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Société

Cantat "a le droit de chanter, on a le droit d'interroger les spectateurs", plaide une militante féministe

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Raphaëlle Rémy-Leleu, porte-parole d''Osez le féminisme", est intervenue ce jeudi soir sur notre antenne depuis les abords du Zénith de Paris. Un mouvement de protestation s'est formé près de cette salle de concerts où Bertrand Cantat se produit ce soir.

C'est la seule date parisienne de la tournée de l'ancien leader et chanteur de Noir Désir, condamné en 2004 pour le meurtre de Marie Trintignant. Les concerts de Bertrand Cantat ont suscité de nombreux remous ces dernières semaines et celui du Zénith de Paris, ce jeudi soir, n'a pas fait exception. Tandis que des militantes et des militants féministes s'étaient retrouvés près de la salle de concerts pour interpeller les spectateurs se rendant à l'événement, Raphaëlle Rémy-Leleu, porte-parole de l'association "Osez le féminisme", a répondu aux questions de Ruth Elkrief. 

"Nous ne verrouillons pas le Zénith"

Si elle a reconnu qu'il y avait "moins de personnes mobilisées que de personnes dans la salle de concert", elle a tenu à clarifier la position défendue par les manifestants:

"Bertrand Cantat a bien sûr le droit de chanter mais on a également le droit d’interroger les personnes qui font le choix d’aller l’applaudir et c’est là toute la différence, c’est la position qu’apportent son statut dans la société, sa renommée, sa reconnaissance, son pouvoir, ce dont les agresseurs se servent pour construire leur impunité."

Elle a d'ailleurs précisé: "Nous n’interrompons pas ses concerts, nous ne verrouillons pas les portes du Zénith. Et ce n’est pas parce que des personnes essayent de porter des messages d’égalité, de rappeler la réalité des violences masculines ou simplement le mépris que cela renvoie à toutes les femmes victimes de le voir sur scène que nous l’empêchons de travailler."

Elle dénonce "une injonction malsaine" 

Les années que le chanteur a passées en prison ne l'exonèrent pas de ses responsabilités, juge Raphaëlle Rémy-Leleu: "On remet en cause sa remise en lumière et même en ayant purgé sa peine, il est censé répondre à un certain nombre de principes, le principe de décence et de discrétion, et je ne suis pas sûre que remplir le Zénith corresponde à ces principes."

N'est-il pas possible cependant de faire la part des choses entre le casier judiciaire d'un homme et sa carrière artistique? "C’est une injonction totalement schizophrène, c’est quelque chose de particulièrement malsain. Il faudrait que nous coupions nos émotions en deux, entre celle que nous ressentons face à la musique de Bertrand Cantat et on peut être là ce soir comme féministes et avoir beaucoup aimé Noir Désir, et l’empathie que nous ressentons face aux femmes victimes de violences", a-t-elle estimé. "On peut être gêné, avoir des interrogations, ça n’empêche ni l’introspection ni l’intelligence et ça n’empêche pas non plus l’exigence face aux valeurs que porte la société et face à ce que ça signifie de célébrer encore aujourd’hui cet homme qui a tué."

Robin Verner