Eric Zemmour devant la justice pour propos racistes

Eric Zemmour a dénoncé une forme d'inquisition digne du Moyen Âge, devant le tribunal de Paris où il est poursuivi pour diffamation et discrimination raciale. Le chroniqueur a répété à l'audience que les Français issus de l'immigration sont plus contrôlés - -
PARIS (Reuters) - Le chroniqueur Eric Zemmour a dénoncé mardi une forme d'inquisition digne du Moyen Âge, devant le tribunal de Paris où il est poursuivi pour diffamation et discrimination raciale.
Il a répété à l'audience que les Français issus de l'immigration sont plus contrôlés que les autres "parce que la plupart des trafiquants sont noirs et arabes", comme il l'avait dit le 6 mars 2010 sur l'antenne de Canal+.
Sur France Ô, il avait déjà assuré que les employeurs "ont le droit" de refuser des postulants arabes ou noirs.
SOS racisme avait lancé des poursuites, jugeant que le polémiste ciblait certaines populations. "En gros, il considère que les noirs et les arabes devraient être suspectés en tant que tels", dit l'avocat de l'association, Patrick Klugman.
D'autres mouvements antiracistes, comme le Mrap, la Licra et l'Union des étudiants juifs de France (UEJF), se sont portés partie civile devant le 17e chambre correctionnelle, où le procès doit durer trois jours.
Pour les associations, les propos du journaliste sont d'autant plus graves qu'Eric Zemmour anime ou participe à plusieurs émissions de radio et de télévision qui ont une forte audience.
"Je ne vois pas un seul instant qu'un tribunal qui a commencé à condamner le ministre de l'Intérieur Brice Hortefeux (pour injure raciale) puisse se déjuger", a dit à Reuters Pierre Mairat, avocat du Mrap.
Accueilli au tribunal par une nuée de caméras, Eric Zemmour a réfuté devant la cour être un provocateur cherchant à attirer l'attention et s'en est pris aux parties civiles.
"Moi, j'essaie de décrire la vérité telle qu'elle est et la vérité n'existe pas pour ces gens-là (...) C'est la logique de l'inquisition, nous sommes au Moyen Âge", a-t-il dit.
UNE PAROLE LIBRE ?
Seules une dizaine de personnes, sur les 30 espérées par la défense, ont accepté de témoigner en faveur du chroniqueur, qui a reçu le soutien de quelques personnalités, dont certaines de gauche, au nom de la liberté d'expression.
L'avocat de SOS Racisme a tenté, sans succès, de faire écarter des débats une lettre de l'ex-ministre de l'Intérieur de gauche Jean-Pierre Chevènement, sollicité par la défense.
Renonçant à témoigner, celui-ci écrit néanmoins au tribunal qu'il suffisait de compulser les listings de la délinquance pour constater que 50% des noms des jeunes y ont une consonance maghrébine ou africaine.
Eric Zemmour a vu dans cette tentative pour "faire taire" un ancien ministre de l'Intérieur la preuve de la "logique inquisitoriale" des associations qui "utilisent un vocabulaire qu'elles imposent à la société".
Il avait auparavant dénoncé dans la presse une "ambiance de maccarthysme, de politiquement correct".
"C'est ridicule", a répliqué Dominique Sopo, président de SOS Racisme, soulignant que le journaliste avait de multiples occasions de se défendre lors de ses chroniques.
"La liberté d'expression, nous y sommes très attachés. Mais ce n'est pas vouer à la vindicte publique des groupes de personnes", a-t-il dit aux journalistes.
Dans une lettre au président de la Licra, Eric Zemmour avait regretté que ses propos aient "pu heurter", tout en les maintenant. Il a dit à la barre qu'il ne s'agissait pas d'une lettre d'excuses, mais d'une lettre d'explication.
Les statistiques ethniques sont interdites en France.
Le journaliste a cependant évoqué à l'appui de sa démonstration des enquêtes de journaux, celle d'une commission du Sénat, les propos d'un sociologue visitant les prisons ou une étude du ministère de la Justice.
Le chroniqueur a souligné qu'il s'appelait Zemmour, "le nom d'une bande juifs pieds-noirs" célèbre dans le milieu du banditisme parisien des années 60, ce qui lui aurait valu bien des contrôles dans les aéroports.
Selon lui, le fait que la plupart des trafiquants soient issus de "l'immigration la plus récente" est une réalité policière incontournable.
"Je trouve scandaleux qu'on mette en cause la police républicaine", a-t-il dit, soulignant être intervenu sur Canal+ parce que son interlocuteur affirmait que certains immigrés étaient contrôlés 17 fois par jour.
Gérard Bon, édité par Gilles Trequesser