "espace sans tabac". Plus de 7.000 aires de ce genre, instaurées par arrêté municipal, existaient déjà sur le territoire national, notamment avec l’appui de la Ligue contre le cancer.
"Un peu excessive"
Dans la commune camarguaise du Grau-du-Roi. Robert Crauste, médecin et maire, a ainsi contribué à l'installation d'une plage sans tabac dans sa ville dès 2019. Mais il juge la généralisation des espaces sans tabac induite par le décret publié le 28 juin, "un peu excessive".
"Nous avons 18 kilomètres de plages. Nous ne pouvons pas envoyer nos policiers municipaux, qui répondent déjà à leurs tâches, pour contrôler si les gens fument. On compte sur l'adhésion à la mesure", déclare-t-il sur RTL.
L'Association des maires de France (AMF) faisait savoir dès l'annonce de la mesure qu'elle souhaitait que "le contrôle de cette interdiction incombe à l'État".
"Nous partageons pleinement l’objectif du gouvernement. Le tabac tue, et nous soutenons toutes les démarches pour réduire sa consommation", expliquait Murielle Fabre, secrétaire générale de l’AMF dans les colonnes de la Dépêche du Midi. Cependant, "la généralisation d’une interdiction nationale doit respecter la liberté communale et ne pas entraîner de transfert de charge implicite".
Selon le ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles, avec 75.000 décès par an, le tabac est la première cause de mortalité évitable en France.